Le rosaire, un remède aux maux de notre société ? (11/09/2014)

Les "Cahiers Libres" publient une interview de Jean-Michel Castaing :

“Un rosaire pour le troisième millénaire” Interview de Jean-Michel Castaing

Jean-Michel Castaing vient de publier le livre Un rosaire pour le troisième millénaire. Il a accepté de répondre aux questions des Cahiers Libres.

Pourquoi estimez-vous que la prière du rosaire est particulièrement pertinente pour notre époque ?

JMC : Nous traversons une grave crise anthropologique, touchant les modèles de notre compréhension de l’homme. Surtout dans les pays occidentaux. Pour aller vite, disons que nous ne savons plus ce qu’est, ou qui est, l’homme. On l’a constaté notamment avec le projet de loi dit « mariage pour tous ». Mais je pourrais citer bien d’autres exemples. Dès lors il m’a paru urgent de trouver un contre-feu à cette crise. Je me suis rendu compte que s’il existe une prière qui s’appuie justement sur ce qu’est l’homme, c’est bien le Rosaire. De plus je reste convaincu que nous ne sortirons de cette impasse culturelle que par le haut. Tous les rafistolages idéologiques ne serviront de rien en cette affaire. Justement, le Rosaire nous donne de contempler le plan de notre rédemption à travers le personnage de l’homme parfait, Jésus. Contrairement à une idée reçue, le « héros » principal de cette prière n’est pas Marie, mais son fils. C’est particulièrement évident avec la série des mystères douloureux.

Je suis donc parti du postulat suivant : si nous voulons nous rendre compte de ce qui ne va pas avec l’homme dans la postmodernité, mieux vaut partir de ce qu’est l’homme en sa plénitude : le Christ. Car le Christ est vrai homme et vrai Dieu. Que vous preniez les interrogations liées au corps, à la tension entre ancrage culturel particulier et mondialisation, à la fête ou au divertissement qui en est la caricature, à la place de l’image, du glamour, des nouvelles formes de socialisation au travers des réseaux sociaux, ou bien les thèmes de l’amour, de la solidarité, ou ceux, plus inquiétants, de l’occultisme ou de la tentation de bâtir une cité totalitaire, sur tous ces terrains le Rosaire a son mot à dire. Il balaye un champ de problématiques stupéfiant dans sa variété.

Comment le rosaire peut-il être un remède aux maux de notre société ?

Les maux de notre société ne tombent pas du ciel. La plupart naissent de l’idée que nous nous faisons de l’homme. Même la mondialisation culturelle et marchande, qui semble être un processus échappant à tout contrôle, voire même à toute préméditation, est portée par des soubassements idéologiques. C’est donc au niveau des idées, des a priori idéologiques, que se joue la lutte pacifique contre les aliénations dont notre monde est porteur. Comme je le soulignais précédemment, sur ces points les enseignements du Rosaire sont décisifs. Surtout, le Rosaire est une prière : par lui nous obtenons la grâce de Dieu nous permettant de résister aux tentations insidieuses de ce monde de facilités qui, loin de résoudre les problèmes, les aggravent. Face au maelström culturel que nous subissons, le secours divin ne sera pas de trop ! Car telle est ma conviction que seul un tel secours sera en mesure de nous extraire des aliénations véhiculées par la postmodernité. Le mal est trop profond, d’autant plus qu’il trouve en nous des alliés pour le proroger !

Le rosaire est une prière très répandue dans l’Eglise, et pourtant elle semble mal connue. Pourquoi ?

Les mentalités se sont focalisées sur la répétition des « Je vous salue Marie », sans tenir compte des vingt mystères évangéliques qui sont la substance de cette prière. « Le Rosaire ? Ah oui ! Les litanies sans fin ! ». On a retenu ces répétitions, sans s’apercevoir qu’elles permettaient de méditer sur des scènes décisives d’évangiles, ou sur des points fondamentaux de la foi (comme l’Assomption).

Qu’est-ce qui vous a incité à écrire ce livre ?

Les questions de société me passionnent depuis longtemps. C’est une façon pour moi d’être solidaire de mes contemporains, d’aimer le monde. Comme je suis croyant, je me suis dit qu’une partie des réponses à nos problèmes devaient résider dans l’Evangile. C’est assez logique. Si l’Evangile ne concerne que les hommes du premier siècle de notre ère, pourquoi continuer à les proclamer à la messe ? Je pense au contraire qu’ils ont leur mot à dire au sujet de la modernité tardive que nous traversons. Nous sommes toujours des êtres historiques, évoluant dans une époque particulière. Si la vie de Jésus, que le Rosaire nous fait contempler et prier, n’ assénait que des vérités intemporelles, de deux choses l’une: soit il nous faudrait quitter ce monde-ci pour aller le rejoindre dieu sait où, soit les évangiles n’auraient rien à nous dire sur le moment présent. C’est-à-dire que Dieu serait définitivement cantonné dans le passé et le futur, l’éternité, mais serait impuissant à éclairer notre présent. J’ai fait le pari d’infirmer cette hypothèse. Sans forcer les textes, les tordre abusivement, je reste persuadé que les mystères de cette prière possèdent encore quelque chose à nous apprendre, non seulement pour ce qui regarde notre spiritualité, mais aussi au sujet des problématiques que nous rencontrons de nos jours, et dont la perspective de résolution, à vue humaine, s’éloigne de plus en plus.

Propos recueillis par Charles Vaugirard

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