Qu’est-ce qu’un pape peut et ne peut pas faire ? (22/01/2017)

Il fut un temps, pas si lointain, où les papes apposaient à côté de leur signature les lettres « ssd » : servus servorum Dei. Ce qualificatif reste parfaitement vrai : non  parce que les Souverains Pontifes seraient tous des modèles d’humilité mais pour une raison théologique : le pape n’est pas un monarque absolu. On le qualifiait jadis de « Vicaire du Christ » ou « Sainteté de Notre-Seigneur » (encore  deux titres disparus du vocabulaire ecclésial) car, comme le résumait en vérité le petit catéchisme, Jésus est le Chef de l’Eglise et l’Eglise est sainte parce que son Chef Jésus-Christ est saint. Petite piqûre de rappel formulée par George Weigel sur le site « aleteia » :

« Les papes ne sont pas comme les présidents ou les gouverneurs, tout comme la doctrine catholique n’est pas comme la politique.

L’un de mes grands amis fait habituellement référence au Wall Street Journal comme le « journal catholique favori » aux États-Unis. En effet, le journal évoque régulièrement les nombreux points de vue de l’Église catholique sur d’innombrables sujets. Mais le « meilleur » journal des États-Unis s’égare de temps en temps. Ce fut le cas il y a 3 ans, le 2 janvier 2014, lorsqu’il a évoqué les motifs pour lesquels le pape François était « l’une des personnes à surveiller en 2014 ».

« Après avoir fait naître des attentes sur une nouvelle approche de l’homosexualité, du divorce, de l’environnement et sur les obligations de la société envers les pauvres, on peut s’attendre également à ce que le pontife prenne en charge la réforme de la bureaucratie du Vatican et augmente le rôle des femmes dans l’Église ».

Selon mes calculs, ce seul paragraphe comporte quatre erreurs, notamment sur la manière de considérer le « rôle » ecclésiastique.

Ne pas confondre la doctrine catholique et la politique

Bien qu’il soit très difficile de comprendre pour celui qui observe le catholicisme avec un regard politisé, il faut bien considérer que les papes ne sont pas comme des présidents ou des gouverneurs, de même que la doctrine catholique n’est pas comme la politique. Cela signifie qu’un changement de « gouvernement » n’est pas, et ne peut pas être, un changement de points de vue catholique. La doctrine, comme l’Église la conçoit, n’est pas une question de points de vue, mais d’ententes fondées sur la vérité.

Les papes ne sont pas des électrons libres qui gouvernent selon leur bon plaisir. Avant la finalisation de la Constitution dogmatique de Vatican II sur l’Église, le pape Paul VI avait proposé d’ajouter au document une phrase affirmant que le pape est « responsable uniquement face au Seigneur ». C’était certainement une volonté de protéger l’autorité papale mais aussi sa liberté d’action devant de possibles ingérences civiles ou ecclésiastiques.

Mais la Commission de Théologie du Concile a rejeté cette proposition en faisant remarquer que « le pontife romain est obligé de respecter la révélation, la structure fondamentale de l’Église, les sacrements, les définitions des conciles précédents et autres obligations. »

Ces « autres obligations » incluent le respect de la vérité. Durant une conférence académique, il y a plusieurs années, un célèbre philosophe catholique a proclamé : « Si le pape affirmait que 2+2=5, je le croirais ». Un philosophe catholique encore plus éminent lui a apporté une réponse correcte et davantage catholique : « Si le Saint Père disait que 2+2=5, je dirais publiquement “Peut-être ai-je mal compris ce que votre Sainteté veut dire.” »

Le pape est le serviteur et non le maître

Les papes ne sont pas des personnages autoritaires qui enseignent ce qu’ils veulent et comme bon leur semble. Le pape est le gardien d’une tradition qui fait autorité, dont il est le serviteur et non le maître. Le pape François le sait mieux que quiconque, comme il l’a lui-même souligné en répétant qu’il est un « fils de l’Église », qui croit et enseigne ce que l’Église croit et enseigne.

C’est pourquoi seront déçus ceux qui pensent que ce pontificat va changer la doctrine catholique sur, par exemple, la moralité des actes homosexuels ou sur la question du remariage des couples divorcés. Malgré cela l’Église peut et doit, bien entendu, mieux développer son approche pastorale sur ces questions.

Ref.  Qu’est-ce qu’un pape peut et ne peut pas faire ?

Le pape n’a pas le pouvoir de changer la doctrine de la foi. Ainsi le pape Paul VI s’est-il senti obligé, face aux déviations doctrinales consécutives au concile Vatican II,  de s’en désolidariser publiquement par une profession de foi solennelle,  prononcée le 30 juin 1968  sur la place Saint-Pierre de Rome.  Et la même année,  il publia, dans le même esprit , la courageuse encyclique « Humanae Vitae »  

JPSC

Le commentaire d'Arnaud Dumouch :

 

"J'ajouterais ceci : Parce que Jésus a prié pour son Eglise et a conféré à la FONCTION PONTIFICALE un charisme d'infaillibilité (Luc 22, 32) "lorsqu'elle proclame une doctrine universelle concernant le salut", si un pape voulait proclamer une erreur, IL NE LE POURRAIT PAS. Il en serait empêché d'une manière ou d'une autre par le Christ. On l'a vu une fois dans l'Eglise avec le pape d'Avignon Jean XXII. Il voulait proclamer que les âmes des saints n'entrent dans la vision béatifique qu'à la fin du monde. Il n'en a pas eu le temps. Et son successeur nous a donné la célèbre Constitution dogmatique "Benedictus Deus" dont voici le texte (citation) : BENOIT XII Constitution dogmatique « Benedictus Deus », 1336, Dumeige 510. [1° Toutes les âmes sanctifiées du baptême du Christ…] Par la présente constitution qui doit rester à jamais en vigueur, et de notre autorité apostolique, nous définissons ce qui suit : D'après la disposition générale de Dieu, les âmes de tous les saints qui ont quitté ce monde avant la passion de Notre Seigneur Jésus-Christ ; et de même celles des saints apôtres, martyrs, confesseurs, vierges autres fidèles morts après avoir reçu le saint baptême du Christ qui n'ont rien eu à expier à la mort, ou qui à l'avenir n'auront rien à expier à leur mort ; ceux aussi qui ont eu ou auront à se purifier, lorsque après leur purification elles auront achevé de le faire,¬ de même encore les âmes des enfants régénérés par le même baptême du Christ ou encore à baptiser, quand ils l'auront été s'ils viennent à mourir avant l'âge de discrétion ; [2° aussitôt après leur mort et leur purgatoire…] Toutes, aussitôt après leur mort et l'expiation susdite pour celles qui avaient besoin de cette expiation, même avant la résurrection de le corps et le jugement général, et¬ cela depuis l'ascension de Jésus-Christ notre Sauveur, sont, ou seront au ciel, au royaume des cieux et au céleste paradis avec le Christ, admises dans la société des anges ; [3° … ont la vision béatifique…] Et depuis la mort et la passion de Notre-Seigneur Jésus-Christ, elles ont vu, voient et verront la divine essence d'une vision intuitive et même faciale, sans aucune créature dont la vue s'interpose, mais immédiatement, grâce à la divine essence qui se manifeste elle-même à nu, clairement et ouvertement. En outre, par le fait même de cette vision, les âmes de ceux qui sont déjà morts, jouissent de la divine essence, et par le fait même de cette vision et de cette jouissance elles sont vraiment bienheureuses et possèdent la vie et le repos éternel ; de même en sera-t-il des âmes de ceux qui, mourant dans la suite, verront la divine essence et en jouiront avant le jugement général. [4° et donc sont bienheureuses à jamais] De plus, cette vision et cette jouissance de la divine essence font cesser dans ces âmes les actes de foi et d'espérance, en tant que foi et espérance s'entendent des vertus théologiques au sens propre. En outre, depuis le moment où elles ont commencé ou auront commencé dans ces âmes, cette même vision intuitive et faciale et cette même jouissance ont duré et dureront, sans interruption et sans fin, jusqu'au jugement dernier et dès lors à jamais. [5° Aussitôt après leur mort, les âmes mortes en état de péché mortel sont en enfer] Nous définissons encore ce qui suit : d'après la disposition générale de Dieu, les âmes de ceux qui meurent coupables de péché mortel actuel, descendent aussitôt après leur mort en enfer, pour y subir les peines infernales ; et néanmoins au jour du jugement tous les hommes comparaîtront avec leurs corps devant le tribunal du Christ, pour rendre compte de leurs actes personnels, afin que chacun soit récompensé en son corps suivant qu'il aura fait le bien ou le mal." (fin de citation) Hélas ce charisme donné par le Puissance de Jésus ne s'étend qu'aux définitions de la Doctrine universelle. Il ne les protège pas quant à leurs décisions pastorales pratiques, ni quant à leurs réformes liturgiques, ni pour leur comportement personnel."

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