Pour « Famille chrétienne », Jean-Marie Dumont a interviewé Dom Samuel fondateur de la trappe de Novy Dvur en Tchéquie :
EXCLUSIF MAG - Dom Samuel, entré au monastère de Sept-Fons en 1983, a été l’un des fondateurs de l’abbaye de Novy Dvur, en République tchèque. Il vient de publier Comme un feu dévorant. Nous l’avons interrogé lors de son récent passage en France.
Comment se porte la trappe que vous avez contribué à fonder il y a quinze ans en République tchèque ?
La fondation est devenue prieuré, puis abbaye. Des jeunes nous ont rejoints. Certains d’entre eux sont des convertis. Ils viennent de République tchèque, Slovaquie, Croatie, Slovénie, Pologne, Hongrie… Des pays qui sont parfois considérés avec une pointe de condescendance par l’Europe de l’Ouest, mais qui ont conservé certaines valeurs, fondements d’une société équilibrée, contestées pourtant dans la partie occidentale de l’Europe.
La République tchèque est très déchristianisée…
Deux personnes m’ont dit ce matin : « Vous venez du pays le plus déchristianisé d’Europe. » J’ai répondu : « Oui, mais après la France ! » C’était une sorte de provocation… Les catholiques, en République tchèque, sont une minorité, mais une minorité vivante.
Dans le diocèse de Plzen, où nous sommes installés, il y a soixante-dix prêtres, dont la moyenne d’âge n’atteint pas 50 ans. Dans les pays slaves, la vie chrétienne est vivante et la société bienveillante à son égard, sans cette impression de découragement qu’on perçoit quelquefois dans l’Hexagone. Il ne faut pas idéaliser. Dans l’Église en France, il y a aussi de la vitalité. Mais vu de loin, on a l’impression d’un pays qui s’essouffle. Je n’ai pas cette impression en Europe centrale.
Ce relatif « succès » de votre monastère a-t-il un lien avec les persécutions de l’époque communiste ?
Le succès n’est pas une notion chrétienne. La vie du Seigneur fut-elle un succès ? Ce qui est vrai, ce que je crois profondément, c’est que Dieu continue à appeler des garçons et des filles à Le servir, dans l’Église. Si nous avons réussi à enraciner la communauté de Novy Dvur en République tchèque, si certains des jeunes que Dieu appelait ont accepté leur vocation et persévèrent, c’est d’abord parce que nous avions derrière nous l’expérience vivante de Sept-Fons. Et parce que nous avons essayé – très pauvrement et avec des échecs – de mettre en œuvre une pédagogie qui permette à des jeunes, inscrits dans la culture contemporaine, de prendre le temps de comprendre le sens de leur vocation, afin de l’accepter et d’y répondre.