Des menaces contre la liberté de l'Eglise (20/08/2018)

De Sandro Magister en traduction sur le site diakonos.be :

L’Église sous le feu des critiques. Le sacrement de confession déclaré hors-la-loi

Le Pape François continue à jouir d’une grande popularité auprès de l’opinion publique mondiale. Mais envers l’Église catholique, le climat devient nettement plus hostile.  Les attaques menées par des gouvernements et des institutions publiques s’intensifient contre ce qui la distingue et la caractérise sur son propre terrain, notamment le sacrement de la confession.

En Australie, dans le territoire de la capitale Canberra, le secret de la confession est considéré comme un délit depuis juin dans le cas où le prêtre viendrait à connaissance d’un abus sexuel sur mineur pendant qu’il administre le sacrement sans le dénoncer aux autorités publiques.

La loi a été approuvée par tous les partis en application de l’une des 85 recommandations de la Royal Commission chargée par le gouvernement australien d’enquêter sur les abus sexuels sur mineurs.

Les évêques d’Australie ont réagi en prenant la défense de l’intangibilité du sceau de la confession, dont la transformation en un délit mettrait à mal la liberté religieuse elle-même.

Mais le premier ministre de Nouvelle-Galles du Sud, l’un des États membres de la fédération australienne, a déjà demandé que la loi soit débattue et approuvée au niveau fédéral pour qu’elle s’applique au pays tout entier.

En Inde, fin juillet, la Commission nationale pour les femmes a recommandé au gouvernement de New Delhi de déclarer le sacrement de la confession hors la loi dans tout le pays afin d’éviter les « chantages » que les prêtres pourraient exercer à l’encontre des femmes.

Cette commission est une agence du gouvernement central chargée de formuler des propositions et des plans d’action en faveur des femmes en Inde. Sa présidente, Rekha Sharma, a motivé sa demande en se référant à deux cas récents d’abus survenus au Pendjab et au Kerala.

Le premier cas implique l’évêque de Jalandhar, Franco Mulakkai, accusé d’avoir violenté une sœur entre 2014 et 2016. Tandis que le second concerne cinq prêtres de l’Église syro-malankare orthodoxe suspendus pour avoir contraint une femme à entretenir des rapports sexuels avec eux en la menaçant de révéler à son mari une relation extra-conjugale qu’elle avait mentionné en confession.

Le conseil des évêques catholiques du Kerala a qualifié d’ « inconstitutionnelle » la requête de la commission. Et le cardinal de Mumbai, Oswald Gracias, président de la Conférence épiscopale indienne et membre du « C9 », le conseil des neuf cardinaux qui assistent le Pape François dans le gouvernement de l’Église universelle, a accusé la commission d’ « ignorer totalement la nature, le sens, la sainteté et l’importance du sacrement de la confession pour notre peuple » et de n’avoir aucun respect pour la liberté religieuse « garantie par la constitution indienne ».

En 2011 déjà, dans une Irlande secouée par l’explosion des abus sexuels perpétrés par des prêtres catholiques, le premier ministre de l’époque Enda Kenny soutenait que « les prêtres devraient avoir l’obligation légale de dénoncer les cas d’abus appris en confession ».

Et en 2014, le Comité de l’ONU pour la Convention sur les droits de l’enfant – qui évalue comment les conventions ratifiées sont appliquées par les États membres, dont la Cité du Vatican – a publiquement critiqué la « loi du silence » qui empêche « sous peine d’excommunication » les membres du clergé catholique de dénoncer aux autorités les abus qu’ils viendraient à connaître au cours d’une confession.

Le Comité a été jusqu’à intimer que l’Église mette en conformité son code de droit canonique, sans le distinguer des lois de l’État de la Cité du Vatican.

À cette occasion, le Saint-Siège avait présent au Comité de l’ONU un rapport concernant la manière dont elle appliquait les normes pour la protection de l’enfance. La présentation d’un tel rapport n’est pas obligatoire et le Saint-Siège s’était jusqu’alors gardé de le faire, notamment pour ne pas fournir une occasion au Comité – dans son examen et commentaire du rapport – de réitérer ses pressions pour l’abolition du secret sacramentel.

Et ce n’est pas tout. Au Chili, les magistrats qui enquêtent sur les abus sexuels perpétrés par des évêques et des prêtres et qui ont déjà appelé à témoigner, entre autres, l’archevêque de Santiago, le cardinal Ricardo Ezzati Andrello, sont en train de se demander s’il ne faudrait pas interroger également le Pape François en personne, sur base des délits – tels que la destruction d’archives compromettantes – qu’il dénonce dans la lettre aux évêques chiliens du mois de mai dernier.

L’idée d’appeler le Pape à la barre n’est pas neuve. En 2010 déjà, deux organisations américaines s’occupant de victimes d’abus sexuels de la part des prêtres avaient introduit une instance auprès de la Cour pénale internationale de La Haie pour appeler le Pape, à l’époque Benoît XVI, à témoigner.

Cette demande n’a pas été suivie, notamment à cause simple fait que le Pape est un chef d’État. Mais elle avait eu à l’époque un impact public important, comme cela pourrait à nouveau être le cas aujourd’hui au Chili.

C’est l’une des nombreuses manières dont l’Église se trouve aujourd’hui attaquée par les pouvoirs du monde, sur base de critères qui lui sont étrangers ou hostiles.

Un antre angle d’attaque est la revendication de « l’égalité des droits » des femmes et donc que ces dernières soient elles aussi « ordonnées » et fassent partie de la hiérarchie de l’Église.

Ou encore la revendication des autorités politiques de nommer les évêques. Une revendication contre laquelle l’Église a lutté pendant des siècles avant de s’en libérer.  Sauf qu’elle se trouve à nouveau sur le point de céder, précisément sur ce point crucial, face à cette nouvelle superpuissance mondiale qu’est la Chine.

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