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  • Altérité et identité: apprendre à se recevoir

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    Th-Collin-1_medium.jpgComment accepter de recevoir d’un autre son identité ? Comment penser l’identité et l’altérité comme des limites créatrices ? De Thibaud Collinphilosophe, membre du conseil éditorial de Liberté politique (Dernier ouvrage paru : Sur la morale de M. Peillon, Salvator, 2013) s'adressant aux "Veilleurs" de Versailles.  Extrait :

     « ( …) 1/ L'altérité à l'origine de l'identité

    Notre époque est traversée par cette inquiétude identitaire : « Qui suis-je ? », « Que suis-je ? » Ces questions résonnent aussi bien dans notre vie personnelle que dans notre vie collective. Il y a deux manières d’y répondre, soit en s’orientant « vers l’aval », soit « vers l’amont ».

    La première consiste à dire : je suis ce que je décide d'être et je construis mon identité en m’agrégeant à tel ou tel élément de la vie sociale. C’est l’identité élective des minorités postmodernes. Je peux ainsi répondre que je suis catholique ou breton ou gay, etc. C’est le principe du communautarisme qui n’est qu’une manifestation de l’individualisme. Mon identité est relative à moi-même et, du coup, je peux avoir des identités multiples selon les heures de ma journée, mes fréquentations, etc.

    La deuxième réponse est de considérer l’identité comme d'abord réceptive. Je me reçois d'une source qui est autre que moi (orientation vers « l'amont ») : de mes parents, de ma nation, de Dieu. Voilà ce qui me constitue fondamentalement. Je suis né comme être humain. Comme vous le savez, il y a un lien intime entre les mots naissance et nature. Dans la naissance, je suis donné à moi-même comme ayant telle nature (humaine), comme étant fils ou fille de mes parents, appartenant à telle nation (là encore on retrouve la même étymologie renvoyant à la naissance, c’est-à-dire à la réceptivité et à la croissance).

    Peu à peu, je découvre ce que je suis et qui je suis en étant capable de m'approprier cette origine, en y consentant : tel est le grand mouvement de la culture dont le cœur est le culte comme le rappelle le philosophe allemand, ami de Benoît XVI, Joseph Pieper dans un beau livre Le Loisir comme fondement de la culture (Ad Solem). Pieper a écrit ce livre au lendemain de la guerre dans une Allemagne ravagée par la catastrophe et il part à la recherche du fondement sur lequel reconstruire un monde authentiquement humain.

    Seul notre accueil du don premier, celui que Dieu nous fait, nous permet de nous identifier, de découvrir notre identité. Or comment se nomme cet accueil si ce n’est le culte par lequel non seulement nous rendons à Dieu ce qui lui est dû mais aussi par lequel nous nous rendons disponibles à ce qu’Il veut nous donner. L’ouverture à ce qui est le plus Autre nous met donc en contact avec notre identité. Cette réponse au don reçu est la grande source de l'inédit dans nos vies. Lorsque la liberté répond au don, elle est pleinement responsable et de là jaillit sa réelle fécondité. Les saints restent le modèle de cette liberté pleinement responsable des dons de Dieu, de la nature et de la culture.

    En effet, plus je me reçois d'une source autre, plus je peux moi-même devenir source pour autrui : c’est la joie de la transmission que nous pouvons expérimenter dans l’éducation de nos enfants, dans nos liens d’amitié, etc. Cette fécondité présuppose ce temps d’appropriation libre de ce que nous avons reçu, une véritable maturation personnelle. Ce moment d’appropriation est essentiel. Le négliger engendre une forme d’instrumentalisation des personnes qui sont réduites à n’être que des canaux de transmission. Cela engendre dès lors un durcissement. C’est ainsi que des cultures deviennent des folklores sans vie, des objets de musée. 

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