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"Catholiciser" l'écologie ?

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De l'abbé Claude Barthe dans Res Novae sur le site de l'Homme Nouveau :

La « conversion écologique », une énième tentative <br>de se concilier le monde [fr, eng, it]

La « conversion écologique », une énième tentative de se concilier le monde

Depuis qu’ils sont confrontés au monde né de la Révolution, les catholiques ont souvent mis en œuvre des tentatives dite de « contournement » ou de conciliation, consistant à adopter des thématiques propres à des idéologies laïques et à les « baptiser ». Ceux qui s’y livrent espèrent désarmer en quelque manière l’hostilité du monde et ainsi légitimer vis-à-vis de lui le message propre de l’Église, au risque, souvent assumé, d’affaiblir ce message. Dans l’article « Pour une Église verte », l’abbé Perrot analyse l’une des dernières en date, qui pousse fort loin l’atténuation de la spécificité évangélique.

Auparavant, Jean-Paul II, comme le rappelle Jean-Marie Perrot, avait tenté de catholiciser les droits de l’homme. Dans une perspective un peu semblable, il avait aussi présenté une défense risquée de l’encyclique Humanæ vitæ, s’inscrivant dans le courant de la pensée personnaliste, en développant une « théologie du corps » (1). 

On pourrait énumérer bien d’autres exemples plus anciens, comme celui de ces prêtres et évêques – pas nécessairement les plus « progressistes » de l’époque (2) – qui en 1848, animés d’une pieuse illusion, bénissaient les arbres de la liberté en expliquant avec une naïveté confondante que la devise républicaine de « liberté, égalité, fraternité » était d’abord chrétienne.

La période contemporaine présente cependant une caractéristique qui aggrave considérablement ce phénomène de conciliation : il est en somme devenu un être nouveau pour le catholicisme. En effet, les textes fondateurs de ce qu’on a appelé « l’esprit du Concile », à savoir la déclaration Dignitatis humanæ sur la liberté religieuse, le décret Unitatis redintegratio sur l’œcuménisme et la déclaration Nostra ætate sur les religions non chrétiennes laissent entendre que les sociétés religieuses autres que l’Église bénéficient d’une certaine existence surnaturelle imparfaite, voire très imparfaite, mais réelle.

Ces conciliations sont mortifères : ce sacrifice au relativisme moderne (qui se voulait cependant « modéré »), s’est accompagné logiquement d’un relativisme interne. Par l’abandon de la « rigidité » des formulations du Credo au profit d’un enseignement pastoral, c’est le mode même de penser la foi qui a été ébranlé dans ses fondations. Et tout naturellement, de la liberté religieuse posée en principe ad extra, on en est venu à la résurgence interne de ce que Léon XIII avait condamné dans la lettre Testem benevolentiae (1899), à savoir l’introduction « d’une certaine liberté dans l’Église » sur le modèle de la « liberté moderne ». Car en acceptant comme légitime le fondement de la société moderne (« Il faut observer la règle générale de la pleine liberté dans la société, selon laquelle on doit reconnaître à l’homme le maximum de liberté et ne restreindre celle-ci que lorsque c’est nécessaire et dans la mesure où c’est nécessaire »Dignitatis humanae n. 7), l’Église ne peut pas le refuser à ses membres. 

De fait, l’indifférence moderne concernant le poids de la vérité a été intériorisé jusqu’à un certain point par le catholicisme. À parler la langue que veulent entendre les hommes, il cesse de parler celle qui pourrait les sauver. Les actes le démontrent : hier, le 27 octobre 1986, la journée d’Assise, où toutes les religions du monde se sont trouvées comme à égalité à prier pour la paix ; aujourd’hui, le 15 octobre 2020, le rassemblement à Rome de tous les participants d’un « pacte éducatif mondial », vague entreprise humaniste, sans référence chrétienne, pour « une éducation plus ouverte et plus inclusive, capable d’une écoute patiente, d’un dialogue constructif et d’une compréhension mutuelle », dans le but de former des personnes « capables de surmonter les morcellements et les oppositions, et recoudre le tissu des relations en vue d’une humanité plus fraternelle ». Humanisme ou néant verbal ?

Car non seulement l’histoire de ces tentatives de « contournement » a été une longue histoire d’échecs, mais elle débouche logiquement dans l’insignifiance, ce dont on pourrait se réjouir si le message de l’Évangile n’en était pas, par le fait, rendu insignifiant.

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1. Laurent Jestin, « Tentative de conciliation. Les catéchèses sur la “théologie du corps” » (Tu es Petrus, printemps 2018, n. XVIII, pp. 3-10), lequel, parmi les difficultés soulevées par cette tentative, relève ce sophisme : « l’antériorité instrumentale (l’union charnelle donnant la procréation) est transformée en priorité de valeur, de fin. Là encore, la méthode descriptive montre ses limites. Elle rend plus difficile de définir la hiérarchie des fins du mariage : engendrement et éducation des enfants (fin première), soutien mutuel des époux, et grâce du sacrement qui permet aux époux de vaincre les mouvements désordonnés de la chair dans son exercice (fin seconde). »

2. Le futur cardinal Pie, grand vicaire de Chartres, a appelé à bénir l’arbre de la liberté de cette ville.

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