Le témoignage d’un jeune séminariste belge étudiant au séminaire de Wigratzbad en Bavière (14/05/2018)

Témoignage d’un séminariste : « Cela ne venait pas de moi mais de Dieu »

30176238_223152514930379_1179081814_o (1).jpgJeune séminariste à Wigratzbad, en Bavière, Alexis Piraux a accepté de répondre à quelques questions à propos de son parcours. Etant belge, il a d’abord étudié la théologie à l’UCL avant d’entrer au séminaire de la Fraternité Saint-Pierre (FSSP).

Quand avez-vous su que vous vouliez devenir prêtre ? Y a-t-il eu une sorte de déclic ?

Sans doute y a-t-il eu un jour un « déclic », un jour où pour la première fois j’ai pris conscience que je portais en moi le désir de devenir prêtre. Mais je n’ai pas de souvenir de ce jour. Ce qui est sûr, c’est que le temps passant, la conviction que Dieu m’appelait au sacerdoce s’est ancrée de plus en plus profondément dans mon esprit.

Quelles ont été les grandes étapes de votre parcours ?

Je voulais rentrer au séminaire dès la fin de mes études secondaires. Mes parents m’ont alors encouragé à aller d’abord à l’université, pour prendre le temps de discerner davantage. J’ai étudié la théologie pendant cinq ans à Louvain-la-Neuve. Je ne cache pas que pendant ces années, pour diverses raisons, parmi lesquelles la vie étudiante et un manque de formation spirituelle, le désir de devenir prêtre a été plus ou moins fort. Je dois cependant reconnaître que, même au creux d’une terrible crise spirituelle et d’un certain relâchement moral, triomphait toujours cette conviction d’être appelé au sacerdoce. C’est alors que j’ai vraiment compris que cela ne venait pas de moi mais de Dieu. Après mes études, j’ai pris la décision d’entrer au séminaire interdiocésain de Namur.

C’est au cours de mon passage à Namur que, suite à des lectures, je me suis intéressé à la liturgie traditionnelle, ou forme extraordinaire du rite romain. J’ai assisté de temps en temps à la messe traditionnelle en semaine et certains dimanches. Rapidement j’ai senti ma vocation sacerdotale s’enraciner et se développer dans le cadre de la liturgie traditionnelle.

Mon essai au séminaire ayant pris fin après quelques mois, j’ai travaillé un an comme professeur de religion dans l’enseignement spécialisé ; et en même temps, je suivais l’année d’agrégation à l’UCL. Cette année « de transition » a été l’occasion d’approfondir non seulement ma connaissance et mon attachement à la liturgie traditionnelle, mais également ma foi et ma vie de prière. Je découvrais davantage la richesse de la foi et de la spiritualité catholiques. Je me suis également reposé la question de la vocation. J’avais été quelque peu déstabilisé par la fin de mon essai au séminaire. Dieu voulait-il vraiment que je sois prêtre ? En plus, je faisais à l’époque la connaissance de jeunes femmes catholiques pieuses et sérieuses … J’ai sérieusement envisagé le mariage ! J’ai pu faire un bon discernement, avec l’aide de mon directeur spirituel, et d’une retraite d’une semaine à l’abbaye du Barroux en France. Je suis ensuite allé visiter le séminaire de la Fraternité Saint-Pierre à Wigratzbad (Bavière), où j’ai pu rencontrer les prêtres formateurs et des séminaristes. J’ai rempli le dossier de candidature … Et maintenant je suis en troisième année. Et tout va bien, grâce à Dieu.

Comment votre famille a-t-elle réagi à cette décision de devenir prêtre ?

Positivement. Je peux dire que j’ai toujours été soutenu par ma famille et que c’est encore le cas maintenant. Bien sûr, quand je suis parti pour commencer le séminaire en Bavière, la distance et le fait que ma famille ne connaissait alors pas encore la Fraternité Saint-Pierre, ont suscité quelques appréhensions ; mais elles se sont dissipées une fois qu’ils ont visité les lieux, et rencontré les formateurs et les séminaristes. Sans doute y a-t-il parfois encore quelques incompréhensions … La vocation sacerdotale reste un mystère !

Qu’est-ce qui explique, selon vous, que tant de jeunes se tiennent à distance de l’Église ?

Pour moi, l’explication se tient du côté de l’Église, et du côté des jeunes eux-mêmes. Concernant l’Église, loin de moi l’idée de lui « faire la leçon » ; elle est le Corps mystique du Christ, la société qu’il a fondée et qui perdure depuis 2000 ans … L’humilité est de reconnaître que ce n’est pas au premier venu de prétendre lui donner des leçons ! Néanmoins, je pense pouvoir dire que si des jeunes se tiennent à distance d’elle, c’est parce qu’elle ne leur est pas présentée dans toute sa réalité et sa force spirituelles. On trouve chez les jeunes un désir qui les rend ouverts à une vraie école de vie spirituelle. C’est pourquoi il faut leur faire une annonce directe de la foi, proposer des horaires larges pour les sacrements, soigner la célébration de ceux-ci ; avec cela, proposer une initiation liturgique et catéchétique. Egalement, à mon humble avis, offrir une grande disponibilité, à l’instar d’une famille spirituelle : une autorité paternelle, un amour maternel et une disponibilité fraternelle.

Concernant les jeunes, ils se tiennent éloignés de l’Église parce qu’ils sont souvent aveuglés par les sollicitations de ce monde. Les mass-media et internet occupent leur esprit avec du bruit et des distractions, souvent des futilités, qui les gênent pour bien répondre aux questions fondamentales sur leur existence, qui se posent en eux parfois confusément. Freinés par un certain matérialisme, ils tendent à faire consister le bonheur dans le fait d’avoir une bonne situation, des richesses ; dans les plaisirs sensuels, de la pornographie aux relations sans lendemain. Un autre obstacle : l’individualisme, qui nous fait centrer notre vie et notre bonheur sur nous-mêmes. La plupart des jeunes ont été blessés profondément par ces différents obstacles, qui freinent le développement d’une vie chrétienne profonde. Heureusement, ce n’est pas vrai de tous les jeunes ; une famille profondément chrétienne, une vie paroissiale fraternelle sont des soutiens irremplaçables pour une persévérance joyeuse et ambitieuse dans la fidélité au baptême.

Finalement, l’Église, qui a pour mission de porter l’enseignement du Christ Ressuscité et d’appeler les âmes à la conversion, se retrouve face à des jeunes réticents à accueillir la Bonne Nouvelle, par faiblesse ou par lâcheté face aux renoncements nécessaires. S’ils expérimentaient que la vérité du Christ seule les rend libres, et que de lui seul ils peuvent recevoir la joie, et la joie en abondance, sans doute trouveraient-ils le courage de suivre le Christ. Pour ce faire, ils ont besoin de modèles et de guides, instruments dociles du Seigneur et de son Eglise, qui aient une solide vie spirituelle, et soient  capables de témoigner de la vérité dans la charité.

Comment se passe une journée type dans la vie d’un jeune séminariste?

Au séminaire, le lever est à 6h. Nous avons l’office du matin (les laudes) à 6h25. Suivi d’une demi-heure d’oraison silencieuse, puis de la messe de communauté. Celle-ci est parfois chantée ou solennelle, selon les fêtes. Après l’action de grâces, déjeuner en silence entre 8h et 8h30. Ensuite, selon les semaines, nous pouvons avoir entre une et quatre heures de cours entre 8h40 et 12h.

A 12h15, la communauté se rassemble à la chapelle du séminaire pour l’office de sexte. Nous avons le dîner à 12h30 ; il se prend ordinairement en silence jusqu’au dessert, tandis qu’un séminariste fait la lecture d’un livre. Ensuite nous avons une heure de récréation entre 13h et 14h : nous pouvons aller marcher avec un confrère, jouer aux cartes ou au billard à la salle de récréation, etc. Après une courte sieste, l’après-midi est consacré soit à l’étude, soit à d’autres cours. Le goûter (16h-16h15) nous donne l’occasion d’une brève pause. Puis il y a les Vêpres (17h30) ; avant celles-ci, nous pouvons également consacrer une demi-heure à l’oraison. Le mercredi les vêpres sont remplacées par le chapelet récité en communauté, le jeudi par un salut du Saint-Sacrement.

Après l’office, il reste un peu de temps libre. Ensuite il y a le souper à 19h, également en silence. Vient alors la récréation du soir jusque 20h10, après laquelle la communauté se rassemble une dernière fois pour chanter l’office des complies. Le lundi et le jeudi, il y une conférence spirituelle avant les complies, donnée par l’un des prêtres du séminaire ou par un prêtre de passage. Après les complies, c’est le grand silence jusqu’au lendemain.

Voilà le plan d’une journée-type. Le mercredi nous avons après-midi libre jusqu’au chapelet à 18h30 ; certains en profitent pour aller faire du jogging ou du football, d’autres pour aller faire quelques courses. Le dimanche, nous avons temps libre depuis la fin de la messe de communauté (vers 9h15) jusqu’aux Vêpres ; nous pouvons rester au séminaire, partir en excursion en montagne … En résumé, la journée-type d’un séminariste est un effort d’équilibre entre la prière, l’étude, la vie fraternelle … et une saine détente ! Notons qu’en plus des cours, nous avons diverses charges et responsabilités (entretien, préparation des camps d’été, etc.) qui nous exercent au dévouement et au service de la communauté.

Propos recueillis par Alice Schneider

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