L’école (catholique ou même publique) doit-elle contribuer à islamiser les enfants musulmans ? (23/08/2016)

Du Père Edouard-Marie Gallez sur le site EEChO :

Islamiser les enfants à l’école (publique ou pas) ?

Si la religion islamique est impliquée dans cette courte étude en rapport avec l’école et plus particulièrement en rapport avec les écoles catholiques, ce qui y est dit est de portée beaucoup plus large. La même question pourrait se poser théoriquement à propos de la religion des Mormons ou celle des Témoins de Jéhovah : l’école (catholique ou même publique) devrait-elle contribuer à transmettre leurs doctrines à leurs enfants respectifs ?

Ce que nous montrons ici, c’est que la société civile a le droit et le devoir de décourager – a fortiori de ne pas encourager – ce qui contrevient au bien commun ou qui est en opposition formelle avec la raison. La religion islamique y contrevient de multiples manières, notamment, en Occident, par un esprit de provocation suscitant clairement la violence parmi les jeunes.

Se vouloir en opposition à ce que vit la société peut s’avérer légitime (et on aimerait que ce soit l’attitude de la majorité de ceux qui se disent chrétiens), mais la provocation, le chantage et la coercition (ou pire encore) ne sont jamais des moyens légitimes.

islam a l'ecole

En ce sens, la religion islamique avec ses pratiques ne peut pas revendiquer la place du christianisme dans l’espace public : elle ne peut bénéficier que des droits privés liés à la vie privée de ses adeptes, non des droits publics.

Par ailleurs, les buts mêmes que poursuit la religion islamique sont-ils légitimes ? Cette question sort évidemment de la compétence de la société civile. Elle est de nature idéologico-eschatologique. Elle est du ressort des chrétiens. Si l’islam n’est qu’un sous-produit dérivé du christianisme, les chrétiens doivent aider les musulmans à le mettre en question (ce que beaucoup font déjà dans les pays musulmans, mais pas en Europe) : autrement, l’amour qu’ils diraient avoir pour eux ne serait qu’un vaste mensonge. Mais ceci est une autre question.

 

L’enseignement catholique doit-il contribuer à islamiser les enfants musulmans ?

article paru dans Liberté politiquejuin 2016, n° 70, p.11-16 (texte complet)

La question est abrupte. Et pourtant, c’est ainsi qu’elle se pose aujourd’hui en Belgique, dans le sud comme dans le nord [1] du pays, et c’est ainsi qu’elle se posera probablement en France.

Il est question d’organiser, pour les élèves musulmans qui y sont accueillis, des cours d’islam, dans des écoles catholiques, avec des professeurs musulmans. Pour l’instant, il n’est question que du samedi matin, hors du temps scolaire. L’enseignement catholique (Segec) contribuerait de la sorte structurellement à l’islamisation des enfants, en y prêtant et ses infrastructures et sa caution.

Un tel projet reflète assez clairement l’abandon de toute perspective de témoignage chrétien, au moins dans l’esprit des responsables nationaux.

Rien n’empêchera que, dans un second temps, les cours d’islam soient intégrés dans les heures scolaires elles-mêmes, comme c’est le cas dans certaines écoles du réseau d’Etat. Et dans un troisième temps, ils seront imposés à tous au titre de l’information « pluraliste », comme en Angleterre. En fait, une telle « information » qui reprend le discours islamique sur ses propres origines est déjà donné ici et là, beaucoup d’enseignants ne sachant pas quoi dire ou ne pas dire en présence d’élèves musulmans, parfois « radicalisés » comme on dit. Au reste, les manuels d’histoire se chargent souvent eux-mêmes de fournir aux élèves le discours islamique, accompagné d’une jolie apologie de l’islam.

Droit des parents et mauvaises solutions

Les parents ont le droit d’élever leurs enfants selon leur conviction personnelle[2]. Pour autant, une institution supposée catholique doit-elle apporter son concours à la transmission de n’importe quelle croyance ? Il y a une différence entre tolérer et collaborer.

En réalité, le problème soulevé est plus large et concerne la société civile entière. Celle-ci doit-elle collaborer ou non à la diffusion de croyances qui constituent une menace sociale, selon ce que le président égyptien Sissi a expliqué lui-même à l’université Al-Azhar ?

“Il est inconcevable que la pensée que nous tenons pour sacrée fasse de l’Umma une source d’inquiétude, de danger, de meurtres et de destruction pour le reste du monde… Comment est-il possible que 1,6 milliard d’êtres humains [= le nombre supposé de Musulmans aujourd’hui] veuille tuer le reste de l’humanité – c’est-à-dire 7 milliards de personnes – en vue de pourvoir vivre eux-mêmes ?” (allocution du 24 décembre 2014).

Cette question se pose en effet à toutes les sociétés civiles du monde, y compris musulmanes. Un exemple éloquent est celui du Pakistan, pays confronté en permanence à des attentats. Le pouvoir en place combat les groupes terroristes qui sont plus islamistes que lui, mais il les suscite par son propre islamisme. Le résultat, outre les effrayantes persécutions contre les chrétiens, ce sont des centaines de milliers de Pakistanais qui fuient le pays. Comme les pays du Golfe leur sont fermés, ils veulent venir en Europe mais n’abandonnent pas les « valeurs » de leur pays, et sont porteurs de tout ce qui le détruit. Comment en sortir ?

Depuis plus de cinquante ans, des intellectuels occidentaux ont pensé qu’il suffirait d’encadrer l’enseignement de l’islam et d’expurger le Coran de certains de ses passages les plus violents pour obtenir un « islam compatible ».

Le premier de ces deux objectifs a été poursuivi déjà dans plusieurs Etats islamiques, et en vain. Il supposait des pays relativement fermés et des populations qui étaient musulmanes davantage par tradition que par conviction ou par connaissance réelle du Coran et des traditions islamiques. De plus, l’intérêt des gouvernants les rendait enclins à favoriser un « islam paisible », opposé au fanatisme politique. Mais dans un monde ouvert et façonné par le web, tout projet de contrôler de l’extérieur ce qui se dit dans les mosquées devient illusoire. Et a fortiori tout projet d’enseigner un « islam de rêve »: on ne réussirait ainsi au mieux qu’à retarder l’adhésion à l’islam intégral, et en tout cas on y conduirait.

Au reste, comment pourrait-on réussir à occulter les accusations contre les juifs et les chrétiens qui sont au cœur du message coranique ? Et les imprécations contre eux au nom de Dieu ? Et les appels au meurtre ? Il ne faut pas prendre les enfants pour des idiots : beaucoup maîtrisent mieux l’internet que ceux qui les enseignent. Il ne leur est pas difficile d’être en contact avec l’islam intégral diffusé par des Etats ou des groupes financiers islamiques, s’ils ne subissent pas déjà dans leur quartier l’action de réseaux islamistes.

La prétention catholique à favoriser un islam soft « fait maison » est donc une illusion dramatique, et c’est encore peu dire face aux phénomènes de « radicalisation » et d’enfermement communautariste tels que les statistiques disponibles les dévoilent.

Quant à expurger le texte de ses passages les plus violents, le Coran n’est pas le Talmud : il est, pour les musulmans, non une œuvre de compilation humaine mais la Parole même de Dieu, littéralement dictée en arabe à un transmetteur (Mahomet). On ne peut pas y toucher. Cette croyance en la dictée par un ange (Gabriel) est inséparable de la foi islamique – même si sa mise au point s’étale sur plus d’une centaine d’années. Elle est figée et sacralisée dans une vaste tradition de commentaires, qui englobe tout le Coran et en particulier ses perspectives de conquête et d’agression-soumission (islam en arabe).

Ainsi, le discours laïciste (« On va laïciser l’islam, comme on l’a fait pour le catholicisme ») apparaît comme un non-sens, et pire encore s’il est tenu par des responsables chrétiens – occidentaux : pas un chrétien d’Orient ne soutiendrait de telles inepties.

Le droit des enfants et la raison

Et les enfants en tout cela ? Ont-ils des droits ?

Supposons un instant l’existence d’une secte de lunatiques qui croirait que la lune est verte et que la Déesse du monde y siège. Les parents qui font partie de cette secte ont parfaitement le droit d’enseigner à leurs enfants une telle croyance – nous supposons aussi que celle-ci ne prône pas l’élimination des terriens à l’exception des lunatiques. Pour autant, l’enseignement catholique doit-il collaborer à la diffusion de cette croyance auprès des enfants de la secte qui viennent dans ses écoles ?

En réalité, la question est plus générale. N’existe-t-il pas un droit des enfants à n’être pas trompés ? On a oublié qu’un tel droit repose sur l’exigence même de la raison, qui fonde la dignité humaine. Le droit à n’être pas trompé concerne tout être humain, mais spécialement les enfants qui sont si facilement manipulables. Les droits des parents doivent évidemment rester saufs, nous parlons ici d’un droit d’exercice sociétal qui suppose un discernement : tout message privé ne doit pas être relayé dans la société, certains ne devraient même pas sortir du cadre familial ou lié au droit des parents.

Or, quel est le contenu du message islamique ?

D’abord, ce qui est dit sur les origines de l’islam constitue une légende, et cette légende, présentée comme historique, offense gravement l’intelligence non seulement par ses invraisemblances (par exemple la jument ailée Buraq qui transporte Mahomet à Jérusalem), mais parce qu’elle va à l’encontre de tout ce que la recherche historico-critique a pu mettre en lumière, spécialement ces dernières années (lieux, groupes impliqués, dates, etc.). Est-ce respecter les enfants devenus grands que de favoriser la diffusion de fables ?

Justement, si ce sont des fables, elles n’ont rien de gentil, les paroles du Président Sissi ont un lourd fondement. La figure du « Prophète de l’islam » élaborée par la tradition islamique – et présentée comme historique – donne l’exemple d’un meurtrier rusé, amant de quatre femmes et de vingt-trois concubines, etc. Elle fait appel aux pires mécanismes du mimétisme décrits par René Girard, en glorifiant la domination et l’appropriation par tous les moyens. C’est probablement ce qui fait le succès de l’islam auprès de jeunes, parfois d’origine non musulmane, peut-être aussi à cause de l’emploi du nom de Dieu. Ce nom remue les ressorts les plus profonds de la psychologie humaine, spécialement dans un monde qui prive les enfants de tout sens de la vie sinon celui des jouissances (lesquelles sont destinées surtout à ceux qui ont de l’argent).

Enfin, cette croyance donne des « méchants » à haïr – ce qui fonctionne toujours dans la psychologie enfantine –: ce sont les juifs et les chrétiens, présentés comme des falsificateurs de leur « révélation » respective. Ils sont donc condamnés (à l’enfer), ce que le Coran fait dès la première sourate – même si le dernier verset qui porte cette condamnation est un ajout : il ne fait que reprendre ce qui est dit souvent ailleurs dans le texte coranique.

Le droit des enfants à n’être pas trompés rejoint manifestement ici le droit de la société civile à se protéger des sectarismes : en aucun cas, l’islamisation des enfants ne devrait être favorisée.

Un enseignement catholique sans boussole ?

Notons que cette sourate 1 ou Fâtiha est la prière traditionnelle coutumière de l’islam (d’où la raison probable de l’ajout), et beaucoup de musulmans la répètent sans faire attention aux paroles. Pour autant, quelqu’un comme le Père Antoine Moussali, libanais, refusait toujours de la dire avec ses amis musulmans, parfois un peu étonnés ; « Je ne suis pas maso », leur expliquait-il gentiment. Pour revenir à l’exemple belge, on peut se poser la question : cette Fâtiha a été proclamée en présence d’un évêque en l’église du collège St Michel de Bruxelles le 23 avril dernier, tous les participants étant invités à la répéter – des chrétiens ont été également pris dans un piège aussi gros à Lyon.

Lorsque des chrétiens dont sans doute des évêques disent une prière musulmane qui les condamne à l’enfer, comment s’étonner si les hauts responsables de l’enseignement catholique soient enclins à prêter eux aussi leur structure à l’expression de la croyance islamique ? On en est pas (encore ?) à inviter le voile islamique dans les classes :  le directeur du Segec belge en prône l’interdiction au nom de celle de tout couvre-chef ; c’est évidemment quelque chose, mais la justification paraît légère

Tant que la nouvelle religion sociale, le relativisme, restera la norme de la pensée chrétienne occidentale (si l’on peut parler encore de « pensée » dans un cadre où le fait de penser devient une incongruité, voire une faute sanctionnée par l’exclusion de l’enseignement catholique), la situation ne risque pas de changer.

Il est temps de rappeler qu’il existe un droit des enfants – et des adultes – à n’être pas trompés. Undroit fondamental que le décret sur la liberté religieuse de Vatican II a malheureusement oublié de traiter. Faudra-t-il un Vatican III pour cela ?

En attendant, les clés sont là pour ouvrir des perspectives d’avenir (et de vrais dialogues), qui replacent l’islam dans l’histoire des post-christianismes. Les recherches actuelles au demeurant vont dans ce sens. Le problème n’est pas le manque de connaissances mais le refus de les admettre.

Edouard-M. Gallez

___________________________
[1] “Le Secrétariat flamand de l’enseignement catholique (KOV) veut faire une place à part entière au culte musulman et aux autres religions à l’école. […] « C’est un projet ambitieux », souligne Lieven Boeve, du KOV. « Dans une école de dialogue, il y a par exemple de la place à côté d’une chapelle pour une salle de prière pour les musulmans ou le voile », déclare Didier Pollefeyt” – http://www.lavenir.net.

[2] Ce droit implique notamment que les parents ne soient pas obligés de mettre leurs enfants dans des écoles reconnues par l’Etat, s’ils leur fournissent autrement l’éducation nécessaire au monde d’aujourd’hui. Les pouvoirs en place estiment, eux, que “les enfants appartiennent à l’Etat” et veulent interdire, en France comme ailleurs, cette liberté des parents – cf. projet de loi n° 3704 du 27 avril 2016 visant à interdire l’école à la maison et durcissant les conditions pour l’ouverture d’un établissement privé hors contrat (voir ici).

08:02 | Lien permanent | Commentaires (4) |  Facebook | |  Imprimer |