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Un Credo ad libitum ?

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220px-Sun_and_Moon_creation.jpgUn de nos fidèles lecteurs, au retour de la messe dominicale à l’église Saint-Jean l’Évangéliste à Liège, nous a adressé ce petit billet d’humeur:

“Quand le Fils de l’homme viendra, trouvera-t-Il la foi sur la terre?

 A cette question dramatique de Jésus (qui résonne aussi comme une mise en garde), nous pourrions répondre ceci : Oui, Seigneur, tu trouveras sans doute la foi... mais laquelle?

Si le Retour glorieux avait eu lieu ce 1er dimanche de l’Avent, vers 18h15, du côté de la place Saint-Jean à Liège, plus précisément dans l’église occupée par les dominicains, Jésus aurait pu entendre la “profession de foi” suivante proposée à ses disciples :

Ce texte a été lu collectivement à la place du Credo. Qu’en penser?

D’abord le texte, puis le contexte.

Je crois en un Dieu au-delà de tout,

tellement grand qu’il a pris le visage d’un tout-petit,

tellement Autre qu’il est devenu humain.

Je crois en un Dieu si différent de tous nos dieux

qu’il n’est reconnu que par des nomades.

Je crois en un Dieu si libre par rapport à nos religions

qu’il crèche, non dans le Temple, mais dans une mangeoire.

J’espère en l’humain au-delà de toute désespérance

tellement grand qu’il est invité à renaître,

tellement Autre qu’il devient Esprit.

J’espère en l’humain, différent de toutes ses contrefaçons,

accueilli et reconnu dans chaque visage.

J’espère en l’humain, libre par rapport à tous les esclavages

Parole vive de tendresse et de joie.

Je crois au Christ, le seul qui donne de croire en ce Dieu-là et espérer en cet humain-ci,

Christ qui se fait chair de vérité. Amen.

Cette “profession de foi” pourrait être une “profession de moi”, car elle ne reflète la foi de l’Eglise que filtrée par des a priori personnels nourris de sociologie et de l’air du temps. Ce texte est l’expression d’un “Je” hypertrophié et non d’un “Nous” ecclésial : or, l’eucharistie doit être le moment priviliégié du rassemblement autour de la même foi; elle ne peut pas être l’occasion de diviser les fidèles ! Chaque mot du Credo est imbibé du sang des martyrs qui ont sacrifié leur vie pour affirmer et défendre que Jésus est Dieu, qu’il a pris chair par l’Esprit Saint dans le sein de la Vierge Marie, qu’il a été crucifié, est ressuscité, etc. Le mentionner à chaque messe dominicale n’est ni ennuyeux ni superflu, mais essentiel. La foi commune exprimée dans le credo est la cause de notre présence autour du prêtre pour la célébration ; si les raisons croire disparaissent sous le vernis du temps ou de la fantaisie de tel ou tel quidam, à quoi bon encore célébrer ensemble? Célébrer quoi? Célébrer qui? Pour quoi faire? 

La perversité de ce texte tient d’abord à son ambiguïté, au mélange subtil de vrai et de faux qui sert d’emballage à toutes les hérésies depuis 2000 ans.

Alors, oui, Dieu est au-delà de tout; non il n’a pas pris visage humain par grandeur mais par humilité (un mot que déteste le démon) ; oui, il est différent des autres dieux (il est même le seul Dieu, faut-il le préciser?) ; non, il n’est pas nécessaire d’être nomade pour le reconnaître (quel lien entre ces deux propositions?...) ; oui, Dieu est libre par rapport à nos religions, tellement libre qu’il aime les paradoxes : crècher successivement dans une mangeoire et dans le Temple (pourquoi les opposer?) ; oui, moi aussi, j’espère en l’humain (malgré son orgueil spirituel et théologique), mais le credo est l’expression de la foi catholique (est-ce un gros mot?) et non de l’humanisme, fût-il chrétien, ou presque ; oui, j’aime l’humour et les jeux de mots à la Lacan, mais “chair de vérité” a-t-il sa place dans une profession de foi? Pourquoi pas “les non-dupes errent” tant qu’on y est...?

Il est évident que ce... que cette… -comment dire- “méditation” n’a aucunement sa place dans le déroulement de la messe. On pourrait au mieux proposer ces lignes à l’occasion d’un libre-partage, autour d’un feu de bois lors d’une soirée de scouts ou bien comme texte-martyr pour recréer le véritable credo, comme par induction. Sans plus. A l’évidence, cette bafouille pseudo-théologique n’a pas sa place dans la sainte liturgie.

Elle constitue en outre une attaque frontale contre l’oecuménisme, tant prôné par le pape François : comment réunir les chrétiens autour d’un faux credo? On comprend que nos frères orthodoxes puissent être horrifiés par de telles manipulations de la foi commune.

Paradoxalement, ce genre de contrefaçon imposée aux fidèles exprime dramatiquement la domination sur le troupeau sans voix d’un cléricalisme déboussolé mais toujours fringant et pétroleur quand il s’agit de “choquer le bourgeois” ou de réveiller les endormis (les clercs étant les seuls éveillés, au sens bouddhique, bien entendu).

On concluera en citant tout simplement le Catéchisme de l’Eglise catholique : “Aucun rite sacramentel ne peut être modifié ni manipulé au gré du ministre ou de la communauté.” (CEC 1125) et encore : “La communion dans la foi a besoin d’un langage commun de la foi, normatif pour tous et unissant dans la même confession de foi” (CEC 185)

Prions enfin pour ces malencontreux disciples de saint Dominique : Dieu a suscité cet ordre glorieux pour combattre les hérésies ; huit siècles plus tard, quelques-uns d’entre eux sèment joyeusement l’ivraie dans le champ même de l’Eglise...

Sabaoth

Commentaires

  • Celui qui a composé ces "mots" ne veut pas pour autant dire qu'il n'est pas "chrétien" et qu'il ne reconnaît pas le CREDO canonique ! Il a mis les mots écrits aux 4e et 5e siècles avec sa manière de vivre la foi au milieu des siens !

    N'en tirez pas trop vite des conclusions. Une hérésie de pouvoir aussi s'exprimer ainsi ?

    J'ai beaucoup côtoyé des religieux. Parfois, par moments, quand on récitait le "Je vous salue Marie", chacun à son tour disait la première partie de cette hymne ... et on utilisait les mots "à soi" !
    On peut envisager que, une fois de temps à autre, chacun puisse exprimer une phrase du "Credo" avec ses mots à lui, ses mots du 21e siècle.

    Je pense aussi que sur ce site, beaucoup de ceux et celles qui écrivent et répondent ont tendance à diaboliser et à excommunier celles et ceux qui ne pensent pas tout de manière très traditionaliste ! Ayez l'humilité d'exprimer que d'autres "voies" sont possibles !

  • Beaucoup de chrétiens cherchent Dieu très sincèrement ... Ils lisent beaucoup... Ils parlent beaucoup ... Interrogent beaucoup ... surtout les priants. Ils vont de chapelles en chapelles... Ils ne sont jamais rassasiés et finalement, ils doutent beaucoup ... et chicanent beaucoup ... s'énervent beaucoup ... et finalement ils finissent par se stabiliser.
    En cette période de l'Avent, nous avons à "veiller pour renaître" www.carmes-paris.org Avent 2014 retraite en ligne

    Pascal, Pensées. (Ed Sellier 168): "tout le malheur des hommes vient d'une seule chose, qui est de ne savoir pas demeurer en repos dans une chambre ... On ne recherche les conversations et les divertissements des jeux que parce qu'on ne peut demeurer chez soi avec plaisir. Etc... De là vient que les hommes aiment tant le bruit et le remuement ... Et c'est enfin le plus grand sujet de félicité de la condition des rois de ce qu'on essaie sans cesse à les divertir et à leur procurer toutes sortes de plaisirs."

    Je nous souhaite à tous, Baptisés actuels et futurs : - la Paix et la Grâce du Seigneur pour chaque jour qu'Il nous donnera de vivre en Sa Présence et pour sa Gloire -

  • C'est évidemment de bon ton, dans certains milieux, de jouer sur le registre "tolérance", tendance à la diabolisation, à l'excommunication...

    Avant le célèbre "qui suis-je pour juger", les papes, revêtus de l'autorité de lier et de délier, n'avaient pas peur d'appeler un chat un chat.

    Ce n'est pas un hasard si le 1er concile oécuménique de Constantinople, en réponse à l'hérésie arienne (hérésie qui, entre autres choses, niait la Trinité), finit par adopter le Symbole de Nicée-Constantinople.

    On pourrait se demander ce que l'Eglise (et l'enseignement du Christ) seraient devenus si les pères de l'époque, soucieux de ne pas "tout penser de manière très traditionaliste" avaient rédigé le texte désormais à l'honneur à l'église St Jean, plutôt que le Symbole qu'ils ont finalement adopté. Idem si simplement on avait rédigé un texte aussi important que celui-là dans un langage qui ne convenait et ne pouvait être compris que par référence à une période donnée et à une culture d'une époque.

    Pour ces tenants du "progrès", de la "lutte contre l'obscurantisme", il faudrait que l'Eglise se débarrasse de son système immunitaire et devienne donc une maison commune ouverte à toutes les opinions, fussent-elles contraires à l'Evangile et aux enseignements des premiers conciles, en passant par une tradition de 20 siècles.

    Argument qui sape évidemment toute légitimité à un exposé de foi, promis à être remis en question indéfiniment par la suite.

    "La perversion de la cité commence par la fraude des mots" (Platon)

  • Ces credos inventés de toutes pièces, sont répandus en Wallonie par des prêtres 'protestantisés' et 'maçonnisés', disciples du Ringletisme.
    .
    Et c'est inspiré d'une technique protestante du credo : on demande aux fidèles d'inventer leur propre credo, l'on vote pour le meilleur, qui aura les honneurs de la lecture à l'office. C'est le modernisme, le rationalisme et le relativisme, protestant et maçonnique, poussés jusqu'à l'extrême.
    .
    Je me demande bien pourquoi les évêques ne mettent pas leur veto à ces hérésies ?

  • Ah, Pauvre-Job, vous avez de ces expressions qui fleurent bon
    les grands principes traditionalistes !
    Il faudra demander que ces "termes" figurent au prochain "Petit Larousse" !

    Mais loin de moi l'idée de vous en faire quelque reproche : vous ne connaissez pas la manière dont les protestants peuvent vivre leur culte dominical !

    Quant à Philippe, je ne vois ce que nous aurions tous à gagner à tenter d'aborder le moindre dialogue entre lui et moi !

  • Delen

    "Quant à Philippe, je ne vois ce que nous aurions tous à gagner à tenter d'aborder le moindre dialogue entre lui et moi !"

    Parce que vous trouvez qu'on ne vous fournit pas suffisamment de thèmes de débat quand on remet le Symbole de Nicée-Constantinople dans une perspective historique, qui est celle d'une réponse de l'Eglise à une situation de crise, qui a failli l'emporter ?

    Parce que vous n'aimez pas qu'un Credo à la carte soit associé au Protestantisme ?

    Je constate une fois de plus que vous utilisez chaque fois les mêmes procédés (vous ne connaissez pas, rien à gagner à tenter de dialoguer avec vous... ou alors celle de tout à l'heure où vous estimez que les catholiques sont enfermés dans leurs conceptions vis-à-vis de la Charia).

    L'incertitude doctrinale, la remise en cause d'options vagues par la génération suivante que j'ai évoquée plus haut n'a pas non plus - semble-t-il - éveillé votre interrogation quant au bien fondé de ces incantations à la carte. Comme si du reste, le Crédo, selon les formes autorisées, n'était pas suffisant ou demeurait obscur, incompréhensible pour le peuple chrétien.

    Bon alors puisque je suis fermé au dialogue, voici encore quelques matières qui conforteront peut-être votre vision équilibrée et donc progressiste des choses.

    "Après le concile de nombreux prêtres ont délibérément érigé la désacralisation au niveau d'un programme d'action (...) ils ont rejeté les vêtements sacrés; autant qu'ils l'ont pu, ils ont dépouillé les églises de leurs splendeurs qui rappellent le sacré; et ils ont réduit la liturgie au langage et aux gestes de la vie de tous les jours, par le moyen de salutations, de signes d'amitié et autres éléments." (Cardinal Joseph Ratzinger, Conférence aux évêques Chiliens, Santiago, 13 juillet 1988)

    - "(...) il semble qu'il soit sorti de l'esprit des créateurs de la liturgie, occupés qu'ils sont de manière toujours plus pressante à réfléchir sur la manière dont on peut présenter la liturgie d'une manière toujours plus attrayante, et plus communicative, en impliquant activement toujours plus de gens, que, en réalité, la liturgie est "faite" pour Dieu et non pour nous-mêmes." (Cardinal Joseph Ratzinger, L'ecclésiologie de la Constitution conciliaire Lumen gentium, Congrès d'études sur le Concile Vatican II, 22-22 février 2000)

    - "Aujourd'hui, on peut se demander si, après tout, il y a encore un rite latin; la conscience de ce rite n'existe certainement plus guère. Aux yeux de la plupart, la liturgie apparaît plutôt comme une chose à réaliser par chaque communauté, tâche en vue de laquelle les groupes concernés bricolent de semaine en semaine leurs "liturgies" propres avec un zèle aussi admirable que déplacé. Cette rupture dans la conscience liturgique fondamentale me paraît être ce qu'il y a ici de véritablement funeste. Les frontières entre liturgie et réunions estudiantines, entre liturgie et convivialité disparaissent insensiblement; on s'en aperçoit aussi, par exemple, au fait que des prêtres croient, conformément aux usages de la civilité bourgeoise, ne pouvoir communier eux-mêmes qu'après avoir distribué la communion aux autres; au fait qu'ils n'osent plus dire "je vous bénis", rompant ainsi le face à face liturgique fondamental; et encore aux salutations souvent insupportables avec leurs séries de banalités, que certaines communautés attendent pourtant maintenant comme une politesse indispensable, et qui sont devenues ici monnaie courante." (Cardinal Joseph Ratzinger, La célébration de la foi, 1981)

    - "On a une liturgie dégénérée en "show", où l'on essaie de rendre la religion intéressante à l'aide de bêtises à la mode et de maximes morales aguichantes, avec des succès momentanés dans le groupe des fabricants liturgiques (...)" (Cardinal Joseph Ratzinger, Gedenkschrift für Klaus Gamber, Cologne 1989)

  • Merci Philippe de ces citations qui redisent ce qu'est et ce que doit être la liturgie catholique de la sainte messe.

    Personnellement il me semble, en toute modestie, que les refontes actuelles empreintes de subjectivisme ne font pas de bien, ni à l'Église, ni à la foi.

  • Personnellement, je trouve surtout que ce genre de prières remplies de bons sentiments se vident de sens à peu près aussi que les églises qui les pratiquent se vident de paroissiens. De plus, elles sont d'une telle mièvrerie doucereuse qu'elles me donnent l'impression d'une pornographie spirituelle. Je ne vois pas l'intérêt de remplacer le credo en règle générale (ça me dérange même souverainement qu'on le fasse), mais si en plus c'est pour mettre à la place des trucs aussi "has been" et "craignos" que ce machin, c'est pas demain qu'on va revoir de la jeunesse à l'église.

  • Je ne crois pas que n'importe quel concile antérieur à VaticanII intéresse ce cher monsieur. A quand un rap en verlan (à l'envers ndr)avec un dj et des danses endiablées (tant qu'on y est) à la place du credo poussiéreux? Et à la place de l'encens, ils allumeraient quelques calumets de la paix façon Bob Marley (cela dit ce dernier se convertit à la religion orthodoxe à la fin de sa vie). Faut vivre avec son temps... Bande de tradis!

  • Quelles que soient les intentions du célébrant, il me semble que le rite de la messe ne lui appartient pas. Selon l’ « Institutio generalis » de la messe romaine (édition 2011) :
    N°67. Le Symbole, ou profession de foi, vise à ce que tout le peuple rassemblé réponde à la parole de Dieu annoncée dans les lectures de la sainte Ecriture et expliquée dans l´homélie, et, en professant la règle de la foi dans une formule approuvée pour l’usage liturgique, se rappelle et professe les grands mystères de la foi avant que ne commence leur célébration dans l’Eucharistie.
    N°68. Le Symbole doit être chanté ou dit par le prêtre avec le peuple, le dimanche et les jours de solennité; on peut aussi le dire lors de célébrations particulières plus solennelles.

  • Ces mainmises autoritaires sur la liturgie sont autant de coups de force insupportables qui justifient un sain anticléricalisme. La messe n'appartient ni au célébrant ni au peuple rassemblé : elle est le bien commun de toute l'Eglise. Pourquoi en faire une propriété privée?

  • L'instruction "Redemptionis Sacramentum", qui donnait en 2005 une liste extensive des abus liturgiques, est très claire:

    "Durant la sainte Messe, tout comme dans les autres célébrations de la sainte Liturgie, il n’est pas permis d’utiliser un Symbole ou une Profession de foi qui ne se trouve pas dans les livres liturgiques dûment approuvés."

    Pourquoi tergiverser et traiter de tous les noms ceux qui demandent simplement une que la Messe catholique soit... catholique?

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