La tombe de Franco ou l'histoire gommée (26/07/2019)

De Paul Vaute, historien et journaliste honoraire :

LA TOMBE DE FRANCO OU L'HISTOIRE GOMMÉE

   Après de multiples rebondissements, la quatrième chambre du contentieux administratif de la Cour suprême d'Espagne a ordonné le mois dernier de suspendre, à titre conservatoire, le transfert vers un autre lieu de la dépouille de Francisco Franco. Celui-ci repose donc toujours – au moins jusqu’à nouvel ordre – en la basilique sise au cœur du monument du Valle de los Caídos, élevé au nord de Madrid à la mémoire des morts de la guerre civile. A l'unanimité, les cinq juges ont ainsi accédé à la requête de la famille du Caudillo, de la communauté bénédictine en charge de la nécropole, de la Fondation Franco et de l'Association pour la défense du Valle, opposées à la volonté du gouvernement de Pedro Sánchez de mettre en œuvre la résolution votée au Congrès des députés le 11 mai 2017 [1].

   Celle-ci, présentée par les socialistes (PSOE), approuvée par 198 voix face à 140 abstentions (majoritairement du Parti populaire) et une seule voix contre (celle d'une élue du PP qui a expliqué par la suite s'être trompée…), s'inscrit dans la foulée de la "loi sur la mémoire historique" initiée en 2006 par l'ex-Premier ministre Zapatero, avec en ligne de mire, à l'instar du médiatique juge Garzón, les seuls crimes attribués au franquisme. Parmi les demandes adressées au pouvoir exécutif figure symptomatiquement celle de déplacer aussi, vers "un endroit non prééminent" de la basilique, les restes de José Antonio Primo de Rivera, fondateur de la Phalange espagnole, fusillé par les républicains en 1936. 

LE PRIX DE LA RÉCONCILIATION

   Depuis que le débat est ouvert, on voit se multiplier dans les médias mainstream, en deçà comme au-delà des Pyrénées, bien des affirmations qui ont de quoi surprendre ceux qui sont tant soit peu au fait du sujet. Elles se ressemblent sans surprise, leurs auteurs puisant aux mêmes agences, quand ils ne se copient pas les uns les autres. Ainsi peut-on lire, sur le site d'une radio-télévision de service public comme un peu partout, que le complexe érigé entre 1941 et 1959 à "ceux qui sont tombés" (los Caídos) "fut en partie construit par des prisonniers républicains, contraints au travail forcé et parfois morts sur le chantier" [2]. Ou, dans un journal dit de référence, que "pour nombre d'Espagnols, les lieux rappellent le camp de concentration qu'il fut" [3]. Ou encore, à propos de la décision prise par le général Franco, "pour la réconciliation", de réunir dans l'ossuaire quelque 35.000 combattants des deux camps, que "des centaines de républicains, qui s'opposaient aux franquistes, ont ainsi été exhumés de charniers sur tout le territoire pour y être enterrés sans le consentement de leurs proches" [4]. Avec cette circonstance aggravante, avons-nous entendu à l'occasion, que des incroyants auraient été ainsi condamnés à reposer dans un édifice religieux, sous une croix de 150 mètres de haut…

   Qu'en fut-il ? Selon l'historien Bartolomé Bennassar [5], 14.876 condamnés aux travaux forcés ont purgé leur peine en partie ou totalement dans les bataillons du mémorial. Il s'agissait de volontaires et ils étaient payés par une réduction de peine. Le fait a été reconnu par le Conseil de l'Europe dans le cadre de l'élaboration d'une recommandation, datée du 17 mars 2006, pourtant consacrée à la "nécessité de condamner le franquisme au niveau international" [6]. Selon les chiffres officiels, entre quatorze et dix-huit personnes au total ont perdu la vie au cours de cette construction située en pleine montagne et qui a duré plus de dix-sept ans.

   Quant aux morts ici rassemblés, ils proviennent de toutes les régions d'Espagne, qui ont été conviées à envoyer les dépouilles de combattants ayant atteint la durée, fixée par la loi à dix ans, d'occupation de leur sépulture d'origine. Un ordre ministériel du 11 juillet 1946 précisa que la basilique accueillerait des hommes ayant été baptisés et dont l'entourage, de préférence, en avait fait la demande. La mesure ne fut pas du goût du père Guerrero, jésuite, qui dans la livraison de juillet 1958 de la revue Razón y Fe, réclama que le Valle soit réservé à ceux qui étaient tombés pour la cause catholique et nationale. Il y eut aussi des protestations de proches de défunts, des deux camps d'ailleurs, s'étant manifestés trop tard et regrettant que leur parent ne soit plus dans un cimetière situé près de chez eux. Des décisions trop hâtives ont été à déplorer, certainement, mais les archives révèlent un travail minutieux, des démarches pour les transferts, des informations aux familles, sous la houlette du ministère de l'Intérieur [7].

   Au-delà du contexte qui a vu naître le lieu du souvenir, demeure ce qui se trouve au cœur de son message: à savoir qu'il reconnaît aux vaincus de toutes conditions leur qualité d'Espagnols. Tout autre apparaît le propos de ceux qui réclament "l'expulsion" de Franco et, parmi eux ou parmi d'autres, de ceux qui veulent que les combattants républicains soient inhumés ailleurs, optant par là pour un rejet des vainqueurs hors de l'hispanité correcte. Réclamer le recours aux analyses d'ADN pour séparer "le bon grain de l'ivraie", n'est-ce pas démontrer que le changement de régime opéré à partir de 1975, quoi qu'on en ait dit, n'a pas réconcilié la communauté nationale ?

LES RÉPUBLICAINS, CAMP DES SAINTS ?

   Dans ses justificatifs, la résolution parlementaire de 2017 fait valoir que "la mémoire des victimes de la guerre civile et du franquisme, la reconnaissance, la réparation et la dignité qui leur sont dues représentent un devoir moral indispensable dans la vie politique et sont des signes de la qualité de la démocratie" [8]. Le caractère unilatéral de l'intention s'affiche clairement. Il n'y a pas de victimes du socialisme, du communisme ou de l'anarchisme à prendre en compte spécifiquement. Cette vision manichéenne a beau être en contradiction avec ce qu'attestent tous les travaux d'historiens de niveau scientifique, quelle que soit l'orientation idéologique de leurs auteurs: c'est elle qui prévaut, à de rares exceptions près, dans les évocations actuelles de ce passé par la presse écrite, les chaînes audiovisuelles et les sites Internet à grande diffusion; c'est elle aussi qui constitue, dans la majorité du monde politique, une vulgate dont il serait imprudent de s'écarter. Dans sa frange la plus radicale, ce courant dominant n'hésite pas à appeler à la censure de ceux qui lui résistent. Ainsi une pétition réclamant l'interdiction de la Fondation nationale Francisco Franco [9], qui avait recueilli près de 220.000 signatures en novembre 2017, a-t-elle avancé pour argument qu'"en Allemagne ou en Italie, il serait impensable d'avoir une Fondation Hitler ou une Fondation Mussolini" [10]!

   Pour prendre la mesure du décalage entre ces écumes de polémiques et les faits avérés de longue date, il ne serait que de relire, parmi bien d'autres sources crédibles, la lettre que Simone Weil adressa en 1938 à Georges Bernanos. L'écrivain venait de publier Les grands cimetières sous la lune où il dénonçait, en témoin ayant vécu à Palma de Majorque, la violence des moyens mis en œuvre par les nationalistes et les catholiques espagnols au service d'une cause qu'il avait pourtant approuvée au début. L'ayant lu, la philosophe, qui s'était  engagée un temps, sur le front de l'Ebre, auprès des anarchistes de la Confederación Nacional del Trabajo (CNT) et de la Federación Anarquista Ibérica (FAI), éprouva le besoin d'informer son correspondant des atrocités commises dans ce qui avait été son camp. "Combien d'histoires se pressent sous ma plume", écrivit-elle. Et d'évoquer son horreur quand elle se trouva à deux doigts d'assister à l'exécution d'un prêtre. Et de raconter qu'en représailles pour la mort de neuf miliciens au cours d'une expédition à Majorque, "on tua neuf fascistes ou soi-disant tels" dans la petite ville de Stigès "où il ne s'était rien passé". C'était encore bien peu par rapport à Barcelone où "on tuait en moyenne, sous forme d'expéditions punitives, une cinquantaine d'hommes par nuit". En Aragon, un jeune garçon de quinze ans, combattant du côté nationaliste, fut fait prisonnier. On trouva sur lui une médaille de la Vierge et une carte de phalangiste. Le chef de la colonne Durruti, en qui Simone Weil avait vu "à certains égards un homme admirable", lui donna 24 heures pour s'engager aux côtés des anarchistes. "Au bout de 24 heures, l'enfant dit non et fut fusillé". Autre épisode, à l'arrière: "Deux anarchistes me racontèrent une fois comment, avec des camarades, ils avaient pris deux prêtres; on tua l'un sur place, en présence de l'autre, d'un coup de revolver, puis on dit à l'autre qu'il pouvait s'en aller. Quand il fut à vingt pas, on l'abattit. Celui qui me racontait l'histoire était très étonné de ne pas me voir rire" [11].

   S'il s'agit d'identifier les responsabilités dans le déclenchement des hostilités, on ne peut ignorer qu'aux élections de novembre 1933, la droite et le centre avaient remporté 79,2 % des sièges aux Cortes mais s'étaient vu refuser l'accès au gouvernement par leurs adversaires décidés à faire prévaloir la logique révolutionnaire. En a résulté une vague d'émeutes, de répressions, d'affrontements entre milices, d'assassinats... et le refus de part et d'autre d'encore s'en remettre au verdict des urnes. A propos de la rébellion anarcho-socialiste et de l'instauration d'un pouvoir sécessionniste aux Asturies en octobre 1934, Salvador de Madariaga – opposant au régime franquiste – affirmera que "la gauche espagnole perdit jusqu'à l'ombre d'une autorité morale quelconque pour condamner la rébellion de 1936" [12]. L'habituelle dichotomie "peuple contre possédants", ces derniers soutenus par les officiers et le clergé, ne tient pas davantage la route. Ainsi que l'a souligné Pierre Chaunu, dans une situation initiale où les républicains contrôlaient plus de la moitié du territoire et la quasi-totalité de l'industrie, avec 45 % de l'armée, presque toute la flotte et 350 avions sur 450, "si le peuple avait été d'un seul côté, avec de tels rapports de force, le camp républicain aurait triomphé sans peine" [13].

   Quant à l'internationalisation du conflit, les interventions allemande et surtout italienne ont été contrebalancées, voire précédées, par les interventions française et surtout soviétique. Sans doute le recours aux puissances de l'Axe, futures vaincues de la Seconde Guerre mondiale, restera-t-il comme le péché originel du franquisme. Il fera oublier l'emprise croissante, finalement déterminante, de l'Internationale dirigée depuis le Kremlin. 75 % des réserves d'or espagnol furent transférées en URSS, alors que Giulio Ceretti et son réseau du Komintern assuraient à Staline le monopole du ravitaillement en armes de la République. Les Brigades internationales furent également l'œuvre des Soviétiques, même si tous leurs membres n'étaient pas des communistes.

   Entre 1940 et 1945, les Alliés ont eu de bonnes raisons d'oublier le péché originel, tant l'inespérée neutralité espagnole leur fut précieuse. Franco, en dépit de sa dette envers Hitler, lui refusa le passage à travers la péninsule, qui aurait assuré à l'Allemagne une prise rapide de Gibraltar, le contrôle de l'entrée en Méditerranée et une position de force face aux opérations britanniques en Afrique du Nord. Mais le Caudillo, vis-à-vis du Troisième Reich, poussa son "devoir d'ingratitude" plus loin encore en sauvant la vie de milliers de Juifs sépharades. Leur nationalité, perdue à la suite d'un édit de la reine Isabelle, leur fut restituée, ce qui leur permit de trouver promptement refuge dans la péninsule ibérique. De la part d'un homme qui, comme beaucoup en son temps, croyait dur comme fer à l'authenticité des Protocoles des sages de Sion [14], ce vol au secours concrétisait la notion de l'aide due au prochain menacé comme nécessité impérieuse, supérieure à toute autre considération.

   Dans la conduite même de la guerre civile, la plus cruelle des guerres parce que sans lois ou si peu, la question des exactions commises de part et d'autre est évidemment la plus controversée. Dans le bilan, qui se chiffre à plus de 350.000 morts, les pertes militaires sont sensiblement égales des deux côtés. La surmortalité due à la désorganisation, à la misère et aux maladies vient en sus. Les crimes perpétrés hors du champ de bataille et de toute normalité judiciaire sont, quant à eux, massivement imputables aux forces les plus extrémistes présentes dans les deux coalitions: communistes et anarchistes d'un côté, phalangistes de l'autre. Mais le mal n'a pas eu le même poids sur les deux plateaux de la balance. La zone républicaine s'est révélée la plus mortifère [15] pour des raisons idéologiques parfaitement identifiables. Aux yeux du plus fanatique des fascistes, un ouvrier n'est à abattre que s'il est communiste ou anarchiste, alors que pour le communiste ou l'anarchiste, un propriétaire terrien ou un prêtre sont à abattre pour ce qu'ils sont, sans plus. A cette extension de la licence to kill se sont ajoutées les rivalités et les purges internes donnant lieu, entre staliniens, trotskistes et libertaires, à des vagues d'affrontements et d'exécutions sommaires sans équivalent chez les nationaux.

   L'ouverture des archives de Moscou a permis de mieux mesurer l'ampleur des opérations d'épuration menées par le NKVD, futur KGB, et son chef en Espagne Aleksandr Orlov, exécuteur notamment du dirigeant du Parti ouvrier d'unification marxiste (Poum) Andreu Nin i Pérez. C'est le spectacle de cette terreur, dans le chef d'un Etat révolutionnaire encore embryonnaire, qui fit basculer un Arthur Koestler et un  George Orwell dans l'anticommunisme le plus absolu. Selon Carlos Semprún Maura, écrivain et journaliste espagnol d'extrême gauche, nulle part, hors des pays socialistes, l'appareil stalinien et sa répression policière ne se sont déployés comme ils le firent dans l'Espagne républicaine. Les crimes du stalinisme y "rempliraient plusieurs volumes" [16].

   De la haine "clergicide" qui s'est déployée parallèlement, les 1875 martyrs reconnus jusqu'à ce jour par l'Eglise au cours de dix-neuf célébrations (béatifications et canonisations) sous Jean-Paul II, Benoît XVI et François [17], ne donnent qu'un aperçu très partiel. La plupart des victimes, où figurent aussi de nombreux laïcs catholiques, demeurent et demeureront anonymes. Ont-elles, comme on le suggère parfois à gauche, subi la vindicte pour avoir été des chevaux de Troie de la "rébellion militaire fasciste" ? Ce serait oublier que les massacres de prêtres, de religieux et de religieuses ont commencé bien avant l'appel à l'insurrection des officiers au Maroc espagnol, le 17 juillet 1936. Des méfaits antérieurs "ont créé une situation où chacun sait que le vainqueur ne fera pas de cadeau au vaincu. Il n'y a pas de légitimité républicaine", nous expliquait l'historienne Andrée Bachoud, spécialiste de l'Espagne contemporaine, professeur à l'Université de Paris-VII-Jussieu, rencontrée peu après la publication de sa biographie – nullement laudative – de Franco [18]. La presse étrangère donna rapidement connaissance, photos à l'appui, des massacres face auxquels le pouvoir politique apparaissait complice ou impuissant. C'est dès 1931 que Louis Aragon, Paul Eluard, Georges Sadoul et d'autres brillants intellectuels français, dans un manifeste, célébrèrent les incendies d'églises, de couvents et d'universités catholiques, les destructions de statues et de tableaux, les dévastations de bureaux des journaux catholiques... "Une église debout, un prêtre qui peut officier, sont autant de dangers pour l'avenir de la révolution", ajoutaient les signataires [19].

   Si ces pages sombres semblent aujourd'hui effacées des mémoires – sauf au Vatican – et si celui qui les évoque s'expose à bien des suspicions, c'est parce que le camp qui a perdu la guerre civile a, par contre, gagné celle de la propagande. Il s'y est révélé assez fort pour que, quatre-vingts ans après, se perpétue inlassablement, dans nos médias, nos productions culturelles, nos livres scolaires... la mythologie qui pare de toutes les vertus les émules de Robespierre, de Bakounine et de Lénine en terres ibériques. Tout le monde connaît Guernica: qui sait que les premiers bombardements, républicains ceux-là, de Tétouan, Ceuta, Melilla, Algésiras, Cadix, Séville, Valladolid…, firent beaucoup plus de morts [20] ?

Les esprits sont à ce point aiguillés que l'écrivain Michel del Castillo, qui avait été emprisonné sous Franco, fut vilipendé pour avoir soutenu dans un livre l'équivalence des violences républicaines et nationalistes, ce qui est encore en dessous de la vérité comme on l'a vu [21]. Non moins remarquable est l'absence d'intérêt des "grands" médias pour ces chrétiens aux vies brisées dont la papauté, régulièrement, nous rappelle l'existence en les élevant sur les autels. Et quand le silence est rompu, c'est bien souvent pour y aller d'un dénigrement lourd de toute l'ignorance de son auteur. Ainsi quand un journal présente en quelques lignes, sous le titre "Franquisme béatifié" (!), la proclamation au rang de bienheureux d'une centaine de religieux exterminés par les républicains espagnols [22].

UN POUVOIR NULLEMENT ABSOLU

   La guerre avait été cruelle, l'après-guerre le fut aussi. Les mises à mort, dans les années qui ont suivi la victoire des nationaux, se sont comptées par dizaines de milliers [23]. Il est vrai que les épurations légales ou non d'après la Libération, dans les pays qui avaient été occupés par l'Allemagne, n'ont pas non plus laissé un  grand espace au pardon. La volonté de réconciliation manifestée par la construction du mémorial du Valle peut apparaître bien tardive, mais le mot "amnistie", sous nos cieux, est resté une pomme de discorde jusqu'à la disparition naturelle de ceux qui auraient pu en bénéficier.

   S'est imposée, dans ces cas, la soif de justice de ceux qui avaient perdu un proche ailleurs que sur le champ de bataille, simplement pour avoir été un partisan de l'adversaire ou supposé tel. Nombre des républicains exécutés avaient été des bourreaux, auteurs des exactions décrites précédemment. Et la peine capitale, à l'époque, était encore appliquée dans maints pays européens (France, Royaume-Uni, Suisse, Autriche…), comme elle l'est toujours dans certains Etats nord-américains. José María Doussinague, qui fut directeur général du ministère espagnol des Affaires étrangères, a rapporté que l'ambassadeur des Etats-Unis Carlton Hayes, en poste à Madrid pendant la Seconde Guerre mondiale, attira un jour discrètement l'attention de Franco sur l'intérêt "de mettre fin aux séquelles de la guerre civile, c'est-à-dire aux condamnations à mort". Sur ce, le Caudillo invita son visiteur à s'asseoir "et lui montra une liasse de recours en grâce qui se trouvait sur son bureau. Puis, il entreprit patiemment de lire les détails de chacun de ces cas. Hayes l'interrompit en disant: "Aux Etats-Unis, tous ces gens auraient été envoyés à la chaise électrique". – "Ce sont ceux auxquels j'ai accordé leur grâce", répondit calmement Franco" [24].

   Contrastant avec cet échange, la froide réalité des chiffres donne certes à penser que le vae victis! de Brennus l'a emporté sur la clémence de Titus. Mais il faut garder le sens des proportions et il n'est pas banal qu'un Jorge Semprun, qui milita au Parti communiste et passa sa vie à lutter contre le régime, soit de ceux qui y ont invité avec le plus de vigueur. "La répression franquiste, qui a été très brutale, n'est pas comparable aux répressions staliniennes, déclara-t-il dans une interview donnée au début des années '80. Elle n'est pas comparable parce qu'elle n'a pas eu les mêmes moyens, parce qu'elle compte ses victimes par centaines ou par milliers mais pas par millions" [25].

   Différence de nature et non de simple degré: aucun des autres paramètres propres aux systèmes totalitaires n'est ici attestable. Dans les premières années – les plus répressives –, malgré la présence de la Gestapo en 1940-1941 et les excès de la police politique, "on reste loin des méthodes nazies ou staliniennes", constate Andrée Bachoud. "Au lendemain de la guerre civile, la peur régnait, mais les critiques contre les orientations du régime et de son gouvernement s'exprimaient à haute voix et s'écrivaient même dans certains journaux autorisés" [26]. Sur le monde carcéral, citons encore le témoignage de Semprun: "Une prison franquiste, comme celle de Burgos, comparée à un camp soviétique, c'est de la rigolade. Les détenus recevaient des paquets, ils avaient une vie politique. Pendant des heures entières ils se dispensaient des cours. Ils arrivaient à avoir des contacts avec l'extérieur et dans leur trou avaient des postes de radio. Les bonnes sœurs étaient aimables et faisaient passer des lettres. Ils avaient des visites non pas tous les six mois, mais deux fois par semaine[27].

   Outre que l'Etat franquiste ne fut jamais "big brotherien" et qu'après quelques années, sa composante fasciste fut marginalisée, il faut oser constater, quitte à provoquer des cris d'orfraie, qu'il a cessé en peu de temps d'être une dictature. La marge d'arbitraire dans l'exercice du pouvoir que celle-ci suppose a, en effet, rapidement disparu. Au tournant des années '50-'60, on ne compte déjà plus les arrêts rendus par le Tribunal suprême contre des dispositions ministérielles jugées discrétionnaires, avec obligation pour le gouvernement de s'y conformer. Le monolithisme politique, quant à lui, n'a tout simplement jamais existé, même derrière la façade d'un parti unique: dès le départ au sein du Movimiento Nacional, puis dans les gouvernements et aux différents niveaux de pouvoir, on a trouvé des monarchistes partisans des Bourbons, des démocrates-chrétiens, des phalangistes de gauche et de droite, des catholiques conservateurs, des légitimistes carlistes, des libéraux, des technocrates, des fidèles et des adversaires de l'Opus Dei... à charge pour le généralissime de doser l'influence des uns et des autres selon les circonstances. Une fois mis à l'écart, les phalangistes passeront ouvertement dans l'opposition.

   Et moins encore que tout le reste, la culture n'est mise au pas. A l'époque où Boris Pasternak se trouve dans le collimateur des autorités soviétiques et où la création artistique est totalement cadenassée à l'est du rideau de fer, deux expositions des œuvres de  Pablo Picasso sont organisées à Barcelone. Et le plus antifranquiste des peintres donne son accord pour la création d'un musée qui lui sera consacré [28]. En littérature, maints auteurs appartenant à ce qu'on a appelé la "génération de 50" ne se privent pas, au nom du réalisme, de critiquer sans ménagements la vie politique et sociale de l'après-guerre civile [29]. Et personne n'empêche la publication et la diffusion du Tiempo de silencio de Luis Martín Santos (1962), "bilan sarcastique et tonitruant de vingt années de franquisme" [30].

   Il convient cependant de se défier parfois des affirmations d'une historiographie trop soucieuse d'harmoniser le récit national. Quoi que celle-ci ait pu suggérer, Franco n'a certainement pas voulu le régime actuel de l'Espagne et encore moins son alignement sur les transformations sociétales de l'Europe occidentale. Mais il a bien piloté l'évolution vers une représentativité renforcée, une limitation des pouvoirs du chef de l'Etat, une formalisation de la liberté religieuse, l'autorisation du retour au pays de nombreux exilés républicains et socialistes, le recul de la censure [31], les coudées plus franches données aux syndicats et à l'opposition non communiste...

   Dans cette conception, il y a bien place pour la diversité des opinions et même, à partir de 1967, pour leur expression associative, celles-ci n'impliquant toutefois pas le retour au système des partis politiques. La représentativité passe par les structures professionnelles, locales, culturelles et familiales de la société avec, également à partir de 1967, une dose de suffrage universel (pour 108 représentants sur 595). Le Caudillo s'en est expliqué dans son discours aux Cortes du 22 novembre 1966, à l'occasion de l'adoption du projet de loi organique qui allait être soumis à référendum: "La démocratie bien comprise, qui constitue l'héritage civilisateur le plus précieux de la culture occidentale, apparaît à chaque époque liée à des circonstances spécifiques, qui se traduisent par des formules politiques diverses tout au long de l'histoire", déclara-t-il. Et d'ajouter un peu plus loin: "Les partis ne sont pas un élément essentiel et permanent sans lequel la démocratie ne peut être réalisée. Au cours de l'histoire, de nombreuses expériences démocratiques ont été vécues sans connaître le phénomène des partis politiques. Ceux-ci sont cependant une expérience relativement récente, née de la crise et de la décomposition des liens organiques de la société traditionnelle. A partir du moment où les partis deviennent des plates-formes pour la lutte des classes et des désintégrateurs de l'unité nationale, ils ne constituent pas une solution constructive, ni tolérante, permettant d'ouvrir la voie espagnole à une démocratie authentique, ordonnée et efficace" [32].

   Un bilan de 36 années, même s'il n'est ici qu'esquissé, ne saurait certes être exempt d'un passif. L'accord s'opère généralement entre témoins et spécialistes pour y inscrire le poids resté lourd du pouvoir central, un grand retard dans le développement du monde rural, le peu de prise en compte des revendications d'autonomie raisonnables – catalanes et basques notamment – ainsi que la démission des élites politiques, intellectuelles et ecclésiales face à la contestation grandissante. Les regards politiques les plus opposés sont unanimes en revanche quand ils se portent sur la manière dont le pays a littéralement pulvérisé les records de croissance, grâce à sa stabilité politique. Avec un revenu moyen par habitant multiplié par 2,6 entre 1960 et 1971, l'Espagne, que beaucoup croyaient vouée à jamais à une économie vivrière, s'est hissée au rang de dixième nation industrielle du monde.

   L'élévation générale du niveau de vie, il est vrai, ne s'est pas opérée sans inégalités considérables entre régions. Le 4 mai 1961, en voyage en Andalousie, Franco, indigné notamment devant les conditions de travail imposées aux saisonniers, fit le constat "de la persistance de nombreuses injustices sociales, de grandes différences irritantes" [33]. Ce n'étaient pas des paroles en l'air: dès cette date fut mis à l'étude un plan pour le développement économique et social de la province de Cordoue.

   Relevons encore cette prise de position étonnante des socialistes du PSOE, en 1978, considérant l'Ini, le holding public créé peu après la guerre civile, comme un bon instrument pour la planification économique [34]. A travers cet Instituto Nacional de Industria, l'Etat se chargeait des entreprises que l'initiative privée ne pouvait ou ne voulait pas assurer. Son existence eut un effet de dynamisation sur le secteur privé, beaucoup d'entreprises révisant et modernisant leurs méthodes de craindre d'être dépassées par l'activité économique publique.

"CONTRE TOUTES LES LOIS DE LA DÉBÂCLE HISTORIQUE"

   Claudio Sánchez-Albornoz, historien, ancien président du conseil des ministres de la République en exil, de retour en Espagne, déclara que son antifranquisme foncier ne l'empêchait pas de convenir que Franco a "sauvé l'Espagne du communisme" [35]. C'est pour cette raison, sans doute, qu'après la défaite des puissances de l'Axe, rapidement suivie des prémices de la guerre froide, le chef de l'Etat et président du gouvernement a gagné l'estime des figures emblématiques des pays alliés.

   Ainsi Churchill, peu après le défilé de la victoire, à Madrid en avril 1946, où une foule immense avait ovationné Franco, dénonça-t-il comme autant de sottises les projets d'intervention militaire dans la péninsule: "Actuellement, fit-il valoir, il y a autant de liberté dans le régime réactionnaire du général Franco qu'en Pologne et infiniment plus de sécurité et de bonheur pour l'ensemble des habitants" [36]. En décembre 1959, le président Eisenhower brava l'ostracisme encore pratiqué par la plupart des pays européens en accomplissant une visite officielle en Espagne, au cours de laquelle il se fit acclamer dans les rues de la capitale, en voiture décapotable et en compagnie de Franco, qu'il embrassa chaleureusement et publiquement [37]. Dix ans plus tard, de Gaulle se montra le plus élogieux de tous, à l'issue d'une visite privée, effectuée peu après sa démission: "J'ai été heureux de faire personnellement votre connaissance, c'est-à-dire celle de l'homme qui assure, au plan le plus illustre, l'avenir, le progrès et la grandeur de l'Espagne", écrivit le général au généralissime, le 20 juin 1969, dans une lettre où il disait aussi avoir recueilli partout l'impression que le peuple espagnol "se trouve en plein essor" [38]. Des propos qui dépassaient amplement les amabilités diplomatiques auxquelles, du reste, l'ex-locataire de l'Elysée n'était plus tenu. Sans doute, après Mai 68 et l'échec du référendum d'avril 1969, avait-il matière à s'interroger sur le fonctionnement de la démocratie dans son pays et sur les ruptures récurrentes qui, là où s'exerce l'emprise exclusive des foules et des factions, vouent à l'éphémère toutes les constructions politiques…

   L'appréciation de l'ancien chef de la France libre ne fut pas rendue publique à l'époque. Il en est allé tout autrement pour celle, très médiatisée, d'Alexandre Soljenitsyne lors de sa visite, en 1976, dans une Espagne alors en transition. Non sans susciter la colère dans les cercles "démocratiques et progressistes" occidentaux, le plus grand témoin du Goulag, exilé d'URSS deux ans auparavant, fit l'éloge de la liberté qu'il avait pu constater pendant ses dix jours de voyage à travers le pays. Interrogé au cours de l'émission de télévision du samedi soir Directisimo, le 20 mars, il ajouta: "Si nous jouissions de la liberté dont vous bénéficiez ici, nous resterions bouche bée tant cette liberté nous est inconnue. Ces libertés, cela fait soixante ans que nous les ignorons" [39].

   Dans ses mémoires, Soljenitsyne est revenu sur cet épisode en persistant en signant. Il y souligne notamment que la victoire du communisme en Espagne aurait coûté vingt fois plus de vies humaines que la guerre civile [40]. Il loue l'égalité des deux camps devant Dieu réalisée au mémorial de los Caídos: "Voilà ce que c'est que, dans la guerre, le camp de la chrétienté ait vaincu! Tandis que, chez nous, c'est le camp de Satan: aussi son adversaire, depuis soixante ans, est-il foulé aux pieds et couvert de crachats; qui chez nous irait piper mot d'égalité, fût-elle celle des morts ?!" [41]. Il exprime aussi son indignation devant "les désinvoltes bordées de sifflets des socialistes, radicaux et libéraux européens" qui ont accompagné la mort du Caudillo: "Alors que la décomposition allait bon train tout autour de lui, Franco avait su, avec une tactique très sûre, conduire son pays à l'écart de la guerre mondiale, sans s'y mêler, et cela faisait déjà vingt, trente, trente-cinq ans qu'il le maintenait du côté chrétien envers et contre toutes les lois de la débâcle historique!" [42]

   Il n'est pas sans intérêt de relever, dans la conclusion de sa biographie non complaisante de Franco, cette phrase d'Andrée Bachoud qui, en de tout autres termes, ne dit pas autre chose: "Contre le temps qui passe, face aux crises qui secouent le monde, il s'inscrit dans une vision anhistorique de l'histoire, dans un combat éternel, au service de Dieu et de la patrie" [43].

ET LÉNINE ?

   Bien sûr, c'est aux autorités nationales et à elles seules qu'appartient la décision de délocaliser ou non la sépulture de celui qui présida, pendant plus d'une génération, aux destinées du pays des Rois catholiques, tout en le préparant à renouer avec sa continuité monarchique. L'observateur ne peut, pour sa part, que manifester son étonnement quand, parmi 350 députés, il ne s'en trouve aucun pour s'opposer véritablement à une mesure qui, loin d'ouvrir un débat à charge et à décharge sur une grande figure de l'histoire, revient à la reléguer purement et simplement aux oubliettes.

   Si un tel scénario devait se réaliser, la comparaison avec la pérennité, sur la place Rouge à Moscou, du mausolée de Lénine, véritable initiateur de la terreur et du Goulag, confirmera une fois de plus que parmi les victimes du tragique XXè siècle, les plus nombreuses, infiniment, peuvent être aussi celles qui pèsent le moins. Vladimir Poutine avait lancé naguère un ballon d'essai en faveur du transfert du corps embaumé vers un simple cimetière. Il n'y est plus favorable actuellement, "pour éviter de semer la division dans la société". Cet argument résiduel pourrait tout aussi bien être invoqué en faveur du maintien de Franco dans le complexe monumental qui reçoit près de 450.000 visiteurs par an. Le président russe l'a lui-même suggéré à demi-mot, non sans créer la surprise, lors de sa visite officielle en Espagne en février 2006 [44].  

   En tout état de cause, le paradoxe que les historiens du futur auraient les plus grandes difficultés à expliquer, serait que celui qui partage avec Hitler, Staline, Mao, Pol Pot... la responsabilité des plus absolues dominations et des plus grands crimes de masse qu'ait connus l'humanité, ait droit à une prescription refusée à celui qui, avec la main lourde certes, permit au moins à son pays d'y échapper et aux pays voisins de ne pas s'y trouver, par contrecoup, dangereusement exposés.

PAUL VAUTE

historien, journaliste honoraire

------------------------------------------------------------

[1] Texte complet de la "Proposición no de Ley sobre la efectiva aplicación y desarrollo de la Ley de Memoria Histórica" (162/000327) dans Boletín Oficial de las Cortes Generales, Congreso de los Diputados, núm. D-105 de 17/02/2017, pp. 27-29 (adoptée sans modification),  http://www.congreso.es/portal/page/portal/Congreso/Congre....

[2] https://www.rtbf.be/info/monde/detail_espagne-pedro-sanch...

[3] La Libre Belgique, 4 juillet 2019.

[4] https://www.rtbf.be/info/monde/detail_la-justice-espagnol...

[5] Franco, Paris, Perrin (coll. "Histoire"), 1995, pp. 215-216.

[6] "Valle de los Caídos" (2004, éd. rev. 2019), dans Wikipédia. L'encyclopédie libre, https://fr.wikipedia.org/wiki/Valle_de_los_Ca%C3%ADdos, juillet 2019.

[7] Ibid.

 [8] Cfr n. 1.

 [9] Fundación Nacional Francisco Franco (FNFF), https://fnff.es/.

[10] https://www.theguardian.com/world/2017/nov/23/spaniards-c....

[11] Simone WEIL, Œuvres, Paris, Gallimard (coll. "Quarto"), 1999, pp. 405-409.

[12] Cité in Pierre CHAUNU, Apologie par l"histoire, Paris, Oeil-Téqui, 1988, pp. 444-445.

[13] Ibid., pp. 443-444.

[14] Andrée BACHOUD, "Franco y los judíos: filosefardismo y antisemitismo", dans El olivo y la espada. Estudios sobre el antisemitismo en España (siglos XVI-XX), dir. Pere Joan i Tous & Heike Nottebaum, Tübingen, Max Niemeyer Verlag ("Romania Judaica", 6), 2003, pp. 379-390 (389).

[15] Hugh THOMAS l'avait reconnu dans son ouvrage qui constitue le grand classique sur le sujet (La guerre d'Espagne. Juillet 1936 – mars 1939, 1961, trad. de l'anglais, éd. rev. définitive Paris, Robert Laffont (coll. "Bouquins"), 1986). Arnaud IMATZ, dans La guerre d'Espagne revisitée, collectif, Paris, Economica, 1989, donne les chiffres de 35.021 exécutions du fait des nationalistes et 73.344 (dont 6845 membres du clergé) du fait des républicains (cfr Pierre CHAUNU, op. cit., pp. 445-446).

[16] Révolution et contre-révolution en Catalogne (1936-1937), Tours, Mame (coll. "L'histoire à l'épreuve"), 1974, pp. 71-72.

[17] "Martyrs de la guerre d'Espagne" (2014, éd. rev. 2019), dans Wikipédia..., https://fr.wikipedia.org/wiki/Martyrs_de_la_guerre_d%27Es..., juillet 2019.

[18] Franco ou la réussite d'un homme ordinaire, (Paris), Fayard, 1997.

[19] Cité in Ricardo PASEYRO, L'Espagne sur le fil, Paris, Robert Laffont (coll. "Libertés 2000"), 1976, pp. 119-121.

[20] Pierre CHAUNU, op. cit., p. 445.

[21] Le temps de Franco, (Paris), Fayard, 2008.

[22] La Libre Belgique – eh oui! –, 27-28 oct. 2007.

[23] Les statistiques officielles font état de 164.642 "morts violentes" dans la période 1939-1945, chiffre incluant les victimes de règlements de compte personnels et autres vendettas (Andrée BACHOUD, op. cit., p. 187). Sur une plus longue durée, de 1939 à 1959, mais en ne retenant que les résultats de l'action judiciaire légale, Arnaud Imatz réduit ce chiffre à 22.716 exécutions (Pierre CHAUNU, op. cit., p. 446).

[24] España tenía razón 1939-1945, Madrid, Espasa-Calpe, 1949, pp. 277-278, cité par Brian CROZIER, Franco. Biographie, trad. de l'anglais, (Paris), Mercure de France, 1969, p. 302.

[25] Entretien avec Karl Kohut (Escribir en París…, Fráncfort-Barcelona, Klaus Dieter Vervuert – Hogar del libro, 1983, pp. 187-188), cité in Andrée BACHOUD, op. cit., pp. 190-191.

[26] Op. cit., p. 190.

[27] Entretien, cité in ibid.

[28] Max GALLO, Histoire de l'Espagne franquiste, 2: De 1951 à aujourd'hui, Verviers, Gérard & Cie (coll. "Marabout université", 192), 1969, p. 323.

[29] Shirley MANGINI GONZÁLEZ, Rojos y rebeldes. La cultura de la disidencia durante el franquismo, Barcelona, Anthropos (coll. "Ambitos literarios. Ensayo", 17), 1987, pp. 97-101 e.a.

[30] Jean-Pierre RESSOT, "Espagne (arts et culture) – La littérature. V. Tendances contemporaines", dans Encyclopædia Universalis (1968) (USB), rééd, Paris, 2018.

[31] A laquelle la presse religieuse a toujours échappé au nom de la non-immixtion de l'Etat dans les affaires de l'Eglise, avec pour conséquence que les articles inspirés par l'opposition y ont proliféré. Le gouvernement s'est interdit de même d'intervenir dans les universités. De tels espaces d'autonomie intellectuelle étaient évidemment impensables sous le communisme avant sa phase de déclin.

[32] "Mensaje de S.E. el Jefe de Cortes Españolas, con motivo de la presentación de la Ley Orgánica del Estado", 22 de noviembre de 1966,

 http://www.generalisimofranco.com/Discursos/discursos/196.... – C'est bien le mot "tolerante" (tolérante) qui figure dans le texte, là où nous aurions été tentés d'écrire "tolerable" (tolérable). Peut-être une erreur d'impression ?

[33] Cité in Jacques GEORGEL, Le franquisme. Histoire et bilan 1939-1969, Paris, Seuil (coll. "Esprit. Frontière ouverte"), 1970, pp. 267-268.

[34] Le Soir, 28 oct. 1978.

[35] Cité in Ricardo PASEYRO, op. cit., p. 88.

[36] Cité in Andrée BACHOUD, op. cit., p. 284.

[37] Ibid., pp. 353-354.

[38] Cité in ibid., p. 419.

[39] D'après la traduction diffusée par les éditions du Seuil et publiée dans Le Monde, Paris, 16 avril 1976.  – On nous permettra d'apporter ici un éclairage personnel, certes modeste. En 1974, l'occasion fut donnée à l'étudiant que nous étions alors d'effectuer, à quelques mois de distance, un voyage en Tchécoslovaquie et un autre en Espagne. A Prague, alors en pleine "normalisation", le guide qui nous faisait visiter la cathédrale des Saints-Guy-Venceslas-et-Adalbert demanda qu'on sorte de l'édifice pour répondre à nos questions sur la situation des chrétiens. Peur des micros… Après avoir vérifié soigneusement qu'aucune "oreille" ne traînait autour de nous, il nous confirma ce qu'on savait des difficultés auxquelles s'exposaient les pratiquants. "Inutile de demander une Bible dans une librairie, ajouta-t-il. Non seulement il n'y en a pas, mais vous aurez beaucoup de chance si le libraire ne va pas vous dénoncer à la Sécurité d'Etat". A Madrid, dans une grande librairie du centre-ville, nous avons pu constater qu'on trouvait, sans peine et sans crainte, tous les grands classiques du marxisme-léninisme. Nous avons aussi mis la main sur un ouvrage consacré à la guerre civile, dont il s'est avéré, en le parcourant, qu'il était écrit du point de vue exclusivement républicain…

[40] Le grain tombé entre les meules. Esquisses d'exil,  1ère part.: 1974-1978, trad. du russe, (Paris), Fayard, 1998, p. 317.

[41] Ibid., p. 319.

[42] Ibid., pp. 301-302.

[43] Andrée BACHOUD, op. cit., p. 451.

[44] "Valle de los Caídos", op. cit. – Vladimir Poutine a visité le site à titre privé dans les années  '90.

07:33 | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook | |  Imprimer |