Rome : Menaces sur la Commission Ecclesia Dei ? Mise à jour 11.06.2014 (11/06/2014)

Quel sera le sort de la Commission « Ecclesia Dei » dans le cadre de la réforme de la curie romaine ? Cette question posée par l'article de « Riposte catholique » recensé ci-dessous nous paraît légitime, même si l'analyse n'engage que son auteur.

C’est Jean-Paul II, en effet,  qui a voulu cette commission, pour gérer l’accueil des instituts traditionalistes refusant de suivre Mgr Lefèbvre et ses épigones dans la dissidence.

C’était, à l’origine, un organe sui generis, ne se rattachant à aucun dicastère. Le motu proprio « Summorum Pontificum » de Benoît XVI libéralisant l’usage des rites antérieurs à la réforme liturgique postconciliaire a tracé un cadre pour son action, tout en ajoutant que le statut et les pouvoirs de la commission feraient l’objet de précisions ultérieures.

La première mesure subséquente fut de la rattacher à la congrégation pour la doctrine de la foi (motu proprio "Ecclesiae unitate" du 8 juillet 2009) : Benoît XVI voulait lui faire jouer un rôle dans la gestion du dialogue doctrinal destiné à résorber la dissidence lefébvriste. La querelle des rites est, en effet, souvent emblématique d’un désaccord plus profond.

Par ailleurs, les règles édictées par le motu proprio pour obtenir l’usage des rites antérieurs à Vatican II se heurta très vite à des querelles d’interprétation : le problème s’est alors posé, entre autres, de savoir  si la commission avait le pouvoir juridictionnel de les trancher, surtout lorsque les conflits mettent en cause des évêques, ce qui n’est pas rare.  Une instruction d’application du motu proprio (30 avril 2011) reconnut alors formellement un pouvoir canonique de nature judiciaire à la commission, dans les matières de son ressort : deuxième mesure.

Mais, placée désormais sous la tutelle du préfet d’un imposant dicastère de la curie, la commission demeura fort discrète, prudente et guère pro-active, semble-t-il. Il en irait probablement de même, sinon pire, si on transférait cette instance de la doctrine de la foi aux rites où aux instituts religieux.

Si l’on reconnaissait une vraie spécificité aux questions du ressort de cette commission, le mieux serait sans doute de lui restituer son autonomie initiale autour de la mise en œuvre de « Summorum Pontificum »  et de placer à sa tête une personnalité forte, en phase avec la sensibilité « traditionaliste ». Mais c’est peut-être beaucoup demander au pape François, dont les centres d’intérêt sont manifestement ailleurs.

JPSC

Pope-Francis--014.jpg« Le blogue américain Rorate Cæli publie un article choc intitulé : « Quel sera l’état de l’Église après le Pape François ? » de don Pio Pace, qui a été traduit par le blogue canadien Notions romaines.

Don Pace y explique que le pontificat de François est moins novateur qu’on ne l’a cru au début. Les “gestes” multiples (chaussures noires, etc.) sont sans conséquence. Les déclarations doctrinales hasardeuses ne paraissent pas devoir déboucher à terme sur des effets institutionnels. Les nominations de François valent celles de Benoît, soit en bien, soit en médiocre. La réforme de la Curie sera forcément un pétard mouillé. Et pendant ce temps, la crise continue et s’amplifie.

L’article demande : « Quoi après ce pontificat ? » Les cardinaux qui ont élu Bergoglio ne le connaissaient pas et beaucoup déchantent. Quand il démissionnera, ils chercheront la “sécurité” avec un pape plus solide du point de vue théologique, moins brouillon. Et ils seront forcés d’avoir plus de réalisme en cherchant un pape qui sera moins “vitrine” et plus en phase avec les problèmes dramatiques de l’Église.

Mais le plus intéressant, et aussi le plus inquiétant, dans cet article de Rorate Cæli, est qu’il fait échos aux rumeurs concernant la disparition de la Commission Ecclesia Dei. Il ne faut pas se rassurer trop vite en disant que rien ne change sous le pape François : si on ne bouge pas dans une situation de décadence, on accélère la décadence. L’article parle d’un autre “scénario” possible, « beaucoup plus inquiétant » (much more disquieting), pour la fin du pontificat avec notamment des essais de remise aux normes de « l’esprit du Concile » de ceux qui s’en éloignent. Ce qui s’est passé avec les Franciscains de l’Immaculée pourrait bien être un ballon d’essai pour une tentative sur tout le catholicisme traditionnel [c’était l’avis de Sandro Magister dès le début] : il pourrait y avoir une mise sous le boisseau de la dynamique Summorum Pontificum. Car pour François, l’autorisation de la messe traditionnelle n’est qu’une tolérance donnée par Benoît XVI à une réserve d’Indiens : « Il s’agit d’une sorte de mode, et si c’est une mode, c’est une chose qui passera, à laquelle il ne faut pas tellement faire attention » (pape François aux évêques tchèques).

Du coup, la disparition de la Commission Ecclesia Dei, dont tout le monde parle à Rome depuis le début du pontificat, est sérieusement envisagée par Rorate Cæli. Sa compétence sur les communautés Ecclesia Dei, FSSP, ICRSP, IBP, etc., serait transmise à la Congrégation des Religieux du cardinal Braz de Aviz, le “tombeur” des Franciscains de l’Immaculée. On imagine la suite… D’autant que – c’est nous qui ajoutons ces réflexions –, le monde traditionnel est particulièrement individualiste, chacun espérant passer entre la pluie de grêle. Pas plus qu’on n’a vu, en dehors de l’Italie, de solidarité active en faveur des Franciscains de l’Immaculée (avec des réflexions du genre : « À nous, ces choses ne peuvent arriver » ; « Ils ont donné des bâtons : ils ont une doctrine lefebvriste »), on ne verra pas de front commun se former lorsqu’un institut sera en danger. Mais, pour en revenir aux analyses de Rorate Cæli, même si la petite Commission Ecclesia Dei n’a jamais eu une grande activité, c’est vrai, pour promouvoir la messe extraordinaire et défendre les groupes qui la demandaient, son existence est par elle-même un symbole fort, et sa disparition sera un symbole plus fort encore. »

Réf. Rome : Menaces sur la Commission Ecclesia Dei ?

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