La Cour Européenne des Droits de l'Homme autorise l'arrêt des soins du petit Charlie Gard (03/07/2017)

Lu sur le site d'Alliance Vita :

Grande-Bretagne : La CEDH autorise l’arrêt des soins du petit Charlie Gard 

SoinsIntensifs

La Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) donne raison aux tribunaux britanniques, dans sa décision du 28 juin 2017, et autorise l’arrêt des soins de Charlie Gard, un enfant de 10 mois atteint d’une maladie mitochondriale.

A sa naissance, le 4 août 2016, le petit Charlie est diagnostiqué MMDR (sous la forme RRM2B), une maladie génétique rare, et les espoirs d’amélioration de sa situation sont quasiment nuls. L’hôpital a demandé un jugement déclaratoire aux tribunaux britanniques pour savoir s’il était légal de retirer la respiration artificielle de l’enfant et de lui dispenser des soins palliatifs. Les parents, de leur côté, ont plaidé pour savoir « s’il serait dans l’intérêt supérieur de leur fils de lui administrer un traitement expérimental aux États-Unis ». Les tribunaux ont tranché en accordant à l’hôpital de pouvoir arrêter la respiration artificielle considérant que l’enfant souffrait de douleurs impossibles à soulager.  Selon les tribunaux,  ces soins expérimentaux ne lui procureraient aucun avantage.

Les parents, Chris Gard et Connie Yates, ont saisi la CEDH sur le fondement des articles 2, 5, 6 et 8. Pour ces derniers, la décision de l’hôpital constitue une ingérence dans leur vie familiale, et également une violation du droit à la vie. La Cour a accordé, le 9 juin,  une mesure provisoire pour que l’enfant soit  maintenu en vie jusqu’à ce qu’une décision soit prise.

Dans sa décision, la Cour a rappelé que les Etats disposent d’une certaine marge d’appréciation, et qu’ils ont compétence pour développer un cadre légal régissant « aussi bien l’accès aux soins expérimentaux que la cessation des soins de soutien aux fonctions vitales », si ce dernier est compatible avec la Convention. La Cour a également pris en compte les jugements des tribunaux internes, considérant la motivation « claire et détaillée permettant d’étayer de manière pertinente et suffisante leurs conclusions ».

La CEDH a donc suivi l’avis des tribunaux britanniques, et le petit Charlie devra rester au Royaume-Uni, où, pour l’instant, les soins qui lui sont prodigués n’ont pas été modifiés.  L’étape suivante prévue est l’arrêt de la respiration artificielle de l’enfant. Cependant l’hôpital assure qu’il n’agira pas immédiatement, et que toute modification des soins apportés à l’enfant « impliquerait une planification minutieuse et une discussion ».

Cette affaire n’est pas sans rappeler celle de la petite Marwa, de Marseille, pour laquelle la justice française avait tranché en faveur du maintien des soins.

Lire également la note que Gregor Puppinck consacre à cette décision de la CEDH : http://www.genethique.org/fr/charlie-gard-la-limite-du-dr...

Et, de son côté, comment a-t-on réagi à cette affaire du côté de la hiérarchie catholique ? Voici ce qu'en dit Jeanne Smits sur "Réinformation  TV" :

Mgr Vincenzo Paglia est intervenu en faisant publier une déclaration sur le site de l’Académie pontificale pour la vie :

« Nous nous sentons proches de lui, de sa mère, de son père », affirme-t-il, assurant les uns et les autres de la prière de l’APV, dans la certitude que « dans le Seigneur, notre labeur ne sera pas vain ». Affirmant qu’on ne doit jamais « agir avec l’intention délibérée de mettre fin à une vie humaine », il a précisé à la suite des évêques d’Angleterre que « nous devons parfois reconnaître les limites de ce qui peut être fait, tout en agissant de manière humaine au service de la personne malade jusqu’à ce que la mort naturelle survienne ».

Certes.

Il ajoute : « La vraie question à poser dans cette affaire et toute autre malheureuse affaire pouvant lui ressembler est celle-ci : quel est l’intérêt supérieur du patient ? Nous devons faire ce qui fait avancer la santé du patient, mais nous devons aussi reconnaître les limites de la médecine et, comme il est dit dans le paragraphe 65 de l’encyclique Evangelium vitae, éviter des procédures médicales agressives qui sont disproportionnées par rapport aux résultats attendus ou qui constituent une charge trop lourde pour le patient ou sa famille. De même, les souhaits des parents doivent être entendus et respectés, mais eux aussi doivent être aidés à comprendre la difficulté unique de leur situation et ne pas être laissés seuls face à des décisions difficiles. Si la relation entre le médecin et le patient (ou ses parents, comme c’est le cas pour Charlie) est perturbée de l’extérieur, tout devient plus difficile et l’action judiciaire devient un dernier recours, avec le risque supplémentaire d’une manipulation idéologique ou politique, ce qui doit toujours être évité, ou du sensationnalisme médiatique, qui peut être tristement superficiel ».

Le communiqué de Vincenzo Paglia laisse entendre que les parents de Charlie Gard sont victimes de manipulations idéologiques

Décryptons : Mgr Paglia, dont on peut supposer qu’il ne connaît pas le dossier médical du petit Charlie, porte un jugement de valeur qui justifie tout ce qui est fait par les médecins et la justice, sans dire un mot du droit premier des parents qui en aucun cas ne cherchent à faire souffrir leur fils, mais à lui donner une chance. Il parle comme si le traitement nucléoside que ceux-ci veulent faire donner à Charlie le ferait trop souffrir en tant que tel – les parents disent l’inverse. Il prétend qu’ils ne devraient pas être laissés seuls face à leur décision, alors qu’on se substitue à eux pour prendre une décision de mort.

Mgr Paglia va même jusqu’à subodorer des « risques de manipulation idéologique ou politique », là où les parents se contentent de demander qu’on vienne en aide à leur enfant, qu’ils en reprennent la responsabilité – pour la simple raison qu’il n’appartient pas aux médecins ni à l’hôpital où il a été décidé qu’il est désormais inutile de le soigner. Il n’a même pas perçu l’inhumanité de cette équipe qui refuse tout aux parents – comme s’il n’y avait pas là une possibilité de motivation politique ou idéologique, de plus en plus manifeste pourtant dans le contexte de la culture de mort qui voit celle-ci comme une solution et l’impose face aux patients trop faibles ou trop malades, comme le montrent les procédures de fin de vie de plus en plus fréquemment utilisées.

Même pas le droit de mourir chez lui !

Etrangement, Radio Vatican présente le communiqué de Paglia comme un appel à respecter la volonté des parents de Charlie, alors qu’il dit tout le contraire. Il ne suffit pas de dire que les « souhaits des parents doivent être entendus et respectés », et d’assortir aussitôt cette phrase, qui ne constitue pas un appel concret et précis demandant la mise en œuvre de ce souhait, d’un « mais » révélateur. Le ton du communiqué et sa lettre disent tout le contraire.

Dans Aleteia, cela devient carrément, et de manière ahurissante, un « Appel du Saint-Siège pour le petit Charlie, interdit de traitement expérimental ».

Peut-être les bonnes gens qui ont rédigé ces textes n’arrivaient-elles pas à imaginer qu’il en fût autrement.

Si, hélas. Anglophones et italophones pourront vérifier ici, sur le site de l’APV.

 

Ajoutons ce tweet publié par le pape dans la soirée du 30 juin 2017 : « Défendre la vie humaine, surtout quand elle est blessée par la maladie, est un engagement d’amour que Dieu confie à tout homme ».

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