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Vérité et amour au synode

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Un article du Père dominicain Jean Miguel Garrigues (Toulouse) publié par « Famille chrétienne » :

 « Avoir l’esprit dur et le cœur tendre. » Cette parole bien connue de Maritain à Cocteau, qui hantait l’héroïque Sophie Scholl en 1943 avant son exécution dans une prison nazie, me venait à l’esprit en constatant dans les médias la dialectique désastreuse dans laquelle nous, les catholiques, risquons de nous laisser enfermer dans le débat passionné suscité par le rapport du cardinal Erdö au Synode. À ce sujet, j’ai envie de filer la métaphore de Maritain et de dire à mon tour aux catholiques : n’ayons ni l’esprit dur avec un cœur sec, ni le cœur tendre avec un esprit mou. Car c’est bien ces deux attitudes qui tendent aujourd’hui à s’affronter dans une dialectique stérile.

Les tenants de la ligne « pastorale » semblent trop souvent ne pas juger nécessaire que le Synode rappelle encore une fois les vérités fondamentales, naturelles et surnaturelles, tenues et enseignées par le Magistère jusqu’aux derniers papes. Ils les déclarent suffisamment connues et même trop ressassées par le passé ; mais on voit percer dans leur discours qu’en fait ils les trouvent gênantes parce que, jugées « trop théoriques », elles entravent l’attitude compassionnelle et pédagogique de la démarche pastorale. De ce fait, ils sont soupçonnés de faire le lit du relativisme par les tenants de la ligne « doctrinale ».

Ceux-ci ont tellement peur que l’Église abandonne ces vérités fondamentales, surtout dans le contexte dissolvant de notre société occidentale, qu’ils ne veulent pas que le Magistère, en se penchant sur l’immense profusion de cas personnels souvent limites, en vienne à affaiblir la certitude des principes dans l’âme des fidèles. Ils sont soupçonnés par les autres de formalisme idéaliste et déconnecté de la vie et de la souffrance des hommes.

Perdre l’intelligence des fondements du couple et de la famille, c’est vouloir avancer sans boussole.

Je voudrais dire aux uns et aux autres que seule la vision binoculaire nous donne la perception du réel avec son relief concret. Dans l’esprit humain les deux yeux de la vision binoculaire correspondent à l’intelligence et au cœur dont parlait Maritain.

Prétendre voir par un seul de ces deux yeux, c’est se déconnecter du réel des choses et de la foi. Perdre l’intelligence des fondements du couple et de la famille, c’est vouloir avancer sans boussole, gouverné seulement par une compassion condamnée à verser dans un sentimentalisme irréaliste. Perdre la miséricorde, c’est désincarner les certitudes morales en un corpus idéal que l’on tient surtout pour s’auto-affirmer (soi-même et son milieu) en condamnant les faibles qui n’arrivent pas à le suivre. C’est perdre de vue que la morale qu’enseigne l’Église est une sagesse pratique qui fait vivre, non pas un pharisaïsme qui condamne les autres. C’est risquer d’apparaître aux incroyants, même de bonne volonté, comme une secte aux convictions fanatiques.

Il nous faut donc prier pour qu’à travers un chemin synodal, où l’Esprit Saint passe y compris par les tensions de ces derniers jours, l’Église arrive à mieux articuler ensemble, dans la parole qu’elle adresse aux hommes, vérité et amour, principes moraux du vrai bonheur et pédagogie pastorale, graduelle mais orientée par eux. Le point le plus important me semble être que les catholiques nous trouvions une manière positive d’affirmer nos convictions. Si vraiment nous croyons que le chemin que nous trace l’Église à la suite du Christ est chemin de vie et de vrai bonheur, notre certitude n’a pas besoin de condamner et de rejeter ceux qui ne la partagent pas ou n’arrivent pas à vivre en conformité avec elle. Elle s’exprime au contraire en miséricorde, en étant capable de rejoindre fraternellement celui qui avance à tâtons sur le chemin de sa vie et à porter avec lui un peu de son fardeau.

N’est-ce pas à cela que nous appelle le pape François dans ces fameux Exercices spirituels qu’en bon Jésuite il est en train de nous prêcher chaque jour ?

Ref. Vérité et amour au synode

JPSC

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