Le 200e anniversaire du rétablissement de la Compagnie de Jésus "pour la plus grande gloire de Dieu et le salut des âmes" (29/09/2014)

Bicentenaire du rétablissement de la Compagnie de Jésus

Cité du Vatican, 27 septembre 2014 (VIS). Cet après-midi en l'église du Gesù, le Pape François a présidé la liturgie de remerciement à l'occasion du 200e  anniversaire du rétablissement de la Compagnie de Jésus par Pie VII en 1814. Au cours de la liturgie composée des vêpres et du Te Deum, après l'Evangile et avant le renouvellement des promesses des jésuites présents, le Saint-Père a prononcé une homélie dont voici de larges extraits:

"La Compagnie portant le nom de Jésus a vécu des temps difficiles, de persécution. Au cours du généralat du P.Lorenzo Ricci, les ennemis de l'Eglise réussirent à obtenir la suppression de la Compagnie par mon prédécesseur Clément XIV. Aujourd'hui, en souvenir de son rétablissement, nous sommes appelés à faire un effort de mémoire, nous souvenant des bénéfices reçus et des dons particuliers... Aux époques de tribulation et de troubles apparaissent toujours des nuages de doutes et de souffrances, et il n'est pas facile d'aller de l'avant, de poursuivre son chemin. C'est surtout dans les moments difficiles et de crises que les tentations arrivent: se contenter de débats d'idées, se laisser transporter par la désolation, s'arrêter sur notre sort de persécutés et ne rien voir d'autre... Le P.Ricci qui écrivait aux jésuites d'alors...à une époque de confusion et de trouble a fait preuve de discernement. Il n'a pas perdu son temps dans des discussions d'idées et autres lamentations, mais il a pris en charge la vocation de la compagnie". La Compagnie "a pleinement vécu le conflit...en vivant l'humiliation avec le Christ humilié. Elle a obéi. Nul ne se sauve du conflit par la ruse et par des stratagèmes pour résister. Dans la confusion et face à l'humiliation, la Compagnie a préféré vivre le discernement de la volonté de Dieu, sans chercher à sortir du conflit de façon apparemment tranquille. Ce n'est jamais la tranquillité apparente qui assouvit nos coeurs mais la véritable paix qui est don de Dieu. On ne doit jamais chercher le compromis facile... Seul le discernement nous sauve du vrai déracinement, de la vraie suppression du cœur qu'est l'égoïsme, la mondanité, la perte de nos repères, de notre espérance qui est Jésus, qui est seulement Jésus. Ainsi, le P.Ricci et la Compagnie en phase de suppression a privilégié l'histoire à une probable historiette grise, sachant que c'est l'amour qui juge l'histoire et que l'espérance, même dans l'obscurité, est la plus grande de nos attentes... C'est pourquoi, le P.Ricci profita de cette période de confusion et d'égarement pour parler des péchés des jésuites... Se regarder en face en se reconnaissant pécheurs évite de se mettre en condition de victimes devant un bourreau. Se reconnaître pécheurs, se reconnaître vraiment pécheurs, signifie se mettre dans l'attitude juste pour recevoir du réconfort".

"Nous pouvons parcourir brièvement ce chemin de discernement et de service que le père général indiqua à la Compagnie. Lorsqu'en 1759, les décrets de Pombal détruisirent les provinces portugaises de la Compagnie, le P.Ricci vécut le conflit sans se lamenter et se laisser aller à la désolation, mais en invitant à la prière pour demander l'esprit bon, l'esprit vrai surnaturel de la vocation, la parfaite docilité à la grâce de Dieu. Lorsqu'en 1761, la tempête arrivait sur la France, il demanda d'avoir toute confiance en Dieu... En 1760, après l'expulsion des jésuites espagnoles, il invitait encore à la prière. Et enfin, le 21 février 1773, six mois à peine avant la signature du Bref Dominus Ac Redemptor, face au manque total de soutiens humains, il vit la main de la miséricorde de Dieu qui invite ceux qu'il met à l'épreuve à ne pas s'en remettre à d'autres que Lui... Pour le père Ricci, l'important est que la Compagnie jusqu'à la fin soit fidèle à l'esprit de sa vocation qui est la plus grande gloire de Dieu et le salut des âmes... La Compagnie, même devant sa propre fin, est restée fidèle à l'objectif pour lequel elle a été fondée. C'est pourquoi le P.Ricci conclut par une exhortation à maintenir vivant l'esprit de charité, d'union, d'obéissance, de patience, de simplicité évangélique, d'amitié vraie avec Dieu. Tout le reste est mondanité... Rappelons-nous de notre histoire. A la Compagnie a été donnée la grâce non seulement de croire dans le Seigneur, mais aussi de souffrir pour lui. Cela nous fait du bien de le rappeler. La barque de la Compagnie a été ballottée par les vagues et il n'y a pas de quoi se réjouir. La barque de Pierre aussi peut l'être aujourd'hui. La nuit et le pouvoir des ténèbres sont toujours proches. Ramer est fatiguant. Les jésuites devront être des rameurs experts et vaillants... Ramez, soyez forts, même avec un vent contraire! Ramons au service de l'Eglise. Ramons ensemble! Mais alors que nous ramons, tous, même le Pape rame dans la barque de Pierre, nous devons beaucoup prier... Même si nous sommes des hommes de peu de foi, le Seigneur nous sauvera". Restaurée par Pie VII, la Compagnie "était constituée d'hommes courageux et humbles dans leur témoignage d'espérance, d'amour et de créativité apostolique, celle de l'Esprit... C'est pourquoi il demanda l'autorisation aux jésuite qui existaient encore ici et là, grâce à un souverain luthérien et une souveraine orthodoxe, à rester unis en un seul corps... La Compagnie reprit son activité apostolique de prédication et d'enseignement, les ministères spirituels, la recherche scientifique et l'action sociale, les missions et le soin des pauvres, des personnes souffrantes et des marginaux. Aujourd'hui, la Compagnie affronte avec intelligence et activité le problème tragique des réfugiés et des migrants, et s'efforce avec discernement d'intégrer le service de la foi et la promotion de la justice conformément à l'Evangile. Je confirme aujourd'hui ce que Paul VI nous disait lors de notre 32 congrégation générale et que j'ai moi-même entendu: Partout dans l'Eglise, même dans les domaines les plus difficiles et à la pointe, aux croisées des idéologies, dans les tranchées sociales, vous avez dû et vous devez confronter les exigences brûlantes de l'homme et le message pérenne de l'Evangile, c'est là qu'ont été et que sont les jésuites. En 1814, au moment du rétablissement, les jésuites étaient un petit troupeau, une compagnie minime, qui se sentait toutefois investie, après l'épreuve de la croix, de la grande mission de porter la lumière de l'Evangile jusqu'aux confins de la terre. C'est donc ainsi que nous devons nous sentir aujourd'hui, en sortie, en mission. L'identité du jésuite est celle d'un homme qui adore Dieu seul et aime et sert ses frères, montrant par l'exemple non seulement ce en quoi il croit, mais aussi en quoi il espère et qui est celui en qui il a mis sa confiance".

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