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France : Le philosophe Henri Hude analyse la manifestation des familles

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Sur son blog (extraits) :

La manifestation des familles du 5 octobre 2014 a été, une fois de plus, un énorme succès. Au soir de cette journée, chacun se demande une fois de plus où va aller ce mouvement et à quoi il peut aboutir ? Sur la base des bonnes études d’opinion à notre disposition, et à la lumière d’une sagesse politique classique, nous sommes en mesure de répondre à ces questions.

Nous ne sommes pas en face d’un mouvement groupusculaire, ou catégoriel, mais d’un mouvement de masse. Le concept de base, pour l’analyse, est la tripartition en trois segments d’opinion : les « proches », les « indifférents » et les « éloignés ». En chiffres ronds, 30% de proches, 30% d’indifférents, 40% d’éloignés, dont 30 de très éloignés. 15% de très proches, qui font un bloc d’environ dix millions de personnes, tous âges confondus. C'est le chiffre et c'est l'ordre de grandeur qu'il faut garder en tête.

Nous ne sommes pas en face d’une jacquerie passagère, mais d’un mouvement de résistance massif, luttant pour un intérêt profond et non négociable, déterminé, ancré dans la durée. En effet, rapportée aux 15% de très motivés, une première manifestation d’un demi-million de personnes représente déjà une mobilisation de base de 5% de la masse, tous individus compris. Cela ferait, sur un sujet national quasi unanime, 3 millions de Français manifestants à Paris. Cela donne la mesure de la motivation. Il n’y a aucune vraisemblance qu’un tel mouvement aussi profond s’amortisse dans les années à venir. Au contraire, le rouleau compresseur libertaire continuant à tout écraser, la colère s’empare des citoyens. Les chiffres donnés par la police ne font qu’enrager les participants. 

Nous ne sommes pas en face d’un mouvement de protestation catégoriel, mais d’un mouvement national. Celui-ci divise la totalité des partis, des classes sociales et des cultures.

Les hommes et les femmes se répartissent de la même façon entre proches, indifférents et éloignés.

Socio-culturellement, les plus éloignés sont les plus athées, les plus riches (cadres supérieurs) et les plus protégés (fonctionnaires). Est-ce cela, la Gauche ? Toutefois, il reste 40% des catholiques non pratiquants qui se sentent éloignés, et plus de 20% des sans-religion qui se sentent proches. Quant aux « autres religions », c’est-à-dire à plus de 80% l’islam, elles sympathisent à 40% (avec 34% d’indifférents et 26% d’éloignés). 
Les plus de 65 ans sont plus « proches », mais, en dessous, c’est la même division tripartite avec trois tiers (plus ou moins gros ou petits) de proches, éloignés ou indifférents. Et les plus jeunes, relativement plus proches.
Plus on vote à gauche, plus on est éloigné (FG 82, PS 65, EELV 58. UDI 37, UMP 29, FN 26). C’est là que s’applique le moins la loi d’égale tripartition. Mais la moitié des gens ne votant pas, ces chiffres sont moins significatifs. Surtout que les ouvriers, qui ne votent plus à gauche, sont le groupe le plus proche (41% + 30% d’indifférents). En outre, il y a aussi des proches à gauche (20%), des éloignés à droite (30%), et des indifférents partout.
En un mot, toutes les divisions habituelles sont recoupées par une nouvelle division longitudinale qui les traverse toutes. 

Nous sommes en face d’un mouvement massif, mais pas majoritaire. Dans ces conditions, faute d’une stratégie d’alliances, toute politique isolationniste le condamne à l’échec. Mais, pour pouvoir négocier des alliances, ce mouvement devra savoir ce qu’il est et où il va. Sans doute va-t-il « objectivement » dans une certaine direction, que nous allons développer un peu plus loin (voir 5°). Mais son leadership, pour le moment, ne donne pas l’impression de reconnaître cette direction, ou de vouloir la déclarer. Il ne définit pas ce que serait pour lui la victoire, au-delà du retrait de quelques textes législatifs ou réglementaires. Ce sont des objectifs trop réduits pour une telle énergie. Par suite, le mouvement, bien qu'il développe de nombreux liens internationaux, n’a encore guère de stratégie au-delà de la protestation.
Dans de telles conditions, un mouvement ordinaire, privé de perspective et confronté à l’échec, se serait amorti. C’est d’ailleurs ce à quoi s’attendaient les observateurs. Le démenti de l’expérience prouve que nous sommes en présence d’une évolution très profonde et durable des esprits, qui a tous les caractères d’une mutation de première grandeur. Quelle est donc cette direction « objective » du mouvement ? 

Nous sommes en face d’un mouvement historique, qui n’est pas une arrière-garde passéiste, mais un dynamisme nouveau, voué à structurer la vie publique dans les décennies à venir. Nous sommes en effet face à un mouvement qui s’inspire objectivement d’un puissant concept de nature. Philosophiquement, ce mouvement se définit comme une redécouverte par un peuple de la nature comme norme.

Cette redécouverte a d’abord eu lieu de manière plus superficielle dans les milieux écologistes, face aux dégâts causés à l’environnement. Elle s’est accomplie ensuite de façon bien plus profonde, en silence, et dans un nombre considérable d’esprits, face à la confusion pathogène causée en l’Homme et en la Société par la négation radicale de la nature et de sa normativité.
Ce dynamisme nouveau n’a pas encore conscience d’être ce qu’il est. Il s’interprète encore souvent lui-même en termes du passé. Mais, « objectivement », il se situe au-delà du rationalisme de gauche ou libéral, au-delà du traditionalisme conservateur et au-delà de l’irrationalisme d’extrême droite.
Cette nature-norme se situe à son niveau propre, qui a sa consistance propre. Sans l’exclure, elle ne fait pas immédiatement référence à Dieu Créateur comme norme théologale ultime. C’est une conception classique, qu’on trouve notamment chez les Romains, les Grecs et les Chinois. Cette idée d’une nature comme dynamisme orienté dont résulte une harmonie, inscrite dans une histoire, et faisant norme aussi pour la raison pratique, est adaptée au multiculturalisme contemporain (dont le relativisme a été la forme superficielle). Cette idée force devra s’accorder chez nous avec la tradition de l’humanisme. Si cet accord trouve sa juste formule, il rendra un avenir humain à notre pays et à la civilisation. 

Nous sommes en face d’un mouvement qui cherche sa place sur l’échiquier politique, n’ayant pas encore compris qu’il était voué à restructurer l’espace politique tout entier…

 Lire la suite ici : 7 points forts sur LMPT

Un phénomène surprenant mais qui paraît « hexagonal », vu à partir d’un pays aussi détaché de la morale naturelle et indifférent à toute forme d’élan spirituel que la Belgique "postmoderne".  JPSC

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