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Les silences du Pape face au rapport qui le met en cause

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Le point de vue de Jean-Marie Guénois dans le « Figaro » :

Pour l'heure, François a choisi la stratégie du silence. «Je ne dirai pas un mot à ce sujet», a-t-il rétorqué, dimanche 26 août, lors de la conférence de presse qu'il a donnée en soirée dans l'avion, de retour d'Irlande. Ce «sujet» est la lettre ouverte - et explosive - publiée, samedi, par Mgr Carlo Maria Vigano, ancien nonce apostolique aux États-Unis. Le Pape a reconnu l'avoir lue, mais il se tient à distance, et pour cause.

Dans cette lettre de onze pages, Mgr Vigano, 77 ans, évêque à la retraite réputé pour la précision de ses informations, Italien connaissant tous les rouages du Vatican pour avoir été secrétaire général du gouvernement de la cité du Vatican, commet l'erreur de demander la démission du pape - cela affaiblit son propos - mais avance des faits que personne, pas même le Pape, n'est pour le moment en mesure de contredire.

Il convient d'être prudent sur ce genre d'affaires mais l'enquête menée, dès sa parution, par Le Figaro auprès de quatre sources très informées, très différentes et internes du Vatican, conduisent à une même conclusion: les leçons tirées de l'affaire par Mgr Vigano sont de sa responsabilité, mais il sera difficile de contrer l'exactitude des faits décrits.

L'ancien représentant du Pape aux États-Unis développe quatre thèses:

la première est que le pape François a choisi, dès son élection en 2013, comme conseiller personnel pour les États-Unis, l'ancien archevêque de Washington, le cardinal Theodore McCarrick - qui avait joué un rôle décisif dans son élection - alors qu'il savait, affirme Vigano, la pratique homosexuelle de ce prélat avec ses séminaristes.

Pression médiatique

Par la stratégie du silence - grand classique de défense au Vatican -, le Pape entend ne pas donner d'importance à ce document

La deuxième thèse est que le pape Benoît XVI, en 2009, informé par une enquête interne des mœurs de ce prélat - très connues aux États-Unis -, avait pourtant et aussitôt déposé cet archevêque. Mais ce dernier - de rang cardinalice et très puissant sur le plan financier - avait toujours refusé d'obéir et d'obtempérer. C'est finalement sous la pression médiatique du scandale qui a explosé aux États-Unis - car les faits sont exacts - que François a fini par faire appliquer la mesure, le 28 juillet 2018, retirant à McCarrick son titre de cardinal et lui imposant une vie de pénitence.

 

La troisième thèse de Mgr Vigano revient à dénoncer l'existence d'un «réseau homosexuel» dans le clergé catholique, dont certains prêtres et prélats seraient «actifs», soutenus par d'autres prélats «progays» qui travaillent à «subvertir la doctrine catholique» en ce domaine.

» LIRE AUSSI - Pédophilie: la lente prise de conscience de l'Église

Quatrième thèse, l'ancien nonce assure que la politique de nominations des évêques aux États-Unis est dictée, selon lui, par McCarrick selon un critère simple. Vigano l'aurait aussi entendu de la bouche du Pape: «pas d'évêque de droite» car ils seraient «idéologisés», mais plutôt «des pasteurs». Vigano rapporte aussi cette étrange consigne (p. 6 du document, dernier paragraphe) ajoutée par François: «pas d'évêque de gauche», précisant «quand je dis de gauche, je veux dire homosexuel». Selon Vigano, ce propos a été tenu le 23 juin 2013, lors d'un tête-à-tête dans l'appartement du Pape à Sainte-Marthe, où le nonce l'informait de la gravité de l'épaisseur du dossier McCarrick.

Par la stratégie du silence - grand classique de défense au Vatican -, le Pape entend ne pas donner d'importance à ce document. Au silence qui devrait durer, il a ajouté un subtil dénigrement en suggérant que ce texte «parle de lui-même», ce qui le dévalorise a priori.

Le Pape a aussi utilisé une méthode psychologique de retournement pour calmer les journalistes. Il les a pris à témoin, leur demandant de lire le texte pour se faire une opinion et de lui en faire part! Leur assurant d'ailleurs que «cela leur ferait du bien» en pariant sur leur «maturité» professionnelle… Deux contre-feux classiques ont été aussi allumés dans les milieux du Saint-Siège, cette fois contre la personne de Mgr Vigano: sa sensibilité «conservatrice» opposée à la ligne du pape François, son arrogance personnelle et sa morgue. »

Ref. Les silences du pape face au rapport qui le met en cause

JPSC

Cela suscite le commentaire suivant de la part de notre ami Jean-Pierre Snyers :

Mgr Vigano-Pape François: qui ment?

Admettons que vous soyez accusé par la police d'avoir commis une infraction routière dans une ville ou vous n'êtes jamais allé. Vous ne dites rien ou vous la contestez?  Je transpose. Accusé par l'ancien nonce apostolique des Etats-Unis, Mgr Carolo-Maria Vigano (à ne pas confondre avec un autre prélat portant le même nom), d'avoir couvert Mgr McCarrick (ancien archevêque de Washington) coupable d'abus sexuels, tout ce que le pape actuel trouve à dire c'est "pas de commentaires". Stratégie du silence! Tout au plus, une petite phrase à l'égard de l'homosexualité, dont on peut se demander si elle n'est pas une manière de faire diversion, de détourner l'attention des médias à l'égard de l'accusation gravissime qui le concerne. Qui ment? Un prélat qui, dans une lettre de 11 pages, détaillée, précise et contenant une multitude de faits contrôlables, aurait choisi de libérer sa conscience, de briser une omerta, ou un pape qui ne trouve pas le moindre mot pour contester ce que dit ce prélat? Pourquoi le pape François n'a t-il pas démenti formellement les accusations qui sont formulées contre lui? Si elles ne sont que grotesques, infondées, inventées, pourquoi ne déclare t-il pas qu'elles sont fausses et que son auteur mérite d'être attaqué en diffamation? Une chose est sûre: en ne disant rien, en ne niant pas (preuves à l'appui) ce que qu'écrit Mgr Vigano, il laisse l'Eglise en désarroi, il renforce ceux qui la considèrent comme une mafia et donne une image désastreuse de l'institution qu'il représente.  

Jean-Pierre Snyers (Montforêt 19, 4190 Ferrières, Belgique) Adresse blog: jpsnyers.blogspot.com

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