Notre tâche : oeuvrer à la décolonisation idéologique (14/09/2017)

De Jean-Michel Beaussant sur le site de l'Homme Nouveau :

Pour une décolonisation idéologique !

À plusieurs reprises le Pape François a parlé de « colonisation idéologique » soutenue par des pays ou des lobbies très influents à l’encontre de la famille et de la loi naturelle. Le terme s’applique parfaitement au laïcisme et à sa dictature du relativisme. Explication et résolution de rentrée.

Avec la sagesse surnaturelle propre à l’Église, les derniers papes ont induit des concepts particulièrement éloquents, fondés sur la réalité de notre monde contemporain : « culture de mort », « structures de péché », « dictature du relativisme », « totalitarisme sournois » de la démocratie moderne… Retenons ce dernier, en nous souvenant de ce que disait Benoît XVI à son propos : « Le sécularisme qui porte le sceau de l’Occident, différent et sans doute plus sournois que celui du marxisme, présente des signes qui ne peuvent que nous préoccuper. » (24 janvier 2008 aux évêques de Slovénie).

Le nazisme plus sournois que le communisme

Incompris de ses proches (les catholiques autrichiens) en son temps, le bienheureux Franz Jägerstätter avait dit similairement du national-socialisme qu’il était « plutôt plus sournois » voire « franchement plus dangereux » que le communisme en ce qu’il est moins ouvertement athée et matérialiste et peut, avec ses aspects subrepticement spirituels et ésotériques, pénétrer l’âme humaine sans se montrer sous son véritable visage d’ennemi mortel de Dieu et de l’humanité. « Selon moi, écrivait-il, ceux qui ne touchent pas aux églises mais complotent avec malice et astuce, ont plus de succès dans la destruction des âmes que ceux qui démolissent les bâtiments sacrés et emprisonnent les prêtres. »

Laïcisme et islamisme

Avec le recul, le propos n’est pas si osé qu’il n’y paraît et renvoie à celui du pape émérite. En risquant d’être aussi incompris des catholiques contemporains, on pourrait du reste poser également cette question de nos jours, relative­ment au sécularisme et au « communisme du XXIe siècle » (l’islamisme) : si le nazisme et le sécularisme sont plus sournois que le communisme, le laïcisme occidental n’est-il pas aussi plus insidieux que l’islamisme comme totalitarisme ? Sa « dictature du relativisme » n’est-elle pas plus perfide non seulement que les dictatures du XXesiècle (communisme et nazisme) mais également que celle – théocratique – de l’heure (l’islamisme) avec ses violences ostensibles ? Car il nous faut craindre davantage ceux qui tuent les âmes que ceux qui ne peuvent tuer que les corps, avertit l’Écriture. Martyr en grec veut dire témoin. Et il est aujourd’hui une forme de martyre non sanglant qu’il importe de saluer et soutenir en Occident face à un terrorisme intellectuel plus sournois que le terrorisme physique de l’Orient. Selon un courage et une grâce sans doute différents, l’un n’excluant d’ailleurs pas l’autre et pouvant même y conduire, comme en témoignent la vie et la mort de Jägerstätter.

Refus de la compromission

C’est le refus évangélique de la compromission évoqué le 12 août, dans une homélie au Puy du Fou – « Prions pour qu’une puissante et joyeuse Vendée intérieure se lève dans l’Église et le monde » – par le cardinal Sarah comme dans son fameux livre Dieu ou rien, où il appelle finalement à la même attitude morale que Soljénitsyne : « Le mensonge ne passera pas par moi. » Le laïcisme, lui non plus, ne détruit pas forcément les églises. Il ne nous interdit pas de croire au Christ mais il nous y oblige d’y croire comme à une opinion subjective aussi respectable et fantaisiste que toutes les autres croyances dans son temple relativiste : contre le dogme, tous les dogmes ou celui selon lequel il n’y en a pas, d’après la stratégie maçonnique ! Il nous est demandé de rejeter cette dictature du relativisme comme les premiers chrétiens refusaient, au milieu du polythéisme de leur époque, d’aller brûler trois grains d’encens au Panthéon, c’est-à-dire de sacrifier aux idoles en reniant le vrai Dieu. Dieu ou rien ! Comme les dissidents du communisme ou de l’islamisme, les dissidents chrétiens de la religion idolâtrique de l’Empire romain risquaient alors la mort, tandis que nous ne risquons pour l’heure qu’une certaine relégation sociologique.

Avoir le courage de réagir

Mais si nous ne risquons pas plus, n’est-ce pas précisément parce nous avons déjà mis un certain pied dans ce lieu idéologique de la démocratie religieuse et du culte de l’homme ? S’il s’agissait pour les premiers chrétiens de refuser de pénétrer dans le Panthéon clairement contraignant de Rome, il s’agit davantage pour nous aujourd’hui d’avoir le courage de sortir de celui plus subtil et dissolvant de notre temps. Autrement dit : accomplir une « décolonisation idéologique » ! Afin d’être plus fidèle à l’Évangile sans hésiter, pour participer au Royaume de Dieu et passer ainsi par la Croix rédemptrice et son mystère d’iniquité : « Parce que vous n’êtes pas du monde et que moi je vous ai choisi du milieu du monde, voilà pourquoi le monde vous hait » (Jn 15, 19).

Le bienheureux Franz Jägerstätter est né le 20 mai 1907 à St. Radegund, près de Salzbourg, et mort le 9 août 1943 à Berlin. Il était un objecteur de conscience autrichien. Victime du régime nazi, il est vénéré comme bienheureux et martyr par l’Église catholique. Cf. Cesare G. Zucconi, Christ ou Hitler ? Vie du bienheureux Franz Jägers­tätter, DDB, 272 p., 32,50 €.

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