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Dans le numéro de novembre du mensuel « La Nef » : Petit bilan du synode

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Le synode, avec toutes les controverses qu’il a soulevées, nous invite plus que jamais à porter un regard surnaturel sur l’Église. Point de vue sous forme de petit bilan. Une réflexion du philosophe et écrivain français Thibaud Collin :

« Quel bilan tirer de ce synode sur la famille qui, rappelons-le, sera suivi d’un second en octobre 2015 ? Beaucoup d’incertitudes planaient dans les esprits à son ouverture ; le moins que l’on puisse dire est qu’elles ne se sont pas dissipées, voire qu’elles ont gagné en densité. En effet, ce synode a été préparé par le consistoire de février 2014 dont les débats ont été ouverts par le discours du cardinal Kasper dans lequel il prônait une évolution de la discipline sacramentelle envers les fidèles divorcés et remariés civilement. Le pape François a sciemment choisi cet opposant bien connu du cardinal Ratzinger et de Jean-Paul II sur une telle question. Le lendemain de ce discours et alors qu’il avait suscité de vives réactions dans le collège cardinalice, le pape François a publiquement félicité le cardinal Kasper semblant indiqué par là que ses thèses lui convenaient. De même a engendré crainte et perplexité le choix d’envoyer un questionnaire très ouvert à tous les évêques en leur demandant expressément de le transmettre aux prêtres et aux laïcs pour que remontent à Rome les avis de la « base » sur la morale sexuelle et conjugale. Certaines conférences épiscopales se sont empressées de rendre publiques les réponses majoritairement critiques vis-à-vis de l’enseignement de l’Église, signifiant par là que la convocation du synode créait une forte attente de changement sur ces sujets. 

Bref, le programme du cardinal Martini énoncé lors du synode sur l’Europe de 1999 semblait avoir retrouvé une troublante actualité. Rappelons que dans ce discours-programme l’archevêque de Milan pointait quelques « nœuds » disciplinaires que l’Église devait avoir « le courage » de dénouer pour retrouver une crédibilité dans le monde moderne ; figurait dans la liste l’assouplissement de la morale conjugale. Enfin, le fait qu’aucun membre du Conseil pontifical de la famille et qu’aucun professeur des Instituts Jean-Paul II n’ait été choisi par le pape François a été interprété par de nombreux observateurs comme la volonté de « faire du neuf » sur la pastorale familiale et conjugale. De là, certains et non des moindres osèrent souligner que « l’esprit du concile » était enfin de retour. Le déroulement du synode a-t-il confirmé ces pronostics ?

Deux réponses sont possibles en fonction de deux niveaux de lecture. Le premier niveau est disons humain, non pas au sens péjoratif mais au sens descriptif. Le texte de mi-parcours publié le 13 octobre apparaît comme un texte de rupture assumée comme telle vis-à-vis des deux derniers pontificats. L’importation dans le champ de la théologie du mariage et plus généralement de la théologie morale d’une grille de lecture propre aux questions œcuméniques, l’interprétation discutable de la loi de gradualité, un passage maladroit sur les personnes homosexuelles et enfin l’affirmation selon laquelle à certaines conditions les divorcés remariés pourraient recevoir la communion eucharistique, tout cela a créé de fortes critiques chez les pères synodaux. L’impression d’avoir été manipulé par une petite équipe dont tous les membres avaient été choisis par le pape a renforcé le malaise. Au nom de la miséricorde ressemblant étrangement à la tolérance l’Église n’allait-elle pas enfin accepter ce que le monde exige d’elle depuis des décennies dans le champ moral ?

Voilà ce qui provoqua un enthousiasme chez certains et un vent de panique chez les autres. Selon ce regard humain, le pape bien qu’il n’ait encore rien dit officiellement pousse vers une solution « miséricordieuse » qui rentrerait en contradiction avec la doctrine sur le mariage. En effet, accepter à la communion eucharistique des personnes étant encore liées par un mariage sacramentellement valide mais vivant une nouvelle  relation, n’est-ce pas légitimer une vie sexuelle en dehors du mariage ? Mais alors n’est-ce pas toute l’anthropologie philosophique et théologique approfondie par Jean-Paul II qui s’effondre ? N’est-ce pas, de même, l’articulation entre les sacrements du mariage, de l’eucharistie et de la réconciliation qui se trouve perturbée et par là toute l’ecclésiologie ? Bref, cette solution « pastorale » apparaît comme un cheval de Troie qui de proche en proche modifie la cohérence et l’intelligibilité de la totalité chrétienne. Sauf à douter des paroles de Jésus à saint Pierre : « Tu es Pierre et sur cette pierre je bâtirai mon Église », sauf à douter de l’assistance de l’Esprit Saint à l’Église du Christ, un tel regard ne peut être que partiel et par là conduire à une impasse.

L’autre regard est donc surnaturel ; contre ce que le regard humain atteste ou conjecture, il repose sur des actes de foi et d’espérance refusant le doute comme un poison ruinant la vie théologale dans l’âme du croyant. Voilà le regard que nous avons tous à adopter et qui peut être conforté par quelques faits. Le constat que le texte de mi-parcours a été fortement amendé dans le texte final, les points les plus litigieux ayant disparu. Le rappel que le pape François a été formé dans la Compagnie de Jésus dont la clef de voûte est le discernement des esprits par la méthode des Exercices spirituels, dont un des aspects est la prise en compte de l’épaisseur et la diversité des situations et des opinions humaines, en vue d’une élection conforme à la volonté divine.
Bref, le Christ nous invite à être plus que jamais à son écoute et à faire confiance dans la Providence. Voilà l’épreuve de la foi qu’il s’agit de traverser dans la paix reçue de l’Esprit. »

 Ref. Petit bilan du synode

JPSC

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