Vatican II en questions; un livre de Mgr Aillet (19/09/2017)

9782360403394FS.gifDe Franck Abed sur Agora Vox :

Vatican II, le Concile en questions par Monseigneur Marc AILLET

Plus de cinquante ans après sa clôture, le deuxième Concile du Vatican continue de faire couler beaucoup d’encre. Ce dernier « a promulgué 16 textes dont l’autorité varie : il y a quatre grandes Constitutions, neufs décrets et trois déclarations  », comme le précise l’auteur. En quatrième de couverture, nous pouvons lire : « Dissiper tous les malentendus qui encombrent souvent la vie ecclésiale et qui empêchent encore aujourd’hui le Concile Vatican II de porter les fruits que l’on peut légitimement en attendre. » Il est intéressant de constater que la présentation du livre expose une idée que tous les esprits lucides et honnêtes expriment depuis des lustres : les bons fruits du Concile tardent vraiment à venir. A qui la faute ? A un texte mal écrit ? Mal compris ? Mal interprété ? Pourtant ce Concile fut : « annoncé comme le printemps de l’Eglise » mais en réalité « il a ouvert une période de crise. » L’Evêque de Bayonne, qui est par ailleurs docteur en théologique, tente de répondre à ces épineuses questions - et à d’autres - avec cet ouvrage se présentant sous la forme d’un entretien avec questions réponses. Il en ressort un texte dialogué et clair qui se veut pédagogique. Contrairement à de nombreux de clercs, il ose aborder ce sujet majeur, à savoir les enjeux du Concile et sa réception, en tentant avec ses idées, son histoire et son parcours d’expliquer cette histoire douloureuse. Y parvient-il ? En partie seulement selon nous…

Monseigneur (Mgr) Aillet rappelle que « Jean XXIII affirme que la doctrine de l’Eglise est certaine et immuable  » à celles et ceux qui déjà dans les années 1960 voulaient en changer la moelle substantifique. Il poursuit sa pensée lors de la question consacrée à l’aggiornamento en précisant ce qui suit : « ce mot italien qui signifie mise à jour, est celui qui définit le mieux dans l’esprit l’objectif du Concile. A condition de ne pas confondre cette mise à jour avec une remise en question comme l’auraient voulu certains, ou une mise au goût du jour qui signifierait une adaptation aux idéologies et aux modes du moment. » Malheureusement certaines idées développées, telles que la collégialité, la liberté religieuse, le dialogue interreligieux, par des acteurs de premier plan du Concile Vatican II laisse apparaître plus qu’une remise en question de la doctrine séculaire… Comme le rappelle très justement l’évêque, beaucoup de catholiques regrettèrent et regrettent encore : « que le Concile ne se soit pas contenté de rappeler les formules dogmatiques déjà définies pour condamner les erreurs d’aujourd’hui et prévenir les fidèles contre l’apostasie. »

 

Mgr Aillet ne semble pas faire sienne l’analyse de certains catholiques dits de tradition qui expliquent que le Concile Vatican II ne fut pas un concile dogmatique mais pastoral, même s’il écrit : « Vatican II n’a pas défini de nouveaux dogmes ». Effectivement, nous lisons dans la préface écrite par Mgr Aillet lui-même, au sujet des textes conciliaires : « (qu’) il y avait des motifs dogmatiques et pastoraux importants ». Il prend même le soin d’apporter des précisions supplémentaires : « l’ecclésiologie du Concile Vatican II est une ecclésiologie fondamentalement théologique. Car en fait, le Concile Vatican II ne fut pas un Concile ecclésiologique mais bien un discours sur Dieu, et cela non seulement à l’intérieur de chrétienté mais face au monde. » Cependant, plus loin, Mgr Aillet prend le contre pied de ce qu’il annonçait plus tôt dans le livre en tentant de décrypter la pensée du Pape d’alors : « sans doute le Pape Jean XXIII avait-il souhaité que l’enseignement du Concile soit présenté de manière pastorale, considérant que Vatican II ne devait pas faire porter son effort sur des discussions d’ordre théologique. » Il poursuit avec cette idée : « il reste qu’en voulant donner à son enseignement un caractère surtout pastoral c’est bien la doctrine immuable qu’il cherche à exposer de manière plus accessible aux hommes et aux femmes de notre temps : en ce sens Vatican II, est aussi un concile doctrinal. » Ces explications contraires, confuses, et les différentes précisions apportées sur la nature du Concile paraissent quand même déconcertantes… Ceci étant dit, Mgr Aillet accepte pleinement et sans réserve ce Concile : « J’adhère à Vatican II car j’y reconnais une expression conforme à la tradition bimillénaire de l’Eglise. » Selon lui : « Vatican II est une expression de la foi de l’Eglise pour notre temps, mais il ne peut être en rupture avec le passé, sans être infidèle à la foi de l’Eglise elle-même. » Ainsi sur la « Messe versus populum  » son propos est on ne peut plus pertinent : « Pour beaucoup c’est l’un des acquis essentiels du Concile. Pourtant, contrairement à des idées reçues, le Concile n’a rien dit sur la question. Si la pratique s’est généralisée après le Concile, ce n’est pas parce que des directives ont été données par le législateur, en l’occurrence le Saint-Siège ». A l’aune de cette pensée non pas lumineuse, mais tout simplement conforme à la doctrine catholique, nous espérons du fond du cœur que tous les prêtres de son diocèse, à commencer par lui, célèbrent la Sainte Messe à l’endroit… Il enfonce le clou, sans mauvais jeu de mots, en rappelant que : « L’esprit est indissociable de la lettre qui l’incarne précisément : de même qu’il n’est pas possible d’atteindre la divinité du Christ qu’en passant par son humanité, de même on ne peut rejoindre l’esprit du Concile qu’en passant par la lettre.  »

A la lecture de cet ouvrage des questions s’imposent : pourquoi donc certains clercs prirent leurs fantasmes et leurs erreurs doctrinales pour la réalité en les imposant au mépris du respect des règles et de la tradition ? Pour quelles mystérieuses raisons ceux qui agirent ainsi ne subirent-ils pas des légitimes réprimandes infligées par l’autorité suprême ? Malheureusement, l’évêque de Bayonne élude ces questions fondamentales, alors qu’à nos yeux elles s’avèrent essentielles pour la compréhension des évènements. L’auteur revient sur la « Semaine Noire » en rappelant les luttes et les combats qui se jouèrent lors des derniers jours de la troisième session, au point que Paul VI dut lui-même intervenir pour jouer la carte de l’apaisement entre les différents protagonistes. D’une manière générale, l’avis plus que favorable de Mgr Aillet à l’endroit de Daniélou et Lubac ne nous inspire pas positivement, pour ne pas dire plus… Il termine son livre entretien par une note d’espoir en forme de prière. Effectivement, il a composé une prière à Marie dans laquelle il L’implore « O Cœur Immaculé de Marie, Mère de l’Eglise, soyez notre refuge.  » afin qu’Elle nous guide : « pour accueillir cette nouvelle Pentecôte tant désirée. » Qu’Elle l’entende et l’exauce.

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