Le pape François est-il devenu un produit marketing ? (29/03/2014)

new-yorker-pape-francois.jpgSur le site « Figarovox », Paulin Césari, journaliste au Figaro-Magazine,  revient sur l'engouement médiatique autour de la personnalité du Pape. Il se gausse de la récupération par la société du spectacle d'un pape qui a pourtant fait du libéralisme et de la société de consommation des maux à combattre :

 « À les entendre, il semblerait que le nouveau pontife soit une synthèse improbable de Madoff et de Katsumi, de Guevara et de Mimie Mathy. Il serait venu libérer l'homme et le monde de cet effroyable carcan qu'ils appellent l'Église

Si Benoît fut méchant, François est gentil. Ainsi court la rumeur dans le monde merveilleux des Bisounours. Ainsi parlent depuis près d'un an les manœuvriers conscients et les idiots utiles du système à broyer les âmes (le libéralisme triomphant et la société du spectacle qui en est l'expression la plus achevée). Ils se pressent autour du pape François, en qui ils croient voir l'incarnation de leur fantasme structurel: un pape enfin moderne. Comprenons: un domestique servant l'esprit du monde et le corps de ses habitants. À les entendre, il semblerait que le nouveau pontife soit une synthèse improbable de Madoff et de Katsumi, de Guevara et de Mimie Mathy. Il serait venu libérer l'homme et le monde de cet effroyable carcan qu'ils appellent l'Église. Et par là même, nous inciter à la dérégulation totale (économique et pulsionnelle), afin de nous confirmer dans notre hédonisme acéphale et nos hébétudes narcissiques. Bref, selon eux, François ne serait pas catholique, et c'est la bonne nouvelle qu'ils souhaitent nous annoncer.

Les éloges ambigus se sont ainsi bousculés. Tous les représentants de l'ordre moral (journalistes, écrivains, essayistes, vedettes, politiques et autres «matons de Panurge») se sont ainsi succédé à la tribune. Chacun y allant de son encensement prescriptif, invitant le Pape à être contemporain, le sommant d'être actuel, l'assignant à la modernité.

Le but poursuivi est donc toujours le même : il s'agit de mettre le pape (comme le reste) aux normes!

Cette chanson est connue. Elle est aussi vieille, ennuyeuse et poussiéreuse que le monde, qui a toujours reproché à l'Église, et ceci dès l'origine, d'être ce qu'elle était: l'annonce d'une vérité s'incarnant dans le monde, mais n'en provenant pas et ne pouvant et ne devant donc pas être réduite et soumise à ce dernier. Autrement dit, il est demandé au pape d'aujourd'hui comme à ceux d'hier non plus d'inviter le monde et ses habitants à entrer dans la vérité du Christ, mais au contraire de conformer la vérité du Christ et de l'Église au monde et à ses désirs. Le but poursuivi est donc toujours le même: il s'agit de mettre le pape (comme le reste) aux normes! Or la norme ultime de nos temps présents porte un nom qui est aussi le nouveau nom du monde: le marché et son spectacle (Être suprême hors duquel il n'est point de salut), qui aspirent, afin de s'étendre indéfiniment, à transformer tout ce qui existe (nature, bêtes, hommes et dieux) en marchandise fétichisée, stimulant érotique de la grande partouze consumériste et cannibale qu'est la société du spectacle.

D'où cet emballement médiatique sans précédent autour du pontife qui fut tour à tour qualifié de «rock star», d' «homme de l'année», de «pape du Nouveau Monde», de «révolutionnaire»... Dans la plupart des cas, cette nouveauté devait s'entendre en un sens élémentaire: une adhésion supposée du pontife aux mœurs du temps présent, c'est-à-dire une mise aux normes: mariage pour tous, remise en cause du célibat des prêtres, euthanasie, avortement, etc. Bref, tout ce qui fait l'ordinaire et la joie du bipède libéré.

La création médiatique d'un pape ultramondain n'est qu'un pur produit marketing créé par le spectacle mettant en scène ses désirs afin qu'ils deviennent réalité : un avatar convenu et convenable, vendeur et vendable, une créature virtuelle et conforme au temps, censée remplacer le pape réel dans l'esprit de chacun

Or, si le pape François a parlé de révolution, c'est d'abord d'une révolution pour le Christ et par l'Église qui porte sa parole contre « l'adoration de l'antique veau d'or(Exode 32, 15-34)» qui «a trouvé un visage nouveau et impitoyable dans le fétichisme de l'argent, et dans la dictature de l'économie sans visage, ni but vraiment humain» et «... qui réduit l'homme à une seule de ses nécessités: la consommation. Et pire encore, l'être humain est considéré aujourd'hui comme étant lui-même un bien de consommation qu'on peut utiliser, puis jeter. Cette dérive se situe au niveau individuel et sociétal. Et elle est promue.» Cette critique sans appel de la barbarie contemporaine, de son consumérisme spectaculaire et de sa culture de mort réduisant l'humain à une marchandise, à un déchet organique (ainsi sont déjà nommés les embryons morts jetés aux poubelles, ainsi seront nommés tous les euthanasiés de demain), est sans appel et dépourvue d'ambiguïté. C'est pourquoi la création médiatique d'un pape ultramondain n'est qu'un pur produit marketing créé par le spectacle mettant en scène ses désirs afin qu'ils deviennent réalité: un avatar convenu et convenable, vendeur et vendable, une créature virtuelle et conforme au temps, censée remplacer le pape réel dans l'esprit de chacun. On apprend que le groupe Mondadori (propriété de Berlusconi et propriétaire de Closer) lance un magazine consacré au pontife. Il est destiné aux «fans» et «groupies». Chaque numéro contiendra un «poster» de Sa Sainteté. On n'y parlera pas de religion. Et, si l'on croit rêver, on a bien tort, car ainsi procède le système: il transforme toute critique du spectacle en spectacle de la critique, mettant alors cette dernière aux normes, la transformant en une marchandise comme une autre, lui ôtant ainsi toute valeur et l'annihilant à terme. Après bien d'autres qui ont succombé de la sorte, il s'agit cette fois de la parole christique et de son interprétation bimillénaire par l'Église qui est prise pour cible. Aucune surprise: «Dis-moi qui est ton ennemi et je te dirais qui tu es.»

 Référence : Le pape François est-il devenu un produit marketing ?

Voir aussi le site Benoît et moi » Bergoglio: le Pape qui va changer le monde ?... en réalité, le "monde" espère qu'il va liquider l'Eglise.

JPSC

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