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France : quand un évêque soutient les bonnets rouges

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Lu sur le site de l'Homme Nouveau : Crise sociale : Mgr Centène s'explique

(Rédigé par Philippe Maxence le 14 novembre 2013 dans Société)

Docteur en droit, Mgr Raymond Centène, évêque de Vannes, a soutenu la rébellion des Bretons. Quel message peut transmettre l’Église dans cette crise sociale que traverse la France ? La doctrine sociale de l’Église peut-elle apporter une réponse à une situation de plus en plus alarmante ? Dans cet entretien, à paraître dans le prochain numéro de L'Homme Nouveau, l'évêque de Vannes a bien voulu répondre à nos questions. 

Vous avez soutenu publiquement la manifestation des « bonnets rouges ». Pour quelle raison ?

Mgr Raymond Centène : Que les choses soient claires : je n’ai pas appelé directement à aller manifester. Dans un billet d’humeur, j’ai signalé les manifestations qui devaient avoir lieu en Bretagne mais j’ai surtout encouragé « tous les Morbihannais, soucieux du bien des autres, au-delà de leurs diverses sensibilités, à manifester leur solidarité et leur engagement altruiste de la manière qu’ils jugeront la plus utile ».

En effet, les manifestations sont souvent, en aval, le signe d’un échec qui ne dit pas son nom en amont : échec du dialogue et des négociations, aveuglement sur les causes d’un problème et donc sur les solutions à apporter. Les manifestations signent l’échec du politique au sens noble. C’est pour cela aussi qu’elles sont un droit, véritables soupapes de sécurité du contrat tacite qui unit les citoyens entre eux. C’est pour cela surtout qu’elles ne doivent pas être réprimées et étouffées, karchérisées ou gazées, tant qu’elles ne s’en prennent pas, sauf raison légitime, aux biens publics et privés.

Ces manifestations sont en tout cas un bon thermomètre de l’état de cohésion ou de délitement du corps social, surtout lorsque les slogans s’opposent aux politiques menées par tel ou tel gouvernement. Ces derniers n’ont donc jamais intérêt à bâillonner le peuple qui descend dans la rue, sauf à courir le risque de la conflagration, de l’explosion ou de la révolution, appelez ça comme vous voudrez.

Dans la crise mondiale multipolaire que nous vivons, environnementale, alimentaire, économique, sociale, morale et religieuse, il ne s’agit pas tant de se déclarer pour ou contre telle ou telle manifestation mais de faire l’effort de diagnostiquer les causes du mal, d’avoir le courage de les nommer à haute voix afin que de véritables solutions soient proposées en amont. Soigner les plaies en aval après le passage de la tempête est une nécessité, certes, mais cela devient un crime doublé d’hypocrisie lorsqu’on en fait la seule et unique solution. Bossuet n’a pas pris une ride :

« Dieu se rit des hommes qui se plaignent des conséquences alors qu’ils en chérissent les causes. »

Donc, oui, je suis de tout cœur solidaire de ces hommes et de ces femmes qui sont, en aval, les victimes directes des erreurs commises en amont. Et ces victimes sont nombreuses. D’ailleurs, ces bonnets rouges, retour ironique de l’Histoire, me rappellent cette saillie de Nietzsche, qui doit nous faire réfléchir:

« L’homme de l’avenir est celui qui aura la mémoire la plus longue ».

Samedi 2 novembre, il s’est passé quelque chose d’absolument unique à Quimper. Tout le monde était dans la rue, sans distinction. Toutes les catégories sociales et économiques étaient présentes : l’agriculteur et le châtelain, le pêcheur et l’étudiant, l’employé et son patron, les chômeurs et les élus. Toutes les sensibilités politiques se sont réunies ensemble, sans exception, de « l’extrême gauche » à « l’extrême droite » en passant par les partis dits « de gouvernement ».

L’Église ne peut rester insensible aux difficultés concrètes de ces hommes, quels qu’ils soient. De même que l’Église commence d’abord par nourrir l’affamé avant de songer à lui parler du Christ, de même la République devrait craindre que le triptyque gravé sur ses frontons ne devienne aux yeux des laissés-pour-compte un vaste mirage voire une réelle insulte à ce qu’ils sont devenus. L’homme est un, esprit et chair. Deux réalités qui en nous n’en font qu’une. Ignorer l’une, c’est injurier l’autre, c’est renier l’homme.

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