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Sodoma : un chantage qui ne réussira pas

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D'Aline Lizotte sur le site "Smart Reading Press" :

«LA DAME PARLE TROP» : RÉFLEXION CRITIQUE SUR «SODOMA»

Objet d’une campagne de presse orchestrée de main de maître, le livre de Frédéric Martel, Sodoma, tombe à point nommé, le jour même de l’ouverture du sommet pour la protection des mineurs au Vatican. Cette enquête de quatre ans se présente comme la révélation d’un système intra-ecclésial schizophrène, conjuguant hypocritement homosexualité et homophobie. Mais que vise-t-elle réellement ? Aline Lizotte nous éclaire sur son objet véritable.

Au début de son livre Sodoma1, l’auteur cite Shakespeare dans Hamlet : «The lady doth protest too much, methinks2». Frédéric Martel traduit : «La dame parle trop» ; elle révèle ce qu’elle voulait cacher. Cette remarque de Shakespeare fait la trame de tout son livre : ceux qui parlent trop contre l’homosexualité manifestent ce qu’ils veulent cacher, leur propre vie intime. Ce sont des hypocrites, comme l’était Gertrude, la reine mère adultère et assassine.

Mais l’argument se retourne contre Frédéric Martel : il parle trop ! Que révèle cette logorrhée ? Il n’est pas le seul à trop parler : le 23 juillet 2010 paraissait, à Rome, dans la revue Panorama3, un long article de Carmelo Abbate, «Le notti brave dei preti gay4» (Les bonnes nuits des prêtres gays). Cet article devint plus tard l’objet d’un livre, Sex and the Vatican, viaggio secreto nel regno di casti, paru aux éditions Piemme en 2011. En 2012 en a paru la traduction aux éditions Michel Lafon : Sexe au Vatican. Enquête sur la face cachée de l’Église, traduit de l’italien par Joseph Antoine.

Vraiment, la dame parle trop ! Tous les dix ans, les groupes gays ont besoin d’attaquer le Vatican. Qu’est-ce qui explique ce prurit ? Pourquoi ont-ils tant besoin de nous dire qu’ils sont heureux et libérés ? Qu’est-ce qui se cache derrière cette protestation de bonheur ? Oui, la dame parle trop !

UNE ENQUÊTE TROP BIEN MENÉE

L’enquête de Frédéric Martel est, en un sens, bien menée. Quatre ans d’interviews, un auteur assisté de quatre-vingts auxiliaires députés à la recherche, 14 avocats, des traductions en huit langues. Pour le coup, on y a mis toutes les ressources médiatiques. Pourquoi tant de paroles, tant d’argent investi ?

Frédéric Martel ne cache pas son homosexualité. Il n’avoue rien ! Il ne proclame rien ! Mais que cache cette enquête ? Dénoncer le ou les lobbies gays au Vatican ? C’est un secret de polichinelle ! On sait qu’il y a des prêtres homosexuels actifs au Vatican, comme il y a des fonctionnaires homo dans tout État, des homosexuels dans toutes les corporations artistiques. On ne le cache plus, c’est devenu un fait sociétal.


Les fausses attaques contre l’Église existent au pire depuis Néron, qui accusa les chrétiens de Rome d’avoir mis le feu à Rome.


Alors, pourquoi la dame parle-t-elle ? Pour faire taire l’Église ? Pour mettre à nu son hypocrisie ? Elle continuerait à croire et à enseigner que l’homosexualité est un désordre grave, alors que 80 % des membres de la Curie seraient des homo-actifs ! Alors, l’Église serait un monstre d’hypocrisie ! Mais les fausses attaques contre l’Église existent au pire depuis Néron, qui accusa les chrétiens de Rome d’avoir mis le feu à l’Urbs, bon prétexte pour les livrer aux bêtes sauvages ! Et depuis, cela n’a pas cessé ! Le refrain change, mais la chanson demeure !

 

L’enquête est trop bien menée. Quand on fait une recension même un peu sommaire de ceux qui entrent dans la radiographie de Martel, on commence peut-être à comprendre. Martel ne fait pas comme Camelo Abbate : il ne décrit aucun comportement sexuel – ce qui rendait certaines pages d’Abbate dégoûtantes – ; il renonce à décrire les actes de ceux dont il «révèle» l’homosexualité. Sauf peut-être la description un peu trop colorée de Roma Termini (pp. 152-172), lieu favori des rencontres homosexuelles des ecclésiastiques prêtres et évêques et de leurs prostitués nord-africains. Nous apprend-il quelque chose ?

Termini, avec son sauna homo – le plus grand au monde – doit bien recevoir quelques ecclésistiques ? Martel nous épargne, en fait, ces descriptions ludiques. Il cible autre chose. La liste des personnes interviewées est impressionnante. Elle commence par le cardinal Burke et se termine par Benoît XVI et par son secrétaire, surnommé «le Beau Georg» (pp. 500-518), ce qui lui permet de donner en filigrane le titre d’homosexuel sublimé à Benoît XVI, c’est-à-dire d’homosexuel fidèle à la chasteté.

Cette homosexualité tolérable dans l’Église débuterait avec saint Paul (p. 318) et se serait répandue dans l’Église comme une homosexualité chaste, avec ce qu’il appelle le «code Maritain» (pp. 185-223) : une autre forme d’hypocrisie, dénoncée par Martel sous le thème des «amitiés vertueuses». Elle commencerait avec Jacques Maritain, se développerait avec Paul VI et son amitié avec Jean Guitton et Aldo Moro, traverserait le pontificat de Benoît XVI. La cause de cette hypocrisie : la déclaration Persona humana sur certaines questions d’éthique sexuelle5 (29 novembre 1975), qui met en garde contre la masturbation et l’homosexualité, considérés comme de graves désordres. D’où cette règle émise par Martel caractérisant le système de Sodoma : «Les prêtres et les théologiens homosexuels sont beaucoup plus enclins à imposer le célibat des prêtres que leurs coreligionnaires hétérosexuels. Ils sont volontaristes et très soucieux de faire respecter cette consigne de chasteté, pourtant intrinsèquement contre-nature» (p. 209).

Selon cette règle sont concernés par une grande partie des attaques contre les homosexuels dénoncés par Martel : Wilfrid Fox Napier, l’archevêque de Durban ; Antonio María Rouco, l’archevêque de Madrid (p. 400-410) ; Philippe Barbarin, l’archevêque de Lyon (en raison de sa participation à la Manif pour tous, p. 417-421), Robert Sarah, le préfet de la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements (p. 370-381) ; Tarcisio Bertone (comme secrétaire d’État sous Benoît XVI, pp. 384-393 ; 438-448) ; Gerhard Ludwig Müller, ancien préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi (pp. 140-143 ; 147) ; Camillo Ruini (pp. 434-443) et Angelo Bagnasco (pp. 429, 446, 449, 454, 457, 459) comme présidents de la Conférence épiscopale italienne sous Jean-Paul II, pour leur opposition à l’homosexualité et surtout au mariage pour tous.

En France, à part le cardinal Philippe Barbarin, la moisson est faible. Il y a les mensonges contre Tony Anatrella6 (pp. 422-423), contre le cardinal André Vingt-Trois (p. 420) qui, modérément gay friendly, aurait, aux Bernardins, animé un séminaire pastoral pour les personnes homosexuelles, ce qui est faux. Quant à l’actuel archevêque de Paris, Mgr Michel Aupetit, il aurait été violemment contesté par une grande partie de la conférence épiscopale. On l’accuserait d’être trop à droite, trop rigide, trop efféminé (p. 425). Mais… qu’en sait-on ? Avant d’entrer dans le sacerdoce, il a pratiqué la médecine… et on ne lui connaît aucune femme ! N’oublions pas qu’il a été vicaire de la paroisse Saint-Paul et aumônier du Marais, le quartier gay de Paris ! Ne ferait-il pas partie, lui aussi de ces homosexuels vierges qui pratiquent une chasteté contre nature ?


Il suffit d’affirmer, largement et fermement, un enseignement contre toute forme d’homosexualité, pour entrer dans le camp des homosexuels vierges.


La preuve est mince, sinon inexistante. Il suffit d’affirmer, largement et fermement, un enseignement contre toute forme d’homosexualité, qu’il s’agisse d’une doctrine directe comme celle de Persona humana ou d’un combat contre le mariage pour tous, pour entrer dans le camp des homosexuels vierges… Pourquoi ? La chasteté est contre nature ! Ce sont donc ces hommes qui pratiquent l’homosexualité subliminale qui sont contre nature !!!

L’AUTRE CIBLE

La première cible visait les dissidents : ceux qui attaquent l’homosexualité de front et qui sont homosexuels dans l’âme ! Mais il y a les autres. Les autres, ce sont ceux que l’on ne peut s’empêcher de nommer, car l’objectivité de l’enquête serait mise en cause. Par exemple, Mgr Battista Ricca (pp. 81, 160) ; Mgr Krzystof Charamsa (pp. 316-320), Mgr Karadima, évêque d’Osorno, au sud du Chili (p. 259) ; Marcial Maciel, fondateur de la Légion du Christ (p. 285).

Les autres, ce sont encore ceux que l’on ne peut, en aucune façon, suspecter d’homosexualité qu’elle soit vierge ou active, mais dont l’entourage pullule d’homosexuels actifs ou couverts par une puissance financière importante. Il y a surtout l’entourage de Jean-Paul II (pp. 242-250 ; 286-297 ; 314), l’entourage actuel de Mgr Marc Ouellet (p. 116). Comme il est difficile d’attaquer Jean-Paul II comme homosexuel, même d’homosexuel sublime, on attaque son entourage : Mgr Angelo Sodano (pp. 250-253 ; 266), Mgr Alfonso López Trujillo (pp. 321, 326, 330, 333-336, 337, 339, 346), archevêque de Santiago, devenu préfet du Conseil de la famille.

Autrement dit, les attaques contre saint Jean-Paul II sont ciblées ; il s’occupait de tout autre chose que des mœurs de ceux qui travaillaient avec lui, tout en ayant des enseignements très durs contre l’homosexualité tout au long de son pontificat. Il est donc, contre lui-même, une sorte de pro gay, puisqu’il enseigne une doctrine contre nature – la chasteté – contribuant ainsi à faire que la population gay au Vatican s’est accrue et qu’à sa mort, il lègue à Benoît XVI une Église à la tête de laquelle la Curie compte une population de prêtres gays comme elle n’en a jamais eu.


Tout au long de l’enquête, les références au pape François semblent empreintes sinon d’un respect, du moins de cordialité.


Il y a cependant une autre cible, discrètement signalée, le pape François lui-même. Tout au long de l’enquête, les références au pape François semblent empreintes sinon d’un respect, du moins de cordialité. Le pape François est vu comme quelqu’un qui tempère tous ces intégristes de droite, tradis ou conservateurs. La phrase célèbre «Qui suis-je pour juger ?», citée hors contexte, qui fait la différence entre une homosexualité de tendance et une homosexualité active, sert de lien pour expliquer, selon Martel, l’attitude de François.

Mais il y a quelque chose qui sent autrement que la miséricorde. Lorsque Martel raconte le ministère de Bergoglio comme archevêque de Buenos Aires, il met bien en évidence son combat acharné contre le mariage pour tous et ses luttes contre le gouvernement politique de Cristina Kirchner. Mais il montre aussi sa sympathie pour les grands maîtres de la théologie de la libération, Gutierrez et Leornado Boff, le revirement partiel qu’a constitué Aparecida, la grande réunion de l’épiscopat d’Amérique latine qui rejeta l’idéologie marxiste de la théologie de la libération pour adopter une théologie du peuple (theologia del pueblo) qui paraîtrait plus acceptable à Rome ; il met en évidence les luttes avec Rome, avec Jean-Paul II, principalement, avec Sodano et plus tard Bertone (p. 107). Il montre aussi que Bergoglio devait suivre cette ligne en tant qu’archevêque. Mais qu’au fond de lui, le cardinal était favorable aux unions civiles (mariage pour tous). Soudain, après, le conclave de 2005 qui élit Ratzinger, consommant l’échec du cardinal Carlo Maria Martini (pp. 447-448) et le groupe de Saint-Gall, l’attitude de Bergoglio, change. De favorable aux unions civiles, il devient conservateur. Il a des mots très durs envers le mariage des couples de même sexe (p. 108). Il s’oppose à la présidente du pays. Ce n’est plus François. Finalement, il met tout le monde contre lui (p. 109). Et pourquoi ? La phrase de Martel qui termine cette relation du ministère de Bergoglio est le dévoilement de ce qu’il tient caché : «Si Jorge Bergolio avait été favorable au mariage gay, il n’aurait jamais été élu pape» (p. 110).

Ainsi, dans tout ce qu’il nous dit de la Curie, Frédéric Martel, toujours favorable au pape François, ne cesse de le présenter comme celui qui lutte contre l’hypocrisie de la Curie, autant dans son discours aux membres de la Curie (les quinze maladies de la Curie, le 22 décembre 2014, Qui suis-je pour juger ?, le cléricalisme comme cause des agressions sexuelles). Pour Martel, François est le seul pape qui attaque l’hypocrisie de la Curie qui enseigne une doctrine que 80 % des membres ne pratiquent pas et qu’ils ne peuvent pratiquer, parce qu’elle est contre nature !

LA DAME PARLE TROP

Oui, il a bien fallu six cent quatre-vingt-six pages pour nous faire avaler cela, à petite dose. Cela s’injecte goutte à goutte. Car, Martel ne s’en doute pas, il compromet gravement celui qu’il veut mettre en évidence. Si cela correspondait à une attitude profonde chez François, cela serait très grave. Celui qui intrigue pour devenir pape risque l’excommunication, dit la Constitution Pastor Bonus. Saint Thomas, quant à lui, dit qu’il fait un péché mortel !

Cependant, Martel compromet-il François innocemment ? Peut-être pas ! Peut-être lui lance-t-il un avertissement d’une rare amplitude ! S’il changeait d’idée, s’il se mettait à lutter non seulement contre la pédophilie – une lutte qui lui rassemble toute l’Église – mais contre l’homosexualité, ne lui arriverait-il pas la même souffrance, le même discrédit que l’on a fait subir à Benoît XVI ?

Publié le jour même de l’ouverture au Vatican de la réunion de tous les présidents des conférences épiscopales, la vraisemblance de l’avertissement a un certain crédit.

Il y a cependant une chose que Martel ne sait pas : ce chantage n’a jamais réussi dans l’Église, même avec des papes dont la vie morale n’a pas été un exemple vertueux ! Il y a des paroles éternelles qu’il ne peut comprendre, dont l’une garantit l’impossibilité de cette complicité perverse que Martel pourrait envisager : «Je suis avec vous tous les jours jusqu’à la consommation des siècles» (Mt 28,20). Il ne s’agit pas de l’impeccabilité morale, mais de la certitude de la foi. Ce n’est pas l’homosexualité qui serait en jeu, mais le Salut des âmes.

Aline Lizotte

 


1 – Frédéric MartelSodoma, Enquête au cœur du Vatican, Robert Laffont, 21 février 2018, 631 pages.

2 – William ShakespeareHamlet, Acte III, scène II.

3 – Rien à voir avec la revue française Panorama.

4 – Panorama 48, n° 31, 29 juillet 2010, pp. 54-60.

5 – S. Congregatio pro Doctrina Fidei, Declaratio de quibusdam quaestionibus ad sexualem ethicam spectantibus, 29 décembre 1975 : AAS 68 (1976) 77-96 ; texte officiel français dans DocCath 73 (1976), pp. 108-114.

6 – Mgr Anatrella n’a strictement jamais fait l’objet d’aucun procès ni civil ni canonique. Au contraire, il a bénéficié de deux classements sans suite au plan civil, car les faits n’étaient pas constitués. Quant au plan canonique, il n’y a jamais eu aucun procès, mais simplement une enquête qui constatait la totale absence de délit imputable. Cf. le communiqué de presse de ses avocats civil et ecclésiastique du 6 juillet 2018.

Commentaires

  • merci pour cette "mise au point" qui va éclairer plus d'un être "de bonne volonté" !

  • Voltaire disait « Mentez, Mentez ! Il en restera toujours quelque chose ! ». Et il ne faut pas être dupe ! Dans un monde qui préfère le mensonge à la Vérité, l’illusion à la réalité, un tel principe est capable d’anéantir tout le témoignage véritable des « deux témoins » de Ap 13/7 :
    « Mais quand ils auront fini de rendre témoignage, la Bête qui surgit de l'Abîme viendra guerroyer contre eux, les vaincre et les tuer. »
    Puissent les lecteurs du présent blog prendre conscience de ce qui se passe, tirer les conclusions qui s’imposent autant à la raison qu’à la bonne foi et remercier vivement des auteurs comme Annie LIZOTTE et tant d’autres ainsi que les blogs comme Belgicatho sans lesquels nous ne saurions pour ainsi dire presque rien de ce qui se passe puisque la « presse conventionnelle » se garde bien d’en rapporter quoi que ce soit et pratique la rétention d’information ou la désinformation.
    Au sommet de la confusion, de la dérision et de l’illusion, ce qui doit fonder notre certitude et notre espérance de façon indéfectible et inébranlable, c’est que, depuis 6000 ans, la Vérité n’est jamais restée sans triompher sur le mensonge.
    Et plus elle apparaît vaincue, plus elle est prête à triompher. Ce n’est déjà plus qu’une question de mois. Mais il reste à y croire, c’est la preuve et l’épreuve de la foi, c’est maintenant qu’il faut savoir si on croit vraiment en Dieu ou si on doute de Lui.

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