L'IVG ou le triomphe d'un individualisme aveugle et destructeur (15/10/2015)

Voici l'éditorial de Monseigneur de Germay, évêque d'Ajaccio, paru dans la revue Eglise de Corse :

IVG : victoire de l’individualisme ?

 

« IVG : mon corps, mon choix, mon droit ». Face au slogan de la dernière campagne en faveur de l’avortement, on en viendrait presque à se dire : « à quoi bon s’insurger ? » La Conférence des Evêques de France l’a fait cependant dans un communiqué qui, avec mesure et clarté, dénonce une vision purement individualiste de la personne.

Mais peut-être faut-il aller plus loin en se demandant : comment a-t-on pu en arriver là ? Comment l’individualisme a-t-il pu imprégner à ce point les mentalités – y compris celles de nos dirigeants – jusqu’à devenir aveugle et destructe

ur ? Si la liberté individuelle devient toute-puissante et revendique de n’avoir pas à tenir compte des autres pour décider, comment s’étonner du délitement de la vie sociale ? Si mon choix devient un droit uniquement parce que c’est mon choix, alors la notion même de droit disparait. Le droit, en effet, n’existe que pour régir la vie en société, il est là pour préserver les rapports sociaux de la violence et de l’arbitraire. Vouloir créer un droit à partir de l’unique « je » n’est-il pas un déni de vie sociale ?

Un tel individualisme obscurcit peu à peu la conscience d’être responsable de l’autre

Un tel individualisme obscurcit peu à peu la conscience d’être responsable de l’autre. L’autre en effet disparait sous la toute-puissance de mon désir érigé en absolu. L’enfant à naitre disparait, le père disparait, les frères et sœurs disparaissent, on ne les voit plus, seul demeure « mon choix ».

Et si nous nous efforcions de sortir de cette logique mortifère, de penser autrement notre rapport au corps, notre vision de la liberté, notre conception du droit ? Notre corps n’est-il pas porteur d’un appel à entrer en relation avec l’autre ? L’autre n’est-il pas porteur d’un appel à me libérer de mon égoïsme et à me soucier de ses besoins ? Mes droits ne doivent-ils pas s’insérer dans une fraternité et s’ajuster aux droits de l’autre ?

Le temps est venu de sortir par le haut des combats idéologiques

L’individualisme est séduisant, et nous nous y laissons facilement prendre, mais si nous voulions bien nous entraider à sortir de ce carcan, alors nous pourrions découvrir que la prise en compte des besoins des autres, tout spécialement les plus fragiles, n’est pas un devoir qui vient limiter nos droits, elle répond au contraire à l’un de nos désirs profonds, celui de protéger la vie et de prendre soin des autres. Nous sommes fondamentalement des êtres de relation et notre épanouissement est lié à notre capacité à nous sentir solidaires de notre prochain. L’amour du prochain ne résume-t-il pas toute la loi ?

« Protéger : ton besoin, mon désir, notre responsabilité ». Comme un antidote de l’individualisme, ce slogan-là pourrait tracer le chemin d’une société plus juste et plus fraternelle, c’est-à-dire plus humaine. Il ne concerne pas uniquement les femmes enceintes, il interpelle tous ceux qui pressentent que le temps est venu de sortir par le haut des combats idéologiques et de servir notre désir commun de vivre ensemble et d’être unis.

+ Olivier de Germay Evêque d’Ajaccio

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