Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Débats - Page 9

  • Cardinal Newman : la primauté de la conscience

    IMPRIMER

    Lu sous la signature de Christian Gouyaud dans le mensuel LA NEF n° 318 Octobre 2019, mis en ligne le 29 février 2024 :

    Avec un siècle d’avance, Newman a développé l’idée de la primauté de la conscience, comme personne à son époque. Explications en suivant le cardinal Joseph Ratzinger.

    "Joseph Ratzinger cite fréquemment le mot de Newman dans sa Lettre au duc de Norfolk (1) : « Si, après un dîner, j’étais obligé de porter un toast religieux – ce qui évidemment ne se fait pas –, je boirais à la santé du pape, croyez-le bien, mais à la conscience d’abord, et ensuite au pape ! » Au-delà de cette boutade, la lettre autant que son auteur – qu’il béatifiera – revêtent une importance particulière pour J. Ratzinger. Rappelons le contexte de cet écrit. En 1874, Gladstone, ancien premier ministre de Grande-Bretagne, fit paraître un article aux accents pamphlétaires et au titre évocateur : « Les décrets du Vatican et le loyalisme civil des catholiques ». Selon Gladstone, les catholiques anglais manqueraient de loyauté envers le Royaume, étant en conscience, déterminés par une puissance étrangère : Rome. Newman répondit à Gladstone par La lettre au Duc de Norfolk, qui est un véritable hymne à la conscience. Pour Newman, les catholiques (anglais) ne se déterminent qu’en fonction de leur conscience, laquelle est la « Voix de Dieu » qui parle en chacun. Newman conférait à la conscience une valeur d’abord religieuse avant que psychologique ou éthique. Elle est cette instance à la fois immanente et transcendante. Si elle est la norme ultime et immédiate de l’agir humain, elle n’est pas pour autant autonome. Non seulement le magistère n’a pas condamné les droits de la conscience mais l’autorité ecclésiale est fondée sur la conscience, que Newman n’hésite pas à appeler « le vicaire du Christ » : « On ne verra jamais un pape, dans un document officiel adressé à tous les fidèles, porter atteinte à la doctrine très grave du droit et du devoir d’obéir à l’autorité divine s’exprimant par la Voix de la conscience. Car, en vérité, c’est sur cette Voix de la conscience que l’Église elle-même est fondée. Si le pape se prononçait contre la conscience, il se suiciderait, il ferait crouler le sol sous ses pieds. » Newman va encore plus loin en attribuant à la conscience les prérogatives du pape : « La conscience est le premier de tous les vicaires du Christ. Elle est le prophète qui nous révèle la vérité, le roi qui nous impose ses ordres, le prêtre qui nous anathématise et nous bénit. » A supposer même que, par impossible, « le sacerdoce éternel de l’Église [vienne] à disparaître, le principe sacerdotal survivrait à cette ruine et se poursuivrait, incarné, dans la conscience ». De là, le toast à la conscience.

    Ratzinger, conscience et Magistère

    En 1991, J. Ratzinger a proposé une réflexion puissante sur le rapport entre la conscience et le Magistère (2). Plutôt que d’aborder la question de la conscience de façon abstraite, le préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la foi préfère partir d’une opinion qui l’a profondément choqué, selon laquelle l’incroyance serait une grâce parce que la conscience erronée permet d’être plus facilement sauvé, dispensant les incroyants du fardeau onéreux de la foi et de ses obligations morales. Cette opinion renvoie à la conception d’un Dieu qui aveuglerait pour sauver et d’une foi qui, inversement, augmenterait la difficulté de se sauver : « La mise à l’écart de la vérité serait plus salutaire à l’homme que la vérité ; ce n’est pas la vérité qui le libérerait, mais au contraire, il devrait s’en libérer. L’homme serait davantage chez lui dans l’obscurité qu’à la lumière, car la foi ne serait pas un don bienfaisant du Dieu de bonté mais au contraire un héritage néfaste. » On peut dire que tout l’effort théologique de J. Ratzinger a consisté à s’insurger contre cette position. La conception qui, considérant la foi et ses obligations morales comme un fardeau trop onéreux quasi-impossible à supporter, préfère laisser les hommes dans leur « bonne conscience » erronée, est, selon J. Ratzinger, sous-jacente à la paralysie de l’évangélisation.

    Lire la suite

  • On ne peut invoquer Benoît XVI pour justifier Fiducia Supplicans

    IMPRIMER

    De Nicola Bux sur InfoVaticana :

    Le théologien Nicola Bux démonte l'article de Tornielli : "Il est trompeur et constitue une falsification flagrante"

    1er mars 2024

    Cette semaine, Andrea Tornielli, responsable des médias officiels du Vatican, est allé jusqu'à comparer le cardinal Victor Manuel Fernandez à Ratzinger.

    Dans un article publié dans Vatican News, le directeur éditorial du Dicastère pour la communication du Vatican insiste sur le fait que Fiducia supplicans "ne change pas la doctrine traditionnelle sur le mariage qui prévoit une bénédiction nuptiale uniquement pour l'homme et la femme qui se marient".

    Or, le père Nicola Bux, ancien consulteur du Dicastère pour la doctrine de la foi et proche collaborateur de Benoît XVI, a écrit un article dans lequel il démonte ce qu'a écrit Tornielli et que nous reproduisons ci-dessous :

    Il n'y a pas de bénédictions non liturgiques

    Vatican News du 27 février 2024 a publié l'article : Fiducia supplicans, non-liturgical blessings and that Ratzinger distinction. Le titre compare la récente Déclaration avec certains passages de l'Instruction Ardens Felicitatis du 14 septembre 2000, promulguée par la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, préfet le Cardinal Ratzinger, dans le but de prier pour la guérison de Dieu. Ce document est né de la nécessité de mettre de l'ordre dans la confusion de ces années concernant les réunions de prière et le charisme de guérison.

    La comparaison faite dans l'article de Vatican News entre les prières mentionnées dans l'Instruction Ardens Felicitatis et les bénédictions de la Fiducia Supplicans est totalement erronée. La prière est une question insistante, comme l'indique le mot lui-même, la bénédiction est une formule d'approbation - bien dite - d'en haut, c'est-à-dire de Dieu. Le bon berger, dont il est question dans l'article, qui ne se donne pas la paix tant qu'il n'a pas retrouvé la brebis égarée, ne va pas la bénir parce qu'elle s'est égarée, mais la prendre sur ses épaules pour la ramener au bercail, non sans lui avoir fait comprendre qu'elle s'est égarée.

    Mais revenons à l'éducation. Dès le titre : Instructio de orationibus ad obtinendam a Deo sanationem (sur les prières pour obtenir de Dieu la guérison), le but est expliqué : invoquer la délivrance du mal corporel et spirituel. On ne peut pas prier Dieu pour confirmer l'état de péché dans lequel on est tombé. En effet, le désir de bonheur inhérent au cœur de l'homme se conjugue toujours avec le désir d'obtenir la délivrance des maladies et d'en comprendre le sens lorsqu'elles sont vécues.

    L'Instruction Ardens Felicitatis est également intervenue pour réglementer la nouveauté croissante des réunions de prière, qui sont combinées avec des célébrations liturgiques destinées à implorer Dieu pour la guérison. Il n'est pas rare que des guérisons soient annoncées, ce qui suscite une attente et un intérêt croissants pour ces réunions. Dans ce contexte, on fait appel à un charisme de guérison douteux. Les réunions de ce type, convoquées pour obtenir des guérisons, soulèvent des questions sur la manière dont l'autorité ecclésiastique les évalue, en particulier en ce qui concerne l'aspect liturgique, qu'elle doit surveiller et réglementer, afin qu'il soit correctement réglé. Dans ce but, l'Instruction introduit la partie doctrinale sur les grâces de guérison et les prières pour les obtenir. Tout d'abord, la signification de la maladie et de la guérison dans l'économie du salut. Dans l'Ancien Testament, le malade qui prie Dieu de le guérir reconnaît que ses péchés lui valent de justes châtiments. Mais la maladie touche aussi les justes, et l'homme en demande la raison à Dieu : le cas de Job est célèbre. Il est une figure de Jésus-Christ, dans la passion duquel, selon l'Apôtre, l'homme peut partager sa douleur et même se réjouir ( Col 1,24) : c'est dans cette mesure que le Nouveau Testament élève la souffrance.

    Lire la suite

  • Bruxelles, 13 mars : Conférence exceptionnelle du cardinal Fridolin Ambongo

    IMPRIMER

    13 MARS | CONFÉRENCE EXCEPTIONNELLE DU CARDINAL AMBONGO (RDC)

    L’UP Sainte-Croix d’Ixelles a l’honneur d’accueillir le cardinal Fridolin Ambongo de Kinshasa pour une conférence à La Cambre, en collaboration avec l’Ordre Souverain de Malte, le Pôle Jeunes XL et les Grandes Heures de la Cambre.

    Quand : Le 13 mars 2024

    Heure : 20h15

    Au programme : Conférence, messe animée par les jeunes et un drink

    Les tickets sont disponibles en ligne.

    ***

    Avant d’être appelé à l’épiscopat, Mgr Ambongo a servi en tant que curé de paroisse et en tant que professeur : Il est également membre profès de l’ordre des Frères mineurs capucins. Consacré évêque en 2004, il a été évêque de Bokungu-Ikela de 2004 à 2016, et administrateur apostolique de Kole de 2008 à 2015, puis administrateur apostolique (2016) puis archevêque de Mbandaka-Bikoro et administrateur apostolique du diocèse de Bokungu-Ikela entre 2016 et 2018, et coadjuteur de l’archevêque de Kinshasa en 2018. Il devient le 1er novembre 2018 archevêque de Kinshasa puis cardinal le 5 octobre 2019. 

    C’est depuis lors l’un des chefs de file parmi les évêques en faveur de la paix nationale. Il s’exprime très régulièrement au Congo sur des causes qui lui sont chères :

    En mai 2016 il accepte d’aller témoigner à La Haye en faveur de Jean-Pierre Bemba accusé par la Cour pénale internationale de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, qui sera acquitté en 2018. Entre 2016 et 2018, il dénonce les tentatives répétées du président congolais Joseph Kabila de repousser les élections au Congo. En 2018, après les violents affrontements consécutifs à la situation politique, il co-signe un texte au nom des évêques déclarant que les prélats « déplorent l’attaque sur la vie humaine » et offrent leurs condoléances aux familles des « victimes innocentes » tuées dans les affrontements.

    Fridolin Ambongo condamne l’exploitation des ressources naturelles et estime que les énergies renouvelables contribuent à atténuer l’impact du changement climatique dans le monde.En mars 2015, il affirme avoir reçu des menaces de mort.

    Enfin plus récemment, alors que le 18 décembre 2023, le Saint-Siège publie la déclaration pontificale Fiducia supplicans, par laquelle elle permet « de bénir « simplement » les couples en situation irrégulière et les couples de même sexe ». Fridolin Ambongo Besungu indique son désaccord dans un courrier du 20 décembre 2023 adressé au Pape.

    ***

    Accéder au site de l’UP Ste-Croix

    Visiter le site du Pôle XL Jeunes

    Aller sur le site des Grandes Heures de La Cambre

    Et enfin le site de l’Ordre Souverain de Malte Belgique.

    ***

    Date / Heure

    Date(s) - 13 mars 2024
    20h15 - 22h00

    Lieu

    Abbaye de la Cambre, 11
    1000 1000 Bruxelles

  • Un groupe de clercs et de laïcs catholiques lance un appel filial demandant le retrait de "Fiducia Supplicans". NOUVELLE MISE À JOUR

    IMPRIMER

    D'Edward Pentin sur son blog :

    Un groupe de clercs et de laïcs catholiques lance un appel filial demandant le retrait de "Fiducia Supplicans".

    MISE À JOUR :

    Depuis la publication de cet appel filial, un évêque, plus de 100 prêtres et des centaines d'universitaires catholiques du monde entier ont ajouté leur signature. Les organisateurs ont eu du mal à suivre les centaines de signataires qu'ils ont reçus, mais une liste complète sera bientôt publiée.

    Parmi les nouveaux signataires figurent l'évêque Joseph Strickland, le Dr Gavin Ashenden (ancien évêque anglican converti au catholicisme), le professeur Josef Seifert, le Dr Janet Smith, le Dr Timothy Flanders (rédacteur en chef de OnePeterFive.com), le Dr Taylor Marshall, le père Janvier Gbénou (connu sous son nom de plume Fr. Jesusmary), Luigi Casalini, rédacteur en chef du blog italien Messainlatino, le Dr Claude E Newbury et le Dr. Claude E Newbury et Dr. Thomas Ward, Professeur John Rao, auteur catholique Leila Miller, Père Donald Calloway, Père Lee Bennett, Père Jerry J. Pokorsky Pasteur, Père Timothy Sauppé, Père Phillip W. DeVous, Père Denis M. Donahue, Père Gerard M. Byrne (Angleterre), Père Eunan Mc Donnell PHD (Irlande), Père Jakub Ostrożański R.C.I., Père K. Krzysztofi (Pologne), Père K. K. K. (Allemagne), Père K. K. (France), Père K. K. (Italie), Père K. K. (Italie), Père K. K. (Italie), Père K. K. (France), Père K. K. (Italie), Père K. K. (Italie), Krzysztof Kukulka OFMConv. (Pologne), Jean-Paul Tidi Makambila (Congo), Gabriel Sukharsky (Ukraine), Viktor Bilous (Ukraine), Michael E. Rodríguez, Edmund A. Castronovo, Carlos Miguel Viego, Ph.D., Dwight P. Campbell, STD, JD, Andre Villeneuve et John P. Lovell.

    **
    Un groupe de 90 prêtres, universitaires et auteurs catholiques ont lancé un appel filial aux cardinaux et aux évêques, leur demandant d'interdire immédiatement l'application de Fiducia Supplicans dans leurs diocèses et de demander au pape François de "retirer d'urgence" ce document.

    Dans une déclaration (texte intégral ici) publiée en la fête de la Présentation du Seigneur, les signataires affirment que la déclaration, qui a approuvé la bénédiction, dans certaines limites, des couples de même sexe et d'autres personnes vivant des relations non conformes à l'enseignement de l'Église, est en "opposition directe" avec la doctrine traditionnelle de l'Église sur le mariage, en dépit de ses affirmations contraires.

    Soulignant les nombreuses conférences épiscopales, confréries de prêtres et autres qui se sont publiquement opposées à la déclaration du Vatican depuis sa publication le 18 décembre, les signataires affirment que "jamais dans l'histoire de l'Église catholique un document du Magistère romain n'a fait l'objet d'un rejet aussi fort".

    En revanche, ils soulignent que le document a été "très favorablement accueilli par les quelques épiscopats et prélats qui, depuis des décennies, préconisent ouvertement un changement de la doctrine sur la moralité sexuelle".

    Les signataires reprochent à la déclaration de proposer une pastorale qui "ne correspond pas à la doctrine", ce qui conduit à enseigner une "doctrine différente". La doctrine traditionnelle de l'Église, soulignent-ils, doit être considérée comme infaillible et immuable puisqu'elle est "confirmée par l'Écriture et la Tradition" et qu'elle est une "doctrine de la loi naturelle, qui ne permet aucun changement".

    Une bénédiction, poursuivent-ils, est un "signe naturel" d'"approbation de ce qui est béni", et ils rejettent les tentatives de la déclaration de différencier un "couple" d'une "union" puisqu'un "couple est un couple en raison de l'union qui lui donne existence". Ils affirment également que l'insistance de la déclaration pour que la bénédiction ne soit pas une cérémonie liturgique "ne change pas la nature de l'acte, puisque le geste central et essentiel demeure".

    De telles bénédictions, avertissent les signataires, transmettent au monde que ces relations sont désormais "acceptables pour Dieu" et que l'Église catholique "a finalement évolué et accepte désormais les unions homosexuelles et, plus généralement, les unions extraconjugales".

    Le rejet généralisé du document dans l'Église est donc justifié, affirment-ils. Ce qui n'est "absolument pas justifiable", ajoutent-ils, c'est que les cardinaux et les évêques "restent silencieux", permettant ainsi l'amplification d'un scandale qui est déjà "grave et public" et dont l'erreur vient du Saint-Siège.

    Surtout, ils avertissent que "les petits, les simples fidèles" sont scandalisés "qui n'ont aucun moyen de s'orienter et de se défendre contre cette confusion".

    C'est pourquoi ils "implorent avec ferveur" les cardinaux et les évêques d'accomplir deux tâches : "Interdire immédiatement l'application de ce document" dans leurs diocèses, et demander "directement" au Pape de "retirer d'urgence ce malheureux document" qui "produit manifestement un grave scandale".

    Le Pape, concluent-ils, a "besoin d'urgence" d'une "correction fraternelle" dans l'espoir de "sauver son pontificat et sa propre personne d'une tache qui pourrait autrement peser sur lui de manière indélébile, non seulement dans l'histoire, mais dans l'éternité".

    ***

    Des clercs et des laïcs catholiques se mobilisent pour demander le retrait de "Fiducia Supplicans"

     

    NOUVELLE MISE A JOUR avec la nouvelle liste de signataires (dont votre serviteur) :

    Additional Signatories, March 1, 2024

    Lire la suite

  • Réforme du conclave : de forts risques de manipulation sur les candidats ?

    IMPRIMER

    Du Messaggero (Franca Giansoldati) :

    Vatican, l'hypothèse d'une réforme du conclave et ceux qui entrevoient de forts risques de manipulation sur les candidats : voici pourquoi

    27 février 2024

    Le pape François va-t-il réformer le conclave ? La rumeur d'une possible modification substantielle des règles d'élection du nouveau pape revient dans l'actualité, mais cette fois-ci, elle n'est pas avancée par des sites et des blogs (bien informés) à tendance conservatrice. En l'occurrence, l'hypothèse est abordée par l'élève préféré d'Alberigo, Alberto Melloni, historien du christianisme et auteur de nombreux ouvrages sur les papes, qui met surtout l'accent sur les risques considérables encourus par le collège électoral à l'heure de l'IA et des algorithmes comme base de détermination des comportements, malgré l'attention croissante des puissances néo-impérialistes pour orienter, manipuler et influencer l'Église catholique du futur, qui, note Melloni, "constitue un antagoniste naturel et un obstacle objectif" aux desseins de puissance de tant de souverainismes, dans une géopolitique de plus en plus traversée par des conflits généralisés et par le déclin rapide du multilatéralisme.

    "L'Église de Rome représente une réalité par nature désarmée mais globale, avec une emprise qui, même réduite par les processus de sécularisation et pas encore adaptée à la société post-séculaire, reste en termes quantitatifs et qualitatifs incomparable à d'autres univers, comme l'univers sunnite, dans lequel se sont enracinées des pulsions terroristes qui nécessitent des temps d'éradication très longs et des élaborations théologiques de cohésion encore embryonnaires aujourd'hui", note Melloni dans la revue Il Mulino.

    Aujourd'hui, en effet, il est possible d'influencer l'élection d'un candidat ou d'un autre par des opérations d'information basées sur le scandale des abus sexuels. De cette manière, même d'excellents candidats peuvent être décrédibilisés. Selon l'historien, des précautions doivent donc être prises pour assurer l'élection de cardinaux qui ne puissent pas faire l'objet de chantage. Il est regrettable que le système électoral actuel contenu dans la constitution Universi Dominici Gregis conduise à la formation de majorités autour du cardinal qui apparaît comme le favori lors des deux premiers tours de scrutin. Les élections papales de 2005 et 2013 en sont la preuve : elles ont duré à peine un jour et demi. Une durée aussi courte introduit cependant une marge de risque élevée avec ces risques de base. Melloni a donc suggéré de changer les règles électorales en introduisant toujours une journée entière de réflexion et de discussion entre les candidats après les scrutins, afin d'alléger la pression médiatique sur le conclave et de "décompresser la tendance des médias à dépeindre le conclave avec les teintes d'une primaire américaine, faite d'astuces, de négations et de constructions idéologiques".

    "Enfin, un allongement du temps permettrait de scinder "l'acceptasne" en deux : lorsqu'un scrutin se termine et qu'un cardinal a obtenu plus des deux tiers des voix, on lui demande publiquement s'il accepte l'élection faite canoniquement ("acceptasne electionem de te canonice factam in Summum Pontificem ??", précisément) et ensuite le nom ; dans un conclave lent, l'élu pourrait disposer d'un temps plus long, même d'une nuit, pour décider et, le cas échéant, se concerter. En outre, la personne finalement élue à la majorité des deux tiers devrait disposer d'une journée entière pour réfléchir et délibérer afin de prendre une décision réfléchie quant à l'acceptation de l'élection", peut-on lire dans le document.

    Au cours des derniers mois, on a appris que le pape avait mis la main sur la constitution Universi Dominici Gregis pour modifier les congrégations générales, les réunions qui précèdent le conclave, et qu'elles pourraient se dérouler non pas avec de nombreuses interventions comme par le passé, mais à la manière de petits groupes de travail, comme cela s'est produit lors du dernier synode, de manière à contenir les voix dissidentes. En outre, le bruit a couru que les cardinaux âgés de plus de 80 ans seraient exclus des congrégations générales et que d'autres figures de référence pour l'Église (par exemple des religieuses ou des laïcs de grande renommée) seraient introduites. L'hypothèse a toutefois été démentie par le plus haut juriste du Vatican, le cardinal Ghirlanda, qui a coupé court en déclarant qu'il n'avait jamais entendu parler d'une telle chose. Le pape François, quant à lui, avait également démenti les informations faisant état d'une éventuelle nouvelle en cours. "Le pape est choisi par les évêques parce qu'il est évêque d'un diocèse, il est évêque de Rome", avait-il expliqué dans le livre-entretien avec les journalistes Francesca Ambrogetti et Sergio Rubin : "L'important est donc que les électeurs soient des évêques, pas des cardinaux. En fait, je pourrais promulguer un décret modifiant les conditions d'accès au conclave et permettre à un évêque qui n'est pas cardinal d'y participer. D'un point de vue dogmatique, il n'y aurait aucun problème. Mais il est clair que si une femme ne peut pas accéder à la prêtrise, elle ne peut pas non plus accéder à l'épiscopat".

  • CLARA Life exprime sa solidarité avec les femmes, les professionnels de santé, et les défenseurs de la vie en France

    IMPRIMER

    CLARA Life exprime sa solidarité avec les femmes, les professionnels de santé, et les défenseurs de la vie en France

    Bruxelles, 29 février 2024 - Face à l'adoption par le Sénat français de la réforme inscrivant l'IVG dans la Constitution française, CLARA Life exprime sa profonde préoccupation. Cette décision, bien qu'elle soit un choix législatif mais immorale d'un pays voisin, renforce notre détermination à soutenir les femmes en difficulté et à protéger la vie dès sa conception.

    Nous réitérons notre engagement à proposer des alternatives à l'IVG en Belgique, en offrant aux femmes enceintes des services d'écoute, d'accompagnement et d'orientation. Nous défendons aussi ardemment les droits des médecins à exercer leur clause de conscience, un principe fondamental de leur éthique professionnelle, malheureusement rejeté par le Sénat français.

    En cette période cruciale, CLARA Life renouvelle sa solidarité avec les femmes, les professionnels de santé, et tous les défenseurs de la vie en France. Nous poursuivons notre mission de promouvoir une culture de la vie, en valorisant chaque existence humaine et en apportant un soutien concret aux femmes et aux familles.

    Dans cet esprit, nous vous invitons chaleureusement à nous rejoindre à la Marche pour la Vie, un événement phare pour la défense de la vie, qui se tiendra à Bruxelles, Place Poelaert, le 21 avril 2024 à 14h. Cet événement sera l'occasion de manifester notre soutien aux valeurs que nous chérissons et de renforcer notre communauté engagée pour la vie.

    Ensemble, faisons entendre notre voix pour la protection de la vie à tous ses stades. Rejoignez-nous dans cette marche pacifique et unie pour un avenir où chaque vie est valorisée et respectée. 

    Pour CLARA Life,
    Wouter Suenens, Président

    Notre mission se poursuit. Mais votre contribution est cruciale. Pour plus de détails sur l'emploi des dons, cliquez iciChaque don renforce notre combat pour la vie et la dignité humaine.

    A QUOI SERVIRA VOTRE DON - INFOS FINANCIERES

    • La Marche a besoin de votre générosité
      L'organisation d'un tel évènement implique d'importantes dépenses. 
    • Nous sommes encore à la recherche de € 6.500. Pour récolter cette somme, nous ne pouvons compter que sur vos dons.
    • Vous pouvez aussi nous aider en nous prêtant du matériel pour le jour de la Marche ou en transférant cet email à un ami qui voudrait nous aider financièrement.

    JE SOUTIENS LA MARCHE POUR LA VIE- Votre don au BE02 7310 4206 5740 (au nom de CLARA Life) -

    MERCI BEAUCOUP

  • Au prochain conclave, la voie semble ouverte aux hommes de compromis ou qui se présentent comme tels

    IMPRIMER

    De l'abbé Claude Barthe sur Res Novae :

    Les ambitions du cardinal Tolentino Mendonça

    Le pape François a porté Vatican II à son maximum. Pour être plus précis, il a rendu l’enseignement moral, qui restait relativement ferme, aussi cotonneux que l’enseignement œcuménique du dernier concile. A-t-il fait un pas de trop dans cette entreprise ? En tout cas Fiducia supplicans a ouvert une véritable crise de légitimité : on a vu des épiscopats entiers (Afrique, Hongrie) se refuser à l’appliquer.

    Divers signes montrent que « le parti bergoglien » est en grande agitation et que les consultations s’y multiplient depuis la déclaration du 18 décembre 2023 du Dicastère pour la Doctrine de la Foi rendant possible la bénédiction de couples irréguliers et de couples de même sexe, déclaration que les stratèges progressistes considèrent comme une faute tactique, celle d’un homme impulsif, d’autant plus impatient que le temps lui est compté. 

    Tout au contraire, du côté conservateur, on estime que cette crise ouvre de nouvelles perspectives. Et pourtant on ne peut en espérer davantage qu’un certain recentrage, l’horizon restant celui d’un conclave où 95 cardinaux, soit nettement plus que les 2/3 des électeurs, ont été nommés par François. Si on s’en tient aux deux catégories énoncées par Benoît XVI en 2005, pour ceux qui acceptent Vatican II, « l’herméneutique de réforme dans la continuité » et « l’herméneutique de rupture », et que l’on considère que Jean-Paul II et Benoît XVI ont représenté la première et François la seconde, un retour à la ligne Wojtyla/Ratzinger ne semble pas envisageable après François. Ce retour, d’ailleurs, ne réglerait pas davantage ce qui n’a pu être réglé hier[1].

    Le bilan d’un pontificat

    Bien sûr l’enjeu des élections à la Sixtine est toujours plus compliqué qu’un choix idéologique binaire. Par exemple, en 2005, le cardinal Ratzinger n’avait pas seulement été choisi comme une sorte de super wojtylien, qui pouvait faire remonter les chiffres des vocations, mais aussi parce qu’il était partisan d’un assainissement moral du clergé, et peut-être aussi, paradoxalement, parce qu’on prévoyait qu’il insisterait moins que son prédécesseur sur l’enseignement d’Humanæ vitæ. La géopolitique joue-t-elle un rôle, plus ou moins inconscient sur les conclaves ? 2005 était le moment où l’Allemagne d’après-guerre, quinze ans après avoir absorbé la RDA, arrivait au faîte de sa puissance.

    Et cependant, le pontificat ratzinguérien a échoué. Outre l’impossibilité de refaire l’unité de l’Église autour de l’« herméneutique de réforme dans la continuité », il n’a pu s’imposer à Rome même : face à une opposition continue et déterminée, Benoît XVI peu enclin à agir avec autorité, n’osant user systématiquement de l’arme absolue des papes, les nominations curiales et épiscopales, démissionna après moins de 8 ans de pontificat. Si bien qu’en 2013, c’était un homme fort que l’on a cherché. Et trouvé ! Évêque depuis 1992, Jorge Bergoglio était en réalité un personnage à deux faces : celle du péroniste, par le fait anticommuniste et donc hostile à la forme marxiste de la première théologie de la libération ; celle du partisan d’une certaine théologie de la libération, qui postérieure à la chute du mur de Berlin, œuvrait pour la libéralisation de la constitution de l’Église, l’éclatement de sa rigidité morale et la promotion d’une théologie écologique. Ce second aspect lui avait permis de devenir, dès le conclave de 2005 où il était arrivé second, le candidat de la ligne du cardinal Martini (même si ce dernier l’appréciait peu). Le cardinal « Janus » a ainsi pu compter en 2013 sur toutes les voix progressistes et recevoir aussi celles de nombreux conservateurs.

    Lire la suite

  • Triste France...

    IMPRIMER

    De Gènéthique magazine :

    IVG dans la Constitution : le vote téléguidé des sénateurs

    29 février 2024

    La tension est palpable à 16h30 au Sénat lorsque l’examen du projet de loi visant à inscrire l’avortement dans la Constitution débute. La pression politique et médiatique des derniers jours pèse sur les épaules des sénateurs, et laisse penser qu’ils ne pourront résister à la vague des promoteurs de l’avortement. Quatre heures de débats suffiront à modifier la Constitution par 267 voix contre 50. Le sujet de l’avortement annihile-t-il tout courage politique ?

    Un ton solennel, un débat qui se veut juridique

    Le garde des Sceaux emprunte un ton particulièrement solennel pour ouvrir le débat, tout en mettant la pression. « J’ai l’honneur de demander au Sénat l’inscription dans notre Constitution de la liberté des femmes de disposer de leurs corps […]. Une démocratie ne peut maîtriser son destin si les femmes qui y vivent ne peuvent maîtriser le leur ». Il joue aussi la carte du plaidoyer juridique, affirmant que le principe d’une Constitution « est aussi de réunir l’ensemble des droits et libertés fondamentales ». Mais encore qu’il est nécessaire d’accorder une valeur constitutionnelle à la liberté de la femme, quand la liberté de conscience ou le principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine contre toute forme de dégradation seraient les seuls à l’avoir. Ou que la « liberté garantie » ne serait pas un « ovni juridique ». Enfin, il veut rassurer : « si je devais résumer cette révision constitutionnelle, je dirais : protection de la loi Veil, pas extension ».

    Philippe Bas (LR) répondra à cet exposé par la défense de son amendement visant à supprimer le terme « garantie » (cf. IVG dans la Constitution : un quasi plébiscite des députés en première lecture). « Les libertés sont garanties du seul fait qu’elles sont inscrites dans les textes constitutionnels. […] Quand on ajoute un mot dans la Constitution, c’est bien pour qu’il ait une portée. […] Si nous ajoutons ce terme “garantie” nous allons susciter chez le juge un travail d’interprétation […] qui pourrait mettre en péril l’équilibre entre les droits de l’enfant à naître et la liberté de la femme d’interrompre sa grossesse » souligne-t-il. Bruno Retailleau (LR) insistera à son tour : « sur le plan juridique, une “garantie” est l’obligation d’assurer quelque chose à quelqu’un. On peut mettre en cause le garant en cas de manquement ». Mais cela ne suffira pas. L’amendement est rejeté par 214 voix contre 104, présageant déjà le vote final.

    Alain Milon (LR) tentera, à son tour, de répondre au garde des Sceaux en défendant la clause de conscience des médecins (cf. « L’inscription de l’IVG dans la Constitution menace la liberté de conscience du personnel médical »). « A l’instar de ceux qui pourraient un jour contester le droit à l’IVG, d’autres pourraient également contester le droit de conscience des professionnels de santé » relève-t-il (cf. IVG : « la disparition de la clause de conscience conduirait des soignants à démissionner »). Mais cette tentative retombera vite à plat, ses pairs la rejetant à 219 voix contre 85.

     Une idéologie qui s’impose : incohérence entre votes et propos

    Les habituels discours féministes sont déclamés. Selon Anne Souyris (Groupe Ecologiste – Solidarité et Territoires) : « En votant la constitutionnalisation de l’IVG, nous gravons dans le marbre “mon corps m’appartient” ». Selon Mélanie Vogel (Groupe Ecologiste – Solidarité et Territoires) « nous choisissons de ne plus jamais revenir en arrière ». Elle se félicite en outre de « faire de la politique en grand et en vrai [avec] Aurore Bergé, Mathilde Panot,… ». Dominique Vérien (UC) se préoccupe quant à elle : « Des réseaux militants s’activent pour remettre en cause ce droit (…) la campagne d’autocollants des anti-IVG sur les vélos, ce n’est pas aux Etats-Unis, c’est en France ! »

    Lire la suite

  • L'identité du prochain pape selon "Demos II"

    IMPRIMER

    De la Nuova Bussola Quotidiana :

    L'identité du prochain pape : notes d'un cardinal

    Deux ans après le texte signé 'Demos' (dont il a été révélé par la suite qu'il avait été écrit par le Cardinal Pell), un nouveau document anonyme, lié au premier, définit les sept priorités du prochain Conclave pour réparer la confusion et la crise créées par ce Pontificat.

    - L'identikit del prossimo Papa (I) II A Profile of the Next Pope (EN) II "Retrato robot" del próximo Papa (ES) II Identität des nächsten Papstes (D) II Identyfikacja następnego papieża (PL)

    29_02_2024

    Le Nuova Bussola Quotidiana publie un document exclusif en six langues, destiné à circuler parmi les cardinaux en vue du prochain conclave et parmi les fidèles comme matière à réflexion sur les priorités de l'Eglise. Le texte a été rédigé principalement par un cardinal qui a recueilli les suggestions d'autres cardinaux et évêques. Ceux-ci ont choisi de rester anonymes pour les raisons expliquées dans la lettre.

    LE VATICAN DEMAIN

    En mars 2022 parut un texte anonyme signé « Demos » et intitulé « Le Vatican aujourd’hui » qui soulevait un certain nombre de questions graves et de critiques à propos du pontificat du pape FrançoisOr, la situation de l’Église depuis la parution de ce texte n’a que peu changé, et certainement pas en mieux. Les pensées ci-dessous visent donc à repartir de ces réflexions originelles pour en bâtir d’autres à la lumière des besoins de l’Église de demain.

    Les dernières années d’un pontificat, quel qu’il soit, sont l’occasion d’évaluer la situation actuelle de l’Église, ainsi que les besoins futurs de l’Église et de ses fidèles. Il est clair que la force du pontificat du pape François est l’accent particulier qu’il a mis sur la compassion envers les plus fragiles, l’aide aux pauvres et aux marginalisés, le souci de la dignité de la création et des problèmes qui en découlent pour l’environnement, ainsi que les efforts pour accompagner ceux et celles qui sont en souffrance et portent des fardeaux insupportables.

    Les limites de ce pontificat sont tout aussi évidentes : un style de gouvernance autocratique et parfois en apparence vindicatif, une incurie juridique, une intolérance envers tout désaccord, fût-il respectueux, et – plus grave encore – une tendance constante à l’ambiguïté en matière de foi et de mœurs qui sème la confusion parmi les fidèles. Or, la confusion engendre la division et le conflit ; elle mine la confiance dans la Parole de Dieu ; et elle affaiblit le témoignage évangélique. Le résultat, aujourd’hui, est une Église plus divisée que jamais dans son histoire récente.

    Lire la suite

  • L'absurdité "genrée" est une absurdité dangereuse

    IMPRIMER

    De George Weigel sur le Catholic World Report :

    L'absurdité "genrée" est une dangereuse absurdité

    C'est ce qui arrive lorsque ce que les spécialistes appellent "l'individualisme expressif" - l'égocentrisme sous stéroïdes - supplante la vision biblique de la condition humaine :

    28 février 2024

    Dean Acheson, secrétaire d'État américain de 1949 à 1953, est enterré au cimetière Oak Hill de Washington. Lorsque j'ai lu récemment que le vingtième successeur d'Acheson, Antony Blinken, avait envoyé un câble sous-titré "Meilleures pratiques en matière d'identité de genre" aux diplomates américains du monde entier, les mettant en garde contre les "messages nuisibles et d'exclusion" véhiculés par l'utilisation de termes tels que "mère/père", "fils/fille" et "mari/femme", j'ai été tenté de me rendre au cimetière d'Oak Hill pour vérifier si la dépouille mortelle du secrétaire d'État Acheson se retournait dans sa tombe.

    Acheson a intitulé son brillant mémoire de 1969 "Present at the Creation" (Présent à la création), ce qu'il était certainement, puisque les initiatives dans lesquelles il a joué un rôle clé, telles que le plan Marshall, l'OTAN et le traité de paix japonais, sont devenues l'architecture de sécurité internationale qui a soutenu la défaite du communisme pendant la guerre froide. Le secrétaire d'État Blinken pourrait-il s'inspirer de son distingué prédécesseur et intituler ses mémoires "Présent à la destruction" ? De quoi, demanderez-vous ? De ce qu'Acheson et d'autres ont fait.

    Pensez à ce qui se passe dans le monde lorsque M. Blinken a envoyé ce câble. Les guerres font rage en Ukraine et à Gaza. L'Amérique latine s'effondre politiquement et économiquement, avec pour conséquence une crise sans précédent des migrants et des réfugiés à la frontière sud de l'Amérique. La Russie construit une arme nucléaire basée dans l'espace qui pourrait éliminer le réseau de communication par satellite de l'Amérique. Les mandataires de l'Iran sèment la pagaille au Moyen-Orient et perturbent le commerce international vital dans la mer Rouge. La Chine poursuit ses tentatives d'intimidation de Taïwan. Les crises de gouvernance en Afrique subsaharienne sont trop nombreuses pour être dénombrées. Le président des États-Unis n'arrive pas à s'entendre avec les présidents du Mexique et de l'Égypte. Le principal candidat républicain à la présidence informe ses admirateurs qu'il dirait à Vladimir Poutine de "faire ce qu'il veut" aux alliés de l'OTAN qui ne consacrent pas 2 % de leur PIB à la défense.

    Et au milieu de tout cela, le secrétaire d'État américain a jugé important d'ordonner à ses diplomates de "rester attentifs aux changements de pronoms et de les soutenir", tout en substituant "vous tous" ou "les gens" à l'expression potentiellement offensante "Mesdames et Messieurs" ?

    Ce n'est pas seulement un non-sens, c'est un non-sens dangereux. Il s'agit d'un dérapage par rapport au véritable travail de diplomatie. Il érode encore la crédibilité américaine aux yeux de Vladimir Poutine, de Xi Jinping et des mollahs apocalyptiques de Téhéran, qui pourraient bien conclure qu'une superpuissance putative obsédée par "l'identité sexuelle fluide" ne constituera pas un obstacle à leurs desseins agressifs. Elle envoie au reste du monde un signal d'insouciance terminale. Elle offense les nations et les cultures souvent qualifiées de "traditionnelles", mais qui sont en fait les dépositaires du bon sens.

    Du point de vue de l'analyste catholique des affaires mondiales, pour qui la politique est toujours en aval de la culture, c'est ce qui se produit lorsque ce que les spécialistes appellent "l'individualisme expressif" - l'égocentrisme sous stéroïdes - supplante la vision biblique de la condition humaine : Il y a des vérités intégrées dans le monde et en nous, y compris la vérité selon laquelle nous sommes un homme et une femme, distincts mais complémentaires, ordonnés à la communion et à la fécondité. Les idées, comme toujours, ont des conséquences, et les idées désespérément défectueuses de la culture woke - le culte de la fausse trinité de Moi, Moi-Même et Moi - ont maintenant corrompu la diplomatie américaine, mettant en danger à la fois notre pays et le monde.

    Comme c'est généralement le cas avec le mensonge, l'idéologie du genre qui infeste actuellement le Département d'État cherche à s'imposer par le pouvoir bureaucratique et l'intimidation personnelle. Ainsi, sous la direction de M. Blinken, le département d'État a décrété un troisième "marqueur" de genre sur les passeports américains pour les personnes qui ne s'"identifient" pas comme homme ou femme ; il a nommé le premier "envoyé spécial des États-Unis pour la promotion des droits de l'homme des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres, queer et intersexuées (LGBTQ+)" ; et il a informé le personnel du département d'État que ceux qui cherchent à obtenir une promotion doivent "faire progresser" la DEI (Diversité, équité et inclusion, au sens où les wokesters entendent ces termes par ailleurs honorables). Il ne s'agit pas tout à fait de l'avenir totalitaire que George Orwell décrivait comme "une botte frappant un visage humain - pour toujours". Mais il s'agit néanmoins d'une coercition au nom du mensonge.

    Un ami ayant un sens aigu de l'histoire, revenant de Rome à Washington via Londres le mois dernier, m'a envoyé un courriel acerbe depuis un salon d'Heathrow, disant qu'il avait l'impression d'aller de Sodome à la chute de Constantinople. Je lui ai conseillé de boire un autre verre, notamment parce que "Rome" est réparable. Mais le câble du secrétaire d'État Blinken suggère que l'analogie entre notre époque américaine et la chute de Constantinople n'est pas complètement farfelue. Et cette nouvelle chute ne sera pas arrêtée par l'un ou l'autre des deux candidats présidentiels narcissiques et âgés qui incarnent, au lieu de la remettre en question, la culture de l'égocentrisme qui tue l'Amérique et entrave notre capacité à contribuer à la construction d'un monde meilleur.

    George Weigel est Distinguished Senior Fellow du Ethics and Public Policy Center de Washington, où il est titulaire de la chaire William E. Simon d'études catholiques. Il est l'auteur de plus de vingt ouvrages, dont Witness to Hope : The Biography of Pope John Paul II (1999), The End and the Beginning : Pope John Paul II-The Victory of Freedom, the Last Years, the Legacy (2010), et The Irony of Modern Catholic History : Comment l'Église s'est redécouverte et a poussé le monde moderne à se réformer. Ses ouvrages les plus récents sont The Next Pope : The Office of Peter and a Church in Mission (2020), Not Forgotten : Elegies for, and Reminiscences of, a Diverse Cast of Characters, Most of Them Admirable (Ignatius, 2021), et To Sanctify the World : The Vital Legacy of Vatican II (Basic Books, 2022).

  • Quel est le rapport du christianisme avec la cancel culture et le wokisme ?

    IMPRIMER

    Du Nuovo Sismografo :

    Culture. Christianisme, cancel culture et wokisme.

    Quel est le rapport du christianisme avec la cancel culture et le wokisme ? C'est la question que pose le théologien Gabriele Palasciano dans son dernier livre publié en France chez L'Harmattan et intitulé Christianisme, cancel culture et wokisme. Quel rapport au passé en société contemporaine. L'ouvrage, préfacé par Noam Chomsky, contient des contributions de plusieurs auteurs. Nous reprenons la présentation du volume sur le site de l'éditeur. 

    Gabriele Palasciano est chercheur en philosophie des religions à l'université de Vienne. Ses recherches vont de la philosophie des religions à l'histoire de la théologie et des cultures.
    ***

    Ce qui est envisagé ici, sur le plan théorique, c'est la perception que les "partisans" de l'annulation de la culture et du travail ont du christianisme en tant que religion associée aux aspects les plus sombres et les plus tragiques de l'histoire : responsable de crimes contre l'humanité, coupable de régression morale individuelle et collective, promoteur d'intolérance et d'injustice - ces dernières étant liées en particulier au colonialisme.

    Cette perception justifierait alors son effacement, notamment par la destruction de ses références artistiques, socioculturelles et intellectuelles.

    Toutes ces critiques radicales adressées au christianisme sont essentiellement analysées selon quatre dimensions : éthique, historique, herméneutique et théologique.

    L'objectif est d'offrir une perspective large et réfléchie sur les questions actuelles concernant l'avenir du christianisme et de la civilisation que le christianisme lui-même a contribué à construire.

    IMG-20240228-WA0056.jpgcliquer sur le texte pour l'agrandir

  • Peut-on réellement consentir à mourir ?

    IMPRIMER

    De gènéthique.org (lettre mensuelle de février 2024) :

    Consentement et fin de vie : consentir à mourir ?

    27 FÉV, 2024

    Alors qu'en France le projet de loi sur la fin de vie devrait être prochainement discuté, même si le calendrier n’est pas clairement fixé (cf. Fin de vie : un calendrier difficile à fixer), Aline Cheynet de Beaupré, professeur de Droit privé à l’Université d’Orléans et spécialiste des sujets bioéthiques, nous éclaire sur la question du consentement face à l’euthanasie ou au suicide assisté. Peut-on réellement consentir à mourir ?

    Lire les questions de fin de vie sous l’angle juridique du consentement met en exergue la profonde complexité du sujet. Consent-on à l’euthanasie pour mourir ou ne plus souffrir ? L’euthanasie est-elle demandée ou proposée ? Les questions sont nombreuses.

    En droit des contrats, le consentement désigne la manifestation de volonté des parties. Cum-sentire c’est « sentir avec », soulignant ainsi l’accord, la conformité ou l’acquiescement à quelque chose. Appliqué à la fin de vie, le chemin simple allant de l’« offre » à l’« acceptation de l’offre », valable en droit des contrats, devient à la fois flou et complexe, mais aussi juridiquement insatisfaisant et malmenant le consentement.

    Consentir par avance ?

    Les évolutions observées à l’étranger en matière d’euthanasie montrent que le « demandeur » peut craindre, ou vouloir prévenir, une souffrance future. Au moment de sa « demande de mort provoquée », il n’est donc pas un patient, mais un « futur potentiel patient » vis-à-vis de pathologies ou de symptômes qui ne sont pas (encore) là. Comment décider par avance d’une situation inconnue, existentielle et changeant notre vision des choses ?

    Selon le Code de la Santé Publique (CSP), les directives anticipées[1] peuvent être rédigées par une personne atteinte d’une maladie grave ou qui « pense » être proche de sa fin de vie, ou par une personne qui « pense » être en bonne santé ou n’est pas atteinte d’une maladie grave. Les deux « modèles » sont prévus pour « le cas où je ne serais plus en mesure de m’exprimer au moment de la fin de ma vie ». La loi Leonetti de 2005 leur a conféré une valeur légale, mais leur statut juridique est imprécis.

    Ces « directives » ne sont en effet pas impératives, et les soignants peuvent ne pas les suivre lorsqu’elles apparaissent « manifestement inappropriées ». Tel fut, par exemple, le cas pour homme demandant non pas qu’on arrêtât les traitements, mais qu’on le maintînt en vie. Au regard de sa situation, la demande a été considérée comme étant « manifestement inappropriée »[2] (cf. Conseil constitutionnel : les directives anticipées pourront être écartées).

    Les « exemples » médiatisés de Line Renaud ou de l’ami de Marina Carrère d’Encausse confirment la complexité du problème. Line Renaud a fait un AVC en 2019, mais aucune directive anticipée n’a été évoquée autour de cet « incident ». Idem pour le compagnon de Marina Carrère d’Encausse. Pourtant, les discours véhiculés dans ces deux « histoires » invitent à des directives à spectre large de « non maintien en vie ».

    En cas de directives anticipées, le rédacteur, qu’il soit malade ou non, n’est pas assisté d’un soignant. S’il est malade, il serait pourtant « bon » que ses « directives » soient « éclairées » par un professionnel. S’il n’est pas malade, il est encore plus « seul » pour prendre des options, gravissimes et vitales, sur des sujets qu’il ignore : la maladie, la souffrance et la mort. Le consentement est dès lors tout sauf « éclairé ».

    Lire la suite