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Mgr Oscar Romero, une cause de béatification mouvementée

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Romero.jpgLe 18 août, le pape François a affirmé qu’il n’y avait plus d’obstacle « idéologique » au processus de cause de béatification de Mgr Oscar Romero. L’archevêque de San Salvador (Salvador) a été assassiné en pleine messe en 1980. Pour mieux comprendre où en est le dossier, l’hebdomadaire « Famille Chrétienne » a interrogé le Père Alberto Royo Mejía, canoniste et spécialiste de la cause des saints, implanté dans le diocèse de Getafe (Espagne) :

"Le pape François a rappelé le 18 août que la cause de béatification de Mgr Oscar Romero avait été jusqu’à présent « bloquée par prudence à la Congrégation pour la doctrine de la foi ». Quelles étaient les difficultés de ce dossier ?

La première était de déterminer qui avait assassiné Mgr Romero. En effet, depuis 1980 jusqu’à très récemment, aucune enquête sérieuse n’avait été faite sur le sujet. On n’a appris le nom de l’assassin que trente et un ans après les faits !

Ainsi, quand a été présentée la cause de béatification de Mgr Romero au Saint-Siège en 1994, il n’y avait toujours pas eu d’enquête sérieuse sur le sujet. C’était pourtant un point fondamental. Parce qu’il ne suffit pas à un martyr d’avoir été assassiné. Il faut aussi savoir pourquoi. On pouvait dire plus ou moins qui l’avait assassiné, mais sans certitude.

Aujourd’hui on le sait : l’assassin était un militaire, membre de l’équipe de sécurité du président de la République de l’époque. On sait aussi qu’il a agi pour le compte d’un militaire plus gradé que lui, et combien il a été payé.

En d’autres termes, il fallait déterminer  si Mgr Romero était réellement mort martyr ?

En effet. Car pour une béatification par la voie du martyre, il faut trois éléments.

Premièrement, la certitude historique des circonstances de la mort du candidat au martyre.

Deuxièmement, savoir pourquoi il a été tué : est-ce au motif de sa foi, ou au motif de vertus qui découlent de la foi (comme par exemple, ici, la défense de la vérité et de la justice) ? Dans ce cas concret, on pourrait très bien supposer que Rome finisse par considérer les prises de position de Mgr Romero en faveur de la vérité et de la justice comme n’ayant rien à voir avec la foi. Ce n’est pas à exclure, et nous ne pouvons pas anticiper les décisions du Saint-Siège.

Troisièmement, dans quelle attitude est mort le candidat au martyre : la violence ou l’offrande de soi ?

Quels étaient les obstacles « idéologiques » dont parlait le pape François ?

Il s’agit de la deuxième difficulté, qui relevait du contenu de ses sermons. En effet, comme pour chaque cause de béatification, les sermons ont été passés au crible de la Congrégation pour la doctrine de la foi durant de nombreuses années, et c’est là que la cause s’est un peu enlisée.

La Congrégation devait en effet juger ces sermons en répondant à une question précise : contiennent-ils un élément contraire à la foi ? Ce point a obtenu une réponse depuis que la Congrégation pour la doctrine de la foi s’est prononcée : « Non, il n’y a rien de contraire à la foi ».

Un jugement qui n’est toutefois pas suffisant pour établir si oui ou non ces sermons ont été prononcés par un martyr. En effet, s’ils ne contiennent rien de contraire à la foi, ils pourraient toutefois contenir des éléments à même de ternir cette qualité de martyr. Par exemple s’ils sont considérés comme trop politisés. Sur ce point, c’est désormais à la Congrégation pour la cause des saints de trancher.

Le blocage de la cause vous semblait donc justifié ?

L’Église a raison de prendre son temps. Mgr Romero défendait la justice, une vertu cardinale, cela ne fait pas de doute. Et il le faisait en tant que ministre de Dieu.

Mais il faut voir si les sermons peuvent laisser penser qu’il est mort uniquement pour des raisons politiques. Car de la politique il y en avait, vu le contexte de la dictature militaire. Mais il faut déterminer si lui, a pu tomber dans une sorte de meeting politique.

Ce point est fondamental pour déterminer si c’est un martyr ou non. Et c’est le travail de la Congrégation pour la cause des saints.

Qu’est-ce qui a accéléré le processus ?

Quand le pape François a été élu, Mgr Vincenzo Paglia, postulateur de la cause de Mgr Romero (et actuel président du Conseil pontifical pour la famille), lui a demandé de la débloquer. Alors le pape, qui connaissait personnellement Mgr Romero et qui a, semble-t-il, une dévotion pour lui, a fait le nécessaire pour que celle-ci soit à nouveau sur les rails.

Sur le fond, rien n’a changé. La cause était simplement restée trop longtemps dans les cartons de la Congrégation pour la doctrine de la foi. C’est pourquoi le pape a voulu la débloquer. Mais la Congrégation, qui a son expertise propre, pouvait bien sûr se prononcer dans un sens comme dans l’autre, et le processus n’est pas encore en bout de course !"

Réf. Mgr Oscar Romero, une cause de béatification mouvementée

Pour Monseigneur Romero, la foi chrétienne comporte une dimension politique. Mais pas n’importe laquelle. Le 2 février 1980, dans un discours à l'Université catholique de Louvain, il lance : « le monde des pauvres nous apprend que la libération arrivera non seulement quand les pauvres seront les destinataires privilégiés des attentions des gouvernements et de l'Église, mais bien quand ils seront les acteurs et les protagonistes de leur propre lutte et de leur libération en démasquant ainsi la dernière racine des faux paternalismes, même ceux de l'Église » (cfr. R.L Dumont: "Les Prêtres subversifs" , aux Éditions Labor - 2002, p.164)

JPSC

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