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En islam, la représentation de Dieu est interdite, non celle de son prophète

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Illustration-web1.jpg_article_popin.jpgPour l’opinion courante, représenter le Dieu de Mahomet ou son Prophète et en faire la caricature est doublement sacrilège aux yeux de l’Islam.

Dans le Christianisme, religion de l’incarnation, rien n’interdit que la Sainte Trinité, ni le Père,  ni a fortiori le Fils, ni l’Esprit qui procède des deux, soient abondamment représentés. Reste que le culte des icônes du Christ et des Saints a bel et bien été l’objet de violentes contestations (qu'elles soient byzantines ou protestantes) parfois justifiées dans la mesure où c’est l’image elle-même qui a pu faire l’objet d’une idolâtrie « magique » apparentée à celle, tout aussi abusive, des reliques et liée au concept d'image « achéiropoïète » hérité du paganisme antique.

Ne jetons donc pas trop vite la pierre aux musulmans mais reconnaissons que leur conception même de Dieu ne les porte pas à faire les distinctions finalement apportées par la théologie chrétienne.

Un article publié par le journal « La  Croix » tend cependant à montrer que la sacralisation iconoclaste du prophète Mahomet serait un développement tardif (JPSC) :

 […] QUELLE EST L’HISTOIRE ?

Avec l’interdit posé par le Décalogue – dont l’islam a hérité –, le judaïsme rompt avec l’habitude établie jusque-là de représenter les dieux, aussi bien dans la peinture que la sculpture. Les spécialistes y voient le noyau voire l’essence même du monothéisme : « Il n’y aura pas pour toi d’autres dieux devant ma face ».

De cette interdiction juive qu’il a reprise, l’islam ne s’est jamais écarté en ce qui concerne Allah. Mais, selon les lieux et les époques, il a été « tenté de l’étendre, mais pas partout ni toujours, à la figuration du prophète voire à celle de tous les prophètes », écrit le P. François Boespflug, dans « Le Prophète de l’islam en images : un sujet tabou ? » (Bayard, 2013).

QUE DISENT LES TEXTES DE L’ISLAM SUR LA REPRÉSENTATION DE DIEU ?

À la différence de la Bible, le Coran ne porte pas d’interdiction explicite des images de Dieu. Il ne condamne explicitement que les idoles pré-islamiques et toute autre forme d’idolâtrie. L’interdit semble relever du consensus de la communauté (ijmâ), constate le P. Boepsflug, qui y voit moins « affaire de discipline que l’effet d’une sorte d’évidence ». Et le résultat de l’idée même de Dieu en islam : un Dieu « impénétrable », « opaque », comme « une forteresse sans portes ni fenêtres », selon les métaphores employées par les musulmans, dont rien – ni Jésus bien sûr, mais pas même Adam – ne sont « à la ressemblance ».

Lire aussi  : La lente disparition du blasphème dans la loi n’épuise pas le débat 

QU’EN EST-IL DE LA REPRÉSENTATION DU PROPHÈTE ?

Le Coran n’interdit en rien la figuration du prophète Mohammed. « Seule la représentation de Dieu est interdite », ne cesse de rappeler l’imam de Bordeaux, Tareq Oubrou. Mais, ici ou là, selon les époques, l’islam a eu la tentation d’étendre cet interdit pesant sur la représentation de Dieu à son prophète, Mohammed.

D’abord en raison d’une « méfiance » croissante envers les images en général, et notamment celles « représentant des êtres vivants ayant un souffle vital (rûh) », c’est-à-dire êtres humains et animaux donc. Méfiance exprimée notamment par les hadith, ces faits et gestes prêtés au prophète Mohammed ou à ses compagnons, mis par écrits et collectés deux siècles plus tard. Même si l’image est loin d’en être un thème central, plusieurs hadiths reprochent à « ceux qui fabriquent des images (…) de vouloir se comparer au Créateur », écrit Vanessa van Renterghem, spécialiste d’études arabes à l’Institut français du Proche-Orient, dans un article sur « La représentation figurée du prophète Mohammed ». Certains de ces écrits sont même plus « ouvertement hostiles aux images », affirmant ainsi « qu’une maison qui en abrite ne sera jamais visitée par les anges »…

Ensuite en raison d’une « sacralisation progressive » du prophète Mohammed. Une évolution notable, liée à un « changement de la société » à la fin de la dynastie omeyyade, rapporte l’historienne et professeur en études arabes, Jacqueline Chabbi, alors que celle-ci, constituée désormais majoritairement de convertis, souhaite se doter de « règles pratiques de vie ».

Pourtant, rappelle Vanessa van Renterghem, « parmi les figures humaines représentées par des artistes du monde musulman, celle de Mohammed ne semble pas, dans un premier temps, avoir constitué une exception notable ».

L’ouvrage du P. Boespflug présente d’ailleurs « un échantillon » de vingt représentations du prophète Mohammed, provenant toutes de pays ou de milieux musulmans » (Iran, Afghanistan, Turquie etc.). Preuve que, tout au long de l’histoire de l’islam, celui-ci a été représenté dans des manuscrits, sous la forme d’enluminures mais aussi parfois d’images « sinon dévotionnelles, du moins catéchétiques ». Son visage est parfois dévoilé, tantôt recouvert d’un linge blanc qui dissimule ses traits, parfois entouré d’un nimbe circulaire (emprunté à l’art chrétien) ou en forme de gerbe de flammes (inspiré de l’art bouddhiste et/ou chinois).

QU’EN EST-IL AUJOURD’HUI ?

Plus que le Coran, les hadiths expliquent donc largement cette méfiance vis-à-vis des images figuratives et cette « sacralisation » progressive du prophète. C’est sur cette tradition du Prophète que s’appuient généralement les courants fondamentalistes – comme le wahhabisme, en Arabie saoudite –, jusqu’à la faire prévaloir sur le Coran.

En introduction de son livre, le P. Boespflug souligne donc la nécessité de « mener la lutte contre une mémoire tronquée de l’islam et une amputation de sa tradition », et appelle « les croyants musulmans cultivés, et/ou les islamologues (à) publier un livre de référence à ce sujet ».

Lire aussi  : « Plus votre rapport au religieux est argumenté et moins vous craignez la caricature » 

« Il fut un temps où artistes comme public musulmans considéraient la production et la contemplation de portraits de leur prophète comme une expression de leur dévotion, et non comme une pratique blasphématoire réservée aux seuls détracteurs de l’islam », rappelle également Vanessa van Renterghem.

Les nombreuses condamnations venues du monde musulman concernant la nouvelle « une » de Charlie Hebdo montrent toutefois la sensibilité du sujet. Même si, outre la représentation en elle-même du prophète de l’islam, les caricatures répétées du journal satirique posent la question du respect dû à cette religion et à ses fidèles.

Anne-Bénédicte Hoffner et Samuel Bleynie »

Claude Langlois : «Le christianisme est une religion de l’image»

Ref. En islam, la représentation de Dieu est interdite, non celle de son prophète

 

Commentaires

  • Islam et protestantisme sont iconoclastes car ce sont des religions de livres exclusivement. Elles déifient et idolâtrent le Coran ou la Bible. Elles prétendent que ces livres sont la parole de Dieu, et seraient donc sacrés.
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    Or, ces livres eux-mêmes n'ont pas cette prétention. Ils disent bien que la vraie et seule Parole de Dieu est la Création. Et d'ailleurs ces livres ont été écrits par toute une série d'auteurs, à qui Dieu s'est révélé dans sa Création.
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    Les images du catholicisme, qui représentent la Création, sont donc tout autant fidèles à la Parole de Dieu que les textes de ces livres.
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    Une image ou statue abstraite s'éloigne davantage de la Création, de la Parole de Dieu. On pourrait donc (à la limite) considérer que les arabesques d'une mosquée seraient plus idolâtres qu'une statue d'un saint dans une église, image d'une créature de Dieu.

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