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Sécularisation de la société et attrait morbide d’une société décadente pour l’islamisme

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Lu sur le site web de « France Catholique » cette réflexion de William E. Carroll dans le Los Angeles Times :

arton16706-a1591.jpg« Dans la tribune libres opinions du Los Angeles Times, juste avant son allocution à la conférence de la maison Blanche sur l’extrémisme, le Président Obama a signalé qu’en dernière analyse la lutte contre un fanatisme religieux comme celui de l’Etat islamique était un combat pour gagner « les cœurs et les esprits » afin d’empêcher dans le monde entier des individus de se radicaliser et de sombrer dans la violence. Parlant à l’ouverture de la conférence, le vice-président Joe Biden a également insisté sur l’importance de traiter d’urgence les problèmes économiques et sociaux profondément enracinés qui constituent un terrain fertile pour ceux qui veulent recruter des partisans de l’Etat islamique dans les sociétés occidentales.

Bien qu’une meilleure intégration dans sa propre communauté puisse aider certains à résister au genre d’aliénation qui conduit à l’adoption d’idéologies radicales, il est beaucoup plus probable que le terreau du fanatisme religieux en Occident soit la sécularisation de la culture occidentale elle-même.

Une culture qui confine (ou essaie de confiner) les convictions religieuses dans le domaine de l’expérience personnelle et subjective au lieu de reconnaître que la religion est davantage qu’une vision privée du monde, est une culture qui marginalise la religion et aliène donc les croyants qui considèrent que celle-ci concerne la totalité de l’existence humaine. La culture occidentale affirme trop souvent le caractère exclusivement séculier du débat public, et partant de la politique. Dans ce contexte les croyances religieuses ne sont ni bien accueillies ni même, dans certains cas, tolérées.

La culture sécularisée peut être aussi aveuglément idéologique et intolérante à l’égard des opinions contraires que tout fanatisme religieux. Ceux qui désapprouvent les règles séculières s’appliquant, par exemple, aux questions sociales sont souvent dénoncés comme des bigots ignorants dont les idées ne peuvent être prises au sérieux. Il est facile de trouver des exemples de ce rejet plein de suffisance et de l’atmosphère glaciale de conformisme séculier dans les nations occidentales. Si nous voulons lutter pour gagner « les cœurs et les esprits » des autres, nous devons nous ouvrir à ces cœurs et ces esprits, y compris à ceux qui n’acceptent pas la sécularisation de la réalité. L’intolérance se nourrit de l’intolérance.

Le terrorisme islamiste d’organisations comme Daech n’est pas justifié parce que la culture occidentale est souvent intolérante envers la religion. La barbarie du djihadisme n’est pas à mettre sur le même plan que l’intolérance de la société séculière. Pourtant, si nous voulons comprendre le terreau dans lequel le terrorisme islamiste commence à s’implanter en Occident, nous devons mieux examiner le credo séculier qui est si répandu dans nos civilisations.

L’Etat islamique a, bien sûr, d’abord attiré de jeunes musulmans du Moyen-Orient, et cette attraction découle de motivations religieuses propres à l’islam ainsi que de la corruption réelle et supposée des sociétés musulmanes. Mais son attrait pour les jeunes occidentaux procède en grande partie de la perception qu’ils ont de la culture du monde où ils vivent.

Quelle que soit la perversité du djihadisme, la fascination qu’il exerce révèle une vérité fondamentale sur les êtres humains et leurs instincts profonds. Le monde moderne, surtout l’Occident, a progressivement perdu tout sens de la transcendance, toute conscience d’un domaine de valeurs et de vérités dépassant l’univers terrestre des réalités économiques, sociales et personnelles. Cette perte du sens de la transcendance engendre une culture qui ne débouche sur rien d’autre qu’elle-même, fermée à tous les grands projets ou objectifs dépassant ceux de ce monde.

Dans une culture dominante hostile aux valeurs transcendantes, les individus réagissent de diverses manières. Certains acceptent les normes séculières qui relèvent d’une espèce de relativisme éthique selon lequel les valeurs se définissent en fonction des choix qu’en font les individus. D’autres s’efforcent de résister à l’emprise de la sécularisation en essayant de conserver des pratiques religieuses traditionnelles. Le besoin de transcendance inné chez l’homme ne disparaît pas parce que la société nie l’existence de la transcendance ou s’efforce de la redéfinir comme une préférence purement subjective.

Ce besoin de transcendance a été perverti tout au long de l’histoire. La société sécularisée offre des contrefaçons de transcendance qui ont pour objet de satisfaire les besoins physiques, et même pas toujours de manière très efficace. L’histoire est pleine de faux prophètes qui promettent de libérer l’être humain du purement terrestre. L’existence même de ces prophètes et leur succès temporaire démontrent qu’ils touchent une fibre profonde du cœur humain. Tous les appels à la transcendance ne sont pas dignes de respect, à preuve l’Etat islamique.

Mais en ignorant, en marginalisant ou en rejetant ceux qui aspirent à la religion où ils voient une source transcendante de vérité, les sociétés fournissent un terreau approprié à ceux qui invitent les jeunes à prendre en compte un type différent de transcendance.

Nous devons être prudents en examinant ce que certains revendiquent comme des valeurs suprêmes, et à cet égard un discours rationnel s’impose d’urgence. Mais nous devons encore plus refuser de dire que le discours rationnel exclut toute proclamation d’une vérité basée sur la foi religieuse. Si nous séparons la raison et la science de la religion, nous permettons à n’importe quel type de « foi » d’exercer un attrait. Il est paradoxal que plus la société séculière s’efforce d’éliminer la religion de l’espace public, plus elle permet des perversions barbares de la foi comme le djihadisme. Photographie : Epouses de djihadistes : deux jeunes autrichiennes recrutées par l’Etat islamique en Syrie [Daily Mail]

Lundi 23 février 2015

William Carroll est bénéficiaire de la bourse de recherche Thomas d’Aquin en théologie et science à Blackfriars Hall (Université d’Oxford)

Source : http://www.thecatholicthing.org/201...

Photo : Épouses djihadistes : Deux filles autrichiennes qui ont rejoint ISIS en Syrie [Daily Mail] » 

JPSC 

Commentaires

  • « La crise de l'Occident et de l'islam fonctionnent en miroir dont le point de convergence est la crise de la spiritualité. D'un côté, on a un sacré fossilisé qui n'arrive plus à se régénérer et qui étouffe. C'est la tragédie de l'islam qui fonctionne par stéréotype: le voile, le hallal, l'islam réduit à des codes. Cette pauvreté spirituelle confine à l'indigence. C'est ce qu'Olivier Roy appelle «la sainte ignorance»: une religiosité binaire standard et stéréotypée. En face, l'Occident matérialiste n'a toujours pas réussi à intégrer ses racines religieuses dans la modernité. Quid de la morale évangélique, de l'aspiration à la transcendance. Il y a deux mondes qui développent une hostilité d'autant plus importante qu'ils se renvoient l'image mutuelle d'une déshérence et d'une dégénérescence du rapport au sacré. J'insiste sur l'idée qu'il est temps que les deux milieux réfléchissent ensemble à redonner à l'existence humaine une renaissance spirituelle qui se nourrisse de tous les héritages au lieu de les ignorer où de les reproduire mécaniquement ». Extrait de l’interview d’Abdennour Bidar publiée sur le site web « Figaro Vox » Normalien, Abdennour Bidar est agrégé et docteur en philosophie. Il est chargé de mission à l'Éducation Nationale (France) et est l'auteur de plusieurs ouvrages dont «L'islam sans soumission» (Albin Michel). Son dernier livre, «Plaidoyer pour la fraternité» vient de paraître aux éditions Albin Michel.

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