Enseignement supérieur en Belgique francophone : les découpages géo-politiques du ministre Marcourt (29/11/2012)

Selon Frédéric Chardon, dans « La Libre » de ce jour (extraits) :

(…) Décidément, l’UCL n’arrive pas à digérer la réforme de l’enseignement supérieur que concocte Jean-Claude Marcourt (PS), le ministre compétent au niveau du gouvernement de la Communauté française. En effet, selon nos informations, Bruno Delvaux, le recteur de l’UCL, vient d’envoyer un mail aux principaux ministres communautaires pour exprimer son opposition à l’avant-projet de décret défendu par Jean-Claude Marcourt. Le timing n’est pas innocent : le gouvernement des francophones doit examiner à nouveau le projet de texte ce jeudi. (…)

Dans son mail envoyé ce mardi, Bruno Delvaux exprime (en termes choisis) toute sa tiédeur à l’égard de l’avant-projet de décret. "Notre université est très concernée par l’avant-projet de décret car nous restons convaincus que le texte actuel ne permettra pas à notre université de contribuer pleinement au développement scientifique, social et économique de nos régions tout en restant compétitive au niveau européen et mondial", précise-t-il.

(…) En annexe au courrier électronique, le recteur transmet aux ministres du gouvernement de la Communauté française la vision de l’UCL sur la réforme, validée tout récemment par le conseil rectoral. Entre autres, la logique géographique du regroupement des établissements d’enseignement supérieur est à nouveau attaquée. Le tout sur fond de soupçons implicites que le plan Marcourt vise à détricoter l’organisation de l’UCL

Il faut lire ici entre les lignes : "Le critère géographique n’est visiblement pas le seul utilisé puisqu’on sépare Bruxelles et le Brabant wallon alors que l’on regroupe, au sein d’un même pôle, Liège et Arlon, Charleroi, Mons et Tournai, bien plus éloignés que ne le sont Bruxelles et Louvain-la-Neuve. Le pôle Bruxelles-Brabant wallon est insécable car il correspond à un seul bassin de vie. Séparer Bruxelles du Brabant wallon a en outre le défaut de séparer le secteur des sciences de la santé de l’UCL de sa maison mère, alors même qu’en termes d’étudiants et d’enseignants-chercheurs, ce seul secteur est de taille supérieure à l’UMons et aux FUNDP (facultés universitaires Notre-Dame de la Paix), sans prise en compte des cliniques universitaires Saint-Luc." (…)

Ici : L'UCL rejette le plan Marcourt

Alice Dive, toujours dans « La Libre », situe le contexte des enjeux qui font problème :

"Quelles sont les grandes lignes de la réforme ?

1) Une structure faîtière, l’Académie de recherche et d’enseignement supérieur (ARES). Elle rassemblerait l’ensemble de l’enseignement supérieur, améliorant ainsi la visibilité internationale de celui-ci et permettant de développer une forme de pilotage, notamment pour la collecte intégrée de données statistiques. Elle serait dotée d’un administrateur général nommé par le gouvernement de la Communauté française.

2) Cinq pôles académiques d’enseignement supérieur (PAES) regroupant les établissements d’enseignement supérieur établis dans une même zone géographique. Chacun des pôles serait organisé autour d’une université. Chaque établissement ne pourrait faire partie à titre principal que d’un seul pôle, celui où se trouve son siège social. Il pourrait être membre à titre complémentaire d’un ou de plusieurs pôles, là où il a une implantation fonctionnelle. Un membre à titre principal aurait la possibilité d’habiliter des formations. Sinon, il devrait le faire en co-diplomation avec un établissement à titre principal. Les cinq PAES seraient les suivants : Liège-Luxembourg, Namur, Brabant wallon, Hainaut et Bruxelles. Al.D.

Qu’est-ce que cela va changer sur le terrain ?

Concrètement, la structure faîtière qu’est l’Académie de recherche et d’enseignement supérieur (ARES) chapeauterait cinq pôles géographiques respectivement centrés sur l’ULB, l’UCL, l’ULg, l’UMons et l’Université de Namur (ex FUNDP).

Le projet de décret prévoit en effet qu’à l’intérieur de chaque zone géographique, l’unique université de la zone, ou celle qui est la plus importante, joue le rôle de référent. Chaque pôle serait ainsi géré par un conseil d’administration présidé par le recteur de ladite université. Par exemple, la Haute Ecole de Gembloux Agro-Bio Tech aurait comme référent l’ULg et ferait donc partie du pôle liégeois.

Un pôle mosan, un pôle Louvain, un pôle Bruxelles, un pôle hainuyer et un pôle Namur donc, mais pas de pôle pour Charleroi puisque pas d’unif comme référent. Et un découpage de la zone Bruxelles-Brabant wallon Al.D.

Quels sont les principaux obstacles au projet ?

Aujourd’hui basé sur une logique confessionnelle, l’enseignement supérieur tel qu’il est dessiné pour les décennies à venir en Communauté française suivrait donc une logique de "pôles", une logique géographique.

Mais voilà. Des voix s’élèvent ici et là pour critiquer cette réforme du paysage de l’enseignement supérieur qui incarnerait, nous déclare-t-on, une "vision régionaliste" du ministre et ce, en favorisant Liège et Bruxelles et en pénalisant l’enseignement libre confessionnel (catholique).

Du côté de l’Université catholique de Louvain, on s’estime en effet lésé dans ce dossier. "Notamment parce que l’UCL a sa faculté de médécine à Woluwe-Saint-Lambert, mais aussi parce qu’elle doit pouvoir poursuivre ses collaborations avec une série de hautes écoles basées à Bruxelles". D’auc uns parlent même d’une "volonté d’isolement" de l’UCL au sein de sa zone dans le chef du ministre de façon à "l’empêcher de nouer et/ou de renforcer des éventuels partenariats". L’UCL réclame ainsi l’insécabilité de la zone Bruxelles-Brabant wallon, avec le soutien... du CDH. »

Chassez le confessionnel et il revient au galop des enjeux  économico-financiers . C’est cela aussi la Belgique.

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