De Hugues Lefèvre sur le site de Famille Chrétienne :
Reconstruction de Notre-Dame : comment l’Église monte la garde
MAGAZINE – Le diocèse de Paris ne veut pas être évincé des réflexions sur la future rénovation de la cathédrale. Deux mois après le drame, il fait le nécessaire pour y parvenir.
Une loi contestée
Dès le 24 avril, un texte pour la restauration de la cathédrale était présenté à l’Assemblée nationale.
• Au Sénat, le texte a été retoqué, les élus fustigeant le principe d’une loi d’exception rédigée dans la précipitation.
• Le 4 juin,la commission mixte paritaire n’est pas parvenue à élaborer un texte commun aux deux chambres. La loi ne devrait pas être adoptée avant fin juillet.
« J’ai été bouleversé par ce que vous venez de nous dire. » Scène inattendue sous les ors du Sénat où Pierre Ouzoulias, sénateur communiste des Hauts-de-Seine et archéologue, n’y est pas allé par quatre chemins pour saluer l’intervention du dominicain et historien Yves Combeau. Le prêtre venait alors de prendre la parole lors d’une table ronde sur les apports des sciences et des technologies à la restauration de Notre-Dame de Paris. Son propos d’historien et d’homme d’Église a fait mouche. L’élu communiste, précisant qu’il est athée, a confessé être d’accord avec le dominicain : la reconstruction de Notre-Dame ne sera réussie que si une réelle attention est accordée aux dimensions cultuelle et spirituelle de l’édifice.
De belles paroles ? La présence à cette audition du Père Combeau, ancien élève de l’École nationale des chartes, n’est pas qu’une simple question d’affichage. Elle est le fruit d’une volonté, notamment de Cédric Villani, le député La République en marche, à l’initiative de la table ronde. « Il a insisté pour qu’un ecclésiastique soit présent », confirme Olivier de Châlus, ingénieur en bâtiment et historien, qui a aidé à l’organisation de cette rencontre. Lui connaît parfaitement Notre-Dame de Paris : il réalise actuellement sa thèse sur l’organisation de son chantier médiéval et était responsable des guides de la cathédrale au moment du drame. « Cédric Villani ne croit pas en Dieu, mais il a conscience de l’importance de ne pas exclure l’Église de l’immense réflexion qui s’ouvre. »
« L’Église a bien joué »
Alors que certains s’inquiètent que l’Église puisse être écartée du chantier du siècle par pur laïcisme, elle est pour l’instant considérée et écoutée. Elle parvient à se faire entendre en étant aux bons endroits, aux bons moments, avec les bonnes personnes, comme au Sénat. « L’Église a bien joué », confirme une source du ministère de la Culture qui explique qu’en n’entrant pas directement dans le débat sur la loi sur la rénovation de la cathédrale et sur la création d’un établissement public associé, elle a fait preuve d’intelligence. « Mgr Aupetit est un pragmatique. Sur la question du futur établissement public, il ne s’est pas posé la question de savoir si c’était l’instance la plus pertinente ou pas. Ce qui lui importait, c’était que l’Église y soit associée en tant qu’affectataire des lieux. C’est ce qu’il a obtenu », raconte ce bon connaisseur du dossier. « En revanche, poursuit-il, s’il est une institution qui a été mise sur la touche, c’est bien le ministère de la Culture avec le vote de cette loi stupide et la création de cet établissement dont personne n’avait besoin ! »