Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Les hindouistes mènent la vie dure aux chrétiens indiens

IMPRIMER

De Maximilian Lutz sur le site de l'Aide à l'Eglise en Détresse (Belgique) :

Inde: Narendra Modi veut d’un État hindou

Mgr. Thomas Paulsamy

14/05/2018 Louvain – Les chrétiens de l’Inde souffrent de discrimination de la part des hindous fondamentalistes.

Lors d’une visite à l’œuvre internationale de bienfaisance catholique l’Aide à l’Église en Détresse, Mgr Thomas Paulsamy, évêque du diocèse indien de Dindigul, a exprimé son extrême déception face à la multiplication des attaques violentes.

Dans l’État du Tamil Nadu, au sud de l’Inde,  les chrétiens déplorent l’augmentation de la violence et de la discrimination exercées par des hindous fondamentalistes. La semaine dernière, dans au moins seize villes, quelque 20 000 chrétiens de différentes confessions sont descendus dans la rue pour manifester contre des agressions antichrétiennes. Depuis le début de l’année, plus de 15 cas d’attaques violentes ont été signalés dans le Tamil Nadu. Mais l’oppression de la minorité chrétienne dans l’Inde majoritairement hindoue s’accroît aussi dans d’autres régions du pays. Près de 80 pour cent de la population totale est de confession hindoue, seulement un peu plus de deux pour cent sont chrétiens.

Les délits s’étendent de la profanation d’églises, par exemple de la destruction de statues mariales, au viol de religieuses et à l’assassinat d’un pasteur. Ce dernier cas en particulier a donné lieu à des protestations considérables de la population chrétienne. Des milliers de chrétiens sont descendus dans les rues. La victime de l’assassinat, un pasteur d’une Église chrétienne indépendante du district de Kanchipuram, dans l’État fédéral du Tamil Nadu, avait été découverte pendue en janvier après avoir déposé auprès de la police une plainte pour harcèlement par des hindous.

 

Mgr Thomas Paulsamy peut également témoigner que les chrétiens du Tamil Nadu se sentent de plus en plus menacés par les hindous fondamentalistes radicaux. À l’occasion d’une visite auprès de l’œuvre internationale de bienfaisance catholique l’Aide à l’Église en Détresse, l’évêque du diocèse indien de Dindigul s’est montré extrêmement déçu des agressions violentes de plus en plus nombreuses. « Nous, les chrétiens, entretenons en principe de bonnes relations avec les hindous, les musulmans et d’autres groupes religieux », assure l’évêque. « Nous voyageons ensemble, mangeons ensemble, vivons ensemble. Certains viennent même dans nos églises. » À Noël, par exemple, des milliers de non-chrétiens ont assisté aux offices religieux catholiques, et parmi eux aussi beaucoup d’hindous. Il est d’autant plus triste qu’une minorité hindoue nationaliste détruise à ce point la coexistence pacifique. Récemment, dans le diocèse voisin, des lieux de culte principalement protestants y ont été attaqués, et des bibles y ont été brûlées.

Mgr Paulsamy préside le Comité des Castes et ethnies défavorisées de la conférence épiscopale indienne. Le débat y porte actuellement sur les possibilités de mieux protéger la minorité des chrétiens d’Inde. Un groupe de travail interreligieux a déjà été mis sur pied, au sein duquel les représentants de plusieurs minorités religieuses, y compris des musulmans, discutent des solutions possibles. Par ailleurs, de plus en plus d’évêques prennent maintenant la parole et protestent publiquement contre la haine religieuse. « Mais tout cela se passe toujours de manière pacifique, jamais dans la violence », souligne Mgr Paulsamy. En effet, les chrétiens ne veulent pas tomber au même niveau que la partie adverse. Selon l’évêque, la raison principale de la détérioration croissante des relations entre les hindous et les chrétiens réside dans la prise de pouvoir de Narendra Modi, du parti nationaliste hindou Bharatiya Janata Party (BJP), et estime qu’avant que ce parti n’accède au pouvoir, la situation était beaucoup plus pacifique et harmonieuse. Depuis que Narendra Modi est premier ministre, les groupements hindous fondamentalistes deviennent de plus en plus puissants. « Le BJP soutient les fondamentalistes », assure l’évêque, en ajoutant que la police poursuit parfois même les victimes d’attaques violentes.

Selon la Constitution, l’Inde est une république socialiste, laïque et démocratique. L’article 25 de la Constitution stipule que « toutes les personnes ont des droits égaux à la liberté de conscience, à la profession d’une religion, à sa pratique et à sa propagation ». Toutefois, le premier ministre Modi, continue Mgr Paulsamy, a l’intention de transformer l’Inde en un pays hindouiste. « Il ne veut pas que ce soit la Constitution qui s’applique, mais les principes et valeurs religieux de l’hindouisme. » Différents indices étayent cette affirmation : à plusieurs reprises, les ministres de Modi ont affirmé leur soutien aux mesures censées « protéger » la religion hindoue. Les minorités religieuses sont considérées comme une menace, en particulier les musulmans et les chrétiens.

Après sa victoire aux élections en 2014, le parti BJP a également voulu réinstaurer à l’échelle nationale une loi anti-conversion – une offensive qui a toutefois été rejetée par le ministère du droit et de la justice. Les juristes ont justifié leur décision en soulignant que toute législation de la part du gouvernement centralisé risquant de limiter le libre choix de la religion était contraire à la Constitution. Pourtant, actuellement, des lois anti-conversion sont entrées en vigueur dans sept des 29 États fédéraux indiens. Entre-temps, les conversions étaient également interdites au Tamil Nadu, un État avec un taux relativement élevé de chrétiens d’environ 12 pour cent. Toutefois, cette loi y a de nouveau été abrogée, mais le gouvernement continue de considérer toute conversion d’un œil critique. Il est permis de supposer que Narendra Modi n’a pas renoncé au projet d’une interdiction de la conversion à l’échelle nationale.

En mai 2019, de nouvelles élections se tiendront en Inde. Actuellement, l’opposition tente bien de former un parti de coalition pour se dresser d’une seule voix contre le BJP. La question demeure toutefois si cette initiative permettra de disputer la majorité à Modi. La menace de cinq autres années dangereuses plane au-dessus des chrétiens d’Inde. Mgr Paulsamy est convaincu que si Narendra Modi et son parti BJP sont réélus, la discrimination de la minorité chrétienne se poursuivra. « Tant que le BJP tiendra les rênes du gouvernement, ce parti mènera la vie dure aux chrétiens d’Inde. »

Par Maximilian Lutz

Les commentaires sont fermés.