Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

islamisme - Page 8

  • Guerres de religion entre musulmans en Afghanistan. Les plus en danger sont les Ismaéliens

    IMPRIMER

    De Sandro Magister (Settimo Cielo) :

    Guerres de religion entre musulmans en Afghanistan. Les plus en danger sont les Ismaéliens

    Aga Khan

    Les derniers juifs partis, l'unique représentant de la mission "sui iuris" de l'Église catholique rapatrié, les très rares convertis à la foi chrétienne cachés dans les catacombes, dans l'Afghanistan repris par les Talibans, les plus menacés de persécution sont désormais les musulmans qu'ils opposent aux hérétiques, ceux de la branche chiite, les Hazaras, les Ismaéliens.

    Parmi ceux-ci, les moins connus mais les plus menacés sont les derniers, les Ismaéliens. Moins connus en partie parce qu'ils gardent volontairement un profil bas, ne se rendent pas visibles en public, ne s'engagent pas dans des combats militaires. Leurs mosquées n'ont pas de minaret, elles n'élèvent pas le croissant, ni ne font retentir l'appel du muezzin. En fait, elles ne sont même pas appelées mosquées, mais "jama'at khana", maisons de la communauté, et chaque village, même le plus éloigné, a la sienne, qui ne se distingue des autres que par le soin avec lequel elle est entretenue. Les non-ismaéliens n'y sont pas admis. Mais on sait qu'à l'intérieur il n'y a ni chaire ni mihrab orienté vers la Mecque, hommes et femmes y prient ensemble. Le jeûne du Ramadan n'est pas ostentatoire et en général peu pratiqué. C'est une réserve qui appartient à toute l'histoire ismaélienne et fait partie intégrante de sa théologie. En cela, le "batin", le sens interne du Coran, sa vérité cachée, prévaut sur le "zahir", c'est-à-dire son sens ostensible. Mais le "batin" est strictement réservé aux initiés et a pour gardien et interprète suprême l'imam, descendant direct du prophète Mahomet.

    Depuis 1957, l'imam ismaélien est le prince Karim Aga Khan. Oui, il est de la Costa Smeralda, mais pas seulement. Il est au centre de la photo ci-dessus, prise il y a trente ans dans les montagnes de l'extrême nord du Pakistan, à quelques kilomètres de l'Afghanistan et plus précisément de la province afghane du Badakhshan, celle qui est coincée contre la Chine.

    Avec 15 millions de fidèles répartis dans 25 pays, les Ismaéliens constituent la deuxième plus grande communauté islamique chiite, après celle d'Iran. Et la seule région au monde où les Ismaéliens constituent la majorité de la population est située juste entre le Pakistan, l'Afghanistan et le Tadjikistan, dans les montagnes accidentées du Karakoram, de l'Hindu Kush et du Pamir.

    Les Ismaéliens sont menacés de persécution par les adeptes les plus fanatiques de Mahomet, précisément parce qu'ils sont l'autre Islam, si différent de celui qui domine les dépêches de guerre. Un islam tolérant, pluraliste, pacifique. Un islam capable d'accueillir - comme le souhaitait Benoît XVI en 2006 après son discours de Ratisbonne et son voyage en Turquie - "les véritables conquêtes des Lumières, les droits de l'homme et surtout la liberté de la foi et de sa pratique, en les reconnaissant également comme des éléments essentiels pour l'authenticité de la religion".

    Le début des années 90, après le retrait des Soviétiques, a été pour les Ismaéliens des montagnes d'Asie centrale les années du décollage. Jusqu'alors, cette région était l'un des foyers de pauvreté du monde. Un million d'habitants dispersés dans un millier de villages, des montagnes arides, des déserts de sable et de pierres, des parcelles de cultures maigres. Mais là, à partir de la haute vallée de Hunza, au nord du Pakistan, l'Aga Khan Development Network a mis en place un microcapitalisme agricole fait de creusement de canaux d'irrigation, de nouvelles terres agricoles arrachées aux pentes pierreuses, de semences bien sélectionnées, de bétail vacciné, d'épargne systématiquement réinvestie, de petites banques rurales, le tout organisé par les paysans eux-mêmes, hommes et femmes, réunis en organisations villageoises. Et parallèlement, des initiatives dans les domaines de l'éducation et de la santé se sont développées. Des écoles ont vu le jour dans les endroits les plus inaccessibles, en particulier pour les filles, pratiquement exclues de l'éducation auparavant.

    "L'Espresso" en a parlé le 7 novembre 1993, dans un vaste reportage sur le terrain, accompagné de la première interview jamais accordée par l'Aga Khan sur des questions liées à son rôle de chef spirituel :

    > Réseau Aga Khan. Reportage de la haute vallée de l'Hunza
    > L'Aga Khan : "I fondamentalisti sono musulmani da Medioevo" (Les fondamentalistes sont des musulmans du Moyen Âge)

    Lire la suite

  • Le 11 septembre a-t-il changé le monde ?

    IMPRIMER

    De Stefano Magni sur la Nuova Bussola Quotidiana :

    11 septembre : 20 ans après, la capitulation morale de l'Occident

    11-09-2021

    Vingt ans après le 11 septembre, nous nous souvenons du jour "qui a changé le monde", comme l'écrivent de nombreux commentateurs. Mais il faut comprendre, le cas échéant, pourquoi le 11 septembre n'a pas du tout changé le monde. Al-Qaïda est toujours là, Isis est né, le djihadisme est toujours en expansion, même les Talibans, vaincus alors, sont de retour au pouvoir. Que s'est-il passé ? Les États-Unis et leurs alliés n'ont jamais subi de défaites militaires. C'est la politique qui a décidé d'arrêter de se battre. Et elle l'a fait sous l'impulsion de trois véritables puissances de la pensée contemporaine : le matérialisme, le relativisme et le tiers-mondisme.

    11 septembre

    Vingt ans après le 11 septembre, nous nous souvenons du jour "qui a changé le monde", comme l'écrivent de nombreux commentateurs. Mais il faut comprendre, le cas échéant, pourquoi le 11 septembre n'a pas du tout changé le monde. Oussama ben Laden a été tué (le 2 mai 2011), le cerveau de l'attaque du 11 septembre, mais Al-Qaïda est vivant, à la fois comme idéologie et comme mouvement armé. Et il est toujours dirigé par son idéologue, l'Égyptien Ayman al Zawahiri. La galaxie djihadiste est en expansion, pas en recul. En 2001, l'État islamique, né d'une côte d'Al-Qaïda, n'existait pas encore : il a fallu quatre ans (2014-2018) pour détruire son entité territoriale entre la Syrie et l'Irak, mais en tant que mouvement terroriste, il existe toujours et fait du prosélytisme dans tout le monde musulman. En Europe, nous n'étions pas encore conscients du phénomène des agresseurs islamiques agissant de leur propre chef, les "loups solitaires", mais depuis les années 1910, ils sont malheureusement devenus un cauchemar constant pour la sécurité publique.

    L'Occident semble être sur la bonne voie : les Américains viennent de quitter l'Afghanistan, mais aussi les Français se retirent du Sahel (une terre de conquête pour Al-Qaïda depuis la fin des années 1990) et l'administration Biden a promis de quitter l'Irak d'ici la fin de l'année. Mais partout, l'Occident est loin de laisser en place des gouvernements amis luttant contre le terrorisme, mais bien des gouvernements instables (au Sahel), amis de l'ennemi (Irak) ou ouvertement pro-terroristes. L'Afghanistan, où tout a commencé, en est un bon exemple. Les talibans, qui ont accueilli Ben Laden et lui ont permis de perpétrer les attentats de New York et de Washington, non seulement existent toujours, mais sont de nouveau au pouvoir. Vingt ans après le 11 septembre, ils peuvent former leur propre gouvernement, avec un premier ministre figurant sur la liste noire des terroristes de l'ONU et un ministre de l'intérieur recherché par le FBI.

    Et pourtant, le 11 septembre a été le moment où "nos yeux se sont ouverts" à la menace islamique, comme l'a si bien décrit Oriana Fallaci dans son célèbre ouvrage The Rage and the Pride. Pourquoi les avons-nous refermés au cours des vingt années suivantes ? Comme nous l'avons déjà écrit dans ces colonnes, la défaite dans la guerre contre le djihadisme n'est pas militaire, mais politique. Il faudrait, à ce stade, comprendre pourquoi la politique a décidé d'arrêter le combat, tout d'abord aux États-Unis, mais aussi dans les gouvernements alliés européens. Derrière les raisons politiques, il y a toujours de fortes raisons culturelles. Examinons-en quelques-unes : le matérialisme, le relativisme, le tiers-mondisme.

    Matérialisme : les classes dirigeantes américaines et occidentales en général se sont révélées tellement sécularisées qu'elles ne comprennent pas comment fonctionne un mouvement religieux et millénaire tel que les mouvements djihadistes (Al-Qaïda, État islamique et leurs alliés locaux). La démonstration de la mesure dans laquelle les dirigeants occidentaux n'ont pas compris, jusqu'au dernier moment, comment l'ennemi raisonne, se trouve également dans les phrases déconcertantes de Zalmay Khalilzad, l'envoyé de paix américain pour la crise afghane. À la veille de la chute de Kaboul, il a averti les talibans : "Tout gouvernement qui prendrait le pouvoir par la force en Afghanistan ne serait pas reconnu par la communauté internationale". Le secrétaire général de l'OTAN, Anders Fogh Rasmussen, a également dit plus ou moins la même chose. Outre le fait que les talibans ne sont nullement isolés (ils ont le Pakistan et la Chine de leur côté), l'idée même qu'ils puissent être intimidés par la perspective d'un isolement international est ridicule. Les Talibans ont une vision religieuse du monde, ils se préoccupent de l'au-delà et de la manière de conquérir le paradis, bien plus que d'être diplomatiquement reconnus par des États (laïques, donc infidèles) avec lesquels ils peuvent faire des affaires.

    Le monde des experts en relations internationales a toujours privilégié une interprétation matérialiste du conflit avec les djihadistes. Après avoir ridiculisé l'un des rares dissidents, Samuel Huntington, auteur du Choc des civilisations, le monde universitaire a soutenu, par exemple, que l'objectif des Talibans était de représenter la majorité pachtoune en Afghanistan et que l'objectif de l'État islamique était de s'emparer des riches ressources du nord de l'Irak au nom et dans l'intérêt des Arabes sunnites. Comme le note amèrement l'ancien Premier ministre britannique Tony Blair, l'interprétation actuelle est qu'il n'existe pas de menace djihadiste mondiale et qu'il est considéré comme politiquement incorrect de nommer l'islam radical : chaque cause est locale et l'objectif est toujours rattachable à un intérêt matériel quelconque. Le politicien est donc conduit à rechercher des accords locaux, avec des critères purement politiques, sans faire face à aucun défi idéologique ou religieux. Et les djihadistes traitent volontiers, s'ils ont alors la perspective de tromper l'ennemi et de gagner la guerre.

    L'incapacité d'une culture sécularisée à comprendre la cause religieuse de cette guerre est particulièrement évidente face aux "loups solitaires". Si un seul djihadiste décide de mener une action suicidaire pour se tuer et tuer ses victimes "infidèles" ou "apostats", il ne peut en effet être motivé par un quelconque intérêt politique ou matériel. Mais dans ce cas, les médias et les politiciens préfèrent recourir à l'explication psychiatrique. S'il le fait, ce n'est pas parce qu'il est musulman, mais parce qu'il est "fou", avec des diagnostics posés post mortem, immédiatement après le meurtre ou le suicide du kamikaze et sans même vérifier ses antécédents.

    Le relativisme, dénoncé par le pape Benoît XVI comme la dictature (culturelle) de notre époque, est certainement à l'origine d'une grande partie de ce raisonnement matérialiste. Le relativisme empêche le philosophe de distinguer le vrai du faux, et donc aussi le juste de l'injuste, et ne lui permet donc pas d'affirmer qu'un système politique est supérieur à un autre. La seule interdiction qui subsiste concerne le jugement d'une autre culture. Si nous avions adopté le même critère dans les années 30 et 40, nous aurions dû dire que les pays libres n'avaient rien à apprendre au régime nazi, car chacun a son propre système de valeurs. Ce fut le cas dans ce long conflit. Dans un petit épisode, aujourd'hui oublié, le Premier ministre de l'époque, Silvio Berlusconi, a déclaré après le 11 septembre que la civilisation occidentale, attaquée, était "supérieure". Face aux menaces de boycott de ses partenaires commerciaux musulmans et sous une pression médiatique insupportable, Berlusconi a dû se rétracter. Dans un épisode beaucoup plus célèbre, la magistrale conférence de Ratisbonne de Benoît XVI, qui mettait en garde contre le danger de la raison détachée de la foi (en Occident) ainsi que de la foi détachée de la raison (dans le monde islamique), a été attaquée dans le monde entier, provoquant des épisodes de violence anti-chrétienne dans plusieurs pays musulmans (ce qui a indirectement démontré l'utilité de cette conférence). Lors de sa première administration, Barack Obama a supprimé toute référence au terrorisme "islamique" des directives de formation de la police afin de ne pas offenser la religion des musulmans. Obama est allé jusqu'à qualifier l'État islamique de "non-islamique". L'administration Biden va plus loin en indiquant clairement dès le départ qu'elle considère le danger du "suprémacisme blanc" d'extrême droite comme plus grave que la menace djihadiste.

    Le tiers-mondisme (un terme des années 1960 pour désigner l'idéologie marxiste à l'appui des mouvements socialistes nés dans le monde post-colonial) est, enfin, dominant non seulement dans les mouvements antagonistes. La preuve, ici aussi, réside dans la réaction en choeur quasi unanime du monde des ONG immédiatement après le 11 septembre : qui sème le vent récolte la tempête. Quatre jours auparavant, trois mille représentants d'ONG, participant à la Conférence contre le racisme à Durban, avaient présenté une résolution assimilant le sionisme au racisme et demandant une compensation pour les victimes du colonialisme et de la traite des esclaves. Dans une vision du monde où tous les maux proviennent de l'Occident (les États-Unis et Israël en particulier), même l'attaque contre l'Amérique était considérée comme une "réponse" des "pauvres" au monde des "riches". Si le 11 septembre a été une "réponse", il faut en affronter la raison par le dialogue, en essayant d'écouter les raisons de ceux qui ont été exaspérés au point d'en arriver au suicide pour assassiner 3 000 civils américains. Et cette mentalité transversale a lié les mains des politiques à chaque fois qu'il y a eu une réponse militaire au terrorisme. Elle est également à l'origine de la pression exercée sur Israël pour qu'il accorde un État à la Palestine : une perte de temps et d'énergie diplomatique, non seulement parce que les dirigeants palestiniens ont toujours refusé, mais aussi parce que le mouvement djihadiste ne bouge pas uniquement à cause de la Palestine, l'un de ses nombreux fronts.

    Le matérialisme, le relativisme et le tiers-mondisme sont trois puissances de la pensée qui ont finalement conduit la politique à cesser de combattre le djihadisme. Nos opinions publiques, dont l'attention est captée par le Covid, aux Etats-Unis également par les élections les plus contestées de l'histoire récente, le terroriste islamique est devenu le dernier de nos soucis. Si nous avons de la chance, il en sera toujours ainsi. Mais le djihadiste, contrairement à l'homme occidental moyen, peut raisonner en termes religieux universels, n'a pas la même notion du temps que nous, et s'est montré capable de gagner une guerre en vingt ans (une génération). Maintenant, nous semblons collectivement vaincus. Ainsi, un nouveau 11 septembre peut se reproduire.

  • Biden doit accepter de rendre des comptes pour sa débâcle en Afghanistan

    IMPRIMER

    De Ludovic Lavaucelle sur La Sélection du Jour :

    Face à la débâcle afghane, l’Amérique demande des comptes

    27 août 2021

    On a comparé Kaboul 2021 avec Saïgon 1975. Après le double attentat suicide du 26 août aux portes de l’aéroport revendiqué par l’État Islamique (Daesh) – on dénombre 13 morts parmi les militaires américains et au moins 85 victimes civiles – l’épilogue afghan prend un tour cauchemardesque. Un autre épisode dramatique revient hanter l’Amérique : Kaboul 2021 pourrait dépasser le traumatisme de Téhéran en 1979. Les Marines qui essaient de contrôler le chaos aux portes de l’aéroport civil de Kaboul, et ces milliers de ressortissants U.S. et occidentaux qui sont toujours coincés dans le pays, ne sont pas « juste » des otages des Talibans. Ces attaques meurtrières démontrent qu’ils sont aussi des cibles prioritaires pour Daesh, rival des Talibans alliés à Al-Qaeda. La vie de milliers de soldats et de civils occidentaux dépend donc d’une lutte sanglante entre deux groupes terroristes islamistes.

    Jusqu’à mercredi dernier, la Maison Blanche affirmait que la déroute de Kaboul était une réussite historique. Son Chief of Staff (équivalent au Secrétaire Général de l’Élysée chez nous) partageait les tweets de ses amis politiques démocrates qui comparaient l’évacuation de Kaboul avec le pont aérien de Berlin en 1948-1949.

    « Epargnez-nous vos succès ! » implore l’éditorial du Washington Examiner (27 août, en lien ci-dessous). Il est temps que Joe Biden accepte la responsabilité de ce fiasco. On sait que le Secrétaire d’État à la Défense Lloyd Austin, ainsi que le Chef d’État-Major Mark Milley, ont plaidé contre l’évacuation totale des militaires. Mais Joe Biden en a décidé autrement et ils ont exécuté les ordres, d’une manière qui s’avère catastrophique. Le Général Milley aurait sans doute dû passer plus de temps à planifier l’extraction des derniers Américains présents. Était-il plus occupé à lutter contre le « suprémacisme blanc » au sein des forces armées ?

    La crise pourrait s’aggraver. Il y aurait encore entre 7 000 et 11 000 ressortissants américains piégés en Afghanistan, et des dizaines de milliers d’Afghans qui ont travaillé avec les Occidentaux et qui risquent d’être exécutés. L’administration américaine prétendait compter sur les Talibans (qui seraient devenus plus « inclusifs » selon la formule lunaire du ministre français de la Défense Le Drian) pour garantir la sécurité de ses ressortissants. Les attentats démentent cet espoir. Joe Biden a tout fait pour « caresser dans le sens du poil » les Talibans. Il a d’abord circonscrit les opérations militaires à la zone de l’aéroport. Il a ensuite accepté la demande des nouveaux maitres de Kaboul de faire disparaitre la présence militaire U.S. au plus tard le 31 août. Pour finir, il n’a pas su contraindre les Talibans à remplir leur promesse de garder ouvert l’accès à l’aéroport…

    Le Pentagone n’a pas fait mieux. Les chefs militaires, jeudi 26 août encore, s’étaient engagés à continuer la coopération avec les Talibans concernant les questions sécuritaires. Cela n’augure rien de bon pour ceux qui sont toujours sur le terrain afghan. Si Joe Biden n’admet pas qu’il a pris des décisions désastreuses, il devrait au moins placer ses subordonnés face à leurs responsabilités. Le Renseignement n’a pas vu à quelle vitesse le gouvernement afghan, aussi solide qu’un château de cartes, allait s’effondrer. Concernant le commandement militaire : qui a pris la décision sidérante d’abandonner du jour au lendemain la base ultra sécurisée de Bagram pour concentrer les opérations sur l’aéroport civil de Kaboul, qui est indéfendable ? Qui a décidé de faire confiance aux Talibans pour assurer la sécurité autour de l’aéroport ?

    La cote de popularité de Joe Biden a chuté pour la première fois sous les 50% : 55% de désapprobation contre 41%. Seulement 26% approuvent sa gestion du désengagement en Afghanistan – initié par Trump avec un large soutien de l’opinion. Même parmi les Démocrates et les grands médias, les critiques fusent de toutes parts. Quant au Parti Républicain, il demande que soit engagée une procédure de destitution contre Joe Biden. Pour commencer, estime l’éditorialiste du Washington Examiner, le Secrétaire d’État Austin et le Chef d’Etat-Major Milley devraient démissionner.

    Pour aller plus loin : Biden must accept accountability for his Afghanistan debacle : >>> Lire l'article sur : Washington Examiner

  • Afghanistan : débâcle, oui, mais pour qui ou quoi ?

    IMPRIMER

    Une tribune de Jean Duchesne lue sur le site web « aleteia »: l’échec des Américains en Afghanistan est celui d’un universalisme sécularisé.

    Vingt ans après

    On peut certes reprocher à M. Biden de n’avoir apparemment pas prévu que son désengagement amènerait si vite ceux qu’il patronnait localement à capituler pratiquement sans combattre. Mais ce n’est pas lui qui a fourré son pays dans ce pétrin. Il y a presque deux décennies ans que l’affaire a été enclenchée par un de ses prédécesseurs, pour débusquer de son repaire le terrorisme islamiste, et aucun des présidents suivants (dont celui que l’actuel occupant de la Maison blanche a secondé pendant huit ans) n’a su la conclure, de quelque parti qu’il soit.

    En l’occurrence, la faillite n’est pas uniquement celle de M. Biden ni de son « administration » (conseillers, généraux, services de renseignement, analystes, mercenaires, etc.). C’est bien plutôt un démenti infligé à certaines « valeurs » — ou (plus exactement) croyances. Essayons de les passer en revue.

    Lire la suite sur Aleteia.org

  • Un " canal confidentiel " entre le Saint-Siège et les Talibans

    IMPRIMER

    D'Edward Pentin sur le National Catholic Register :

    Le Saint-Siège ferait pression pour des pourparlers avec les talibans afin d'éviter une catastrophe humanitaire

    Les représentants du Vatican n'ont pas souhaité faire de commentaire lorsque le Register les a contactés, mais un journaliste italien a rapporté ce week-end qu'un " canal confidentiel " avait été ouvert entre le Saint-Siège et les Talibans.

    23 août 2021

    CITÉ DU VATICAN - Le Saint-Siège appelle à l'ouverture de pourparlers entre les talibans, les dirigeants politiques régionaux et les pays occidentaux afin d'éviter une catastrophe humanitaire lors du retrait des forces américaines et alliées d'Afghanistan.

    Dans un éditorial publié en première page le 19 août, le journal du Vatican L'Osservatore Romano affirme qu'il "sera bien sûr nécessaire de négocier avec les talibans" sur les questions de migration ainsi que sur "les droits de l'homme et les libertés fondamentales, afin qu'ils accordent à ceux qui ne se sentent pas en sécurité la possibilité de quitter l'Afghanistan". Il ajoute que ces pourparlers "doivent être menés rapidement".

    L'éditorial, intitulé "La responsabilité d'accueillir - la tragédie des Afghans en fuite", appelle la communauté internationale à "agir pour que la situation des réfugiés afghans ne se transforme pas en une nouvelle urgence humanitaire catastrophique". 

    L'article accuse également les nations "qui ont un rôle responsable en Afghanistan" de ne pas avoir prévu une telle urgence, affirmant qu'il est "surprenant" qu'un tel scénario n'ait pas été envisagé - ou pire, que les nations aient été conscientes d'une telle crise probable "et que rien n'ait été fait pour l'éviter." 

    L'article précède l'affirmation, ce week-end, du journaliste et lobbyiste italien chevronné Luigi Bisignani, selon laquelle un "canal confidentiel a été ouvert de manière inattendue entre le Saint-Siège et les talibans pour créer un corridor humanitaire pleinement opérationnel".

    Dans une lettre adressée au quotidien italien Il Tempo et publiée le 22 août, M. Bisignani affirme que, sous l'impulsion du pape François, la Secrétairerie d'État du Vatican et la Congrégation pour les Églises orientales travaillent à un dialogue tripartite avec les talibans, sous la médiation du président turc Recep Tayyip Erdogan. 

    M. Bisignani a déclaré qu'un tel dialogue "pourrait miraculeusement nous aider" à la lumière d'un rapport de renseignement classifié qui circule dans les ministères du gouvernement et qui prévoit une nouvelle vague d'immigration produisant des "scénarios inquiétants" et un risque élevé d'attaques terroristes. 

    La prétendue initiative diplomatique du Saint-Siège fait suite à l'appel du pape François, le 15 août, à prier pour la situation en Afghanistan "afin que le vacarme des armes cesse et que des solutions puissent être trouvées autour d'une table de dialogue." Le pape n'a pas mentionné la crise en cours lors de son discours de l'Angelus du 22 août.

    Le bureau de presse du Saint-Siège n'a pas répondu aux questions du Register concernant l'affirmation de M. Bisignani. 

    L'archevêque Paul Gallagher, secrétaire pour les relations avec les États, et l'archevêque Christophe El-Kassis, nonce apostolique au Pakistan, qui supervise l'Afghanistan en l'absence de liens diplomatiques officiels, n'ont pas non plus répondu aux demandes de commentaires du Register sur l'approche du Saint-Siège, car ils sont tous deux en vacances. 

    Un retrait bâclé

    L'administration Biden a été largement critiquée pour ce que de nombreux critiques considèrent comme un retrait bâclé qui n'a pas respecté l'accord de paix de 2020 entre les talibans et les États-Unis, a entraîné la chute inattendue du gouvernement afghan et a permis aux talibans de prendre le contrôle du pays. 

    Alors que le régime s'emparait de la capitale Kaboul la semaine dernière, des milliers d'Afghans ont cherché à fuir la nation musulmane. Beaucoup d'entre eux se sont dirigés vers l'aéroport de la ville, certains faisant une chute mortelle en s'accrochant à l'extérieur d'un avion militaire américain dans des tentatives désespérées de partir. Selon les rapports, environ 28 000 personnes ont été évacuées du pays depuis le 14 août. 

    Dans une déclaration du 19 août, le président de l'Aide à l'Église en détresse, Thomas Heine-Geldern, a déclaré que l'accord de paix de 2020 n'indiquait pas clairement comment les Afghans qui n'adhèrent pas à la pratique de la charia (loi islamique) des talibans seront traités. Il a également souligné les avantages et les inconvénients de l'approbation et de la reconnaissance internationales du régime islamiste. 

    Si le régime n'est pas reconnu internationalement, il n'y aura pas de "canaux officiels" pour engager le dialogue avec les Talibans sur les questions de droits de l'homme, a-t-il observé. "Le fait que la plupart des ambassades occidentales ferment, et que les observateurs internationaux partent, comme ils l'ont fait en Syrie en 2011, n'est pas de bon augure", écrit Heine-Geldern. 

    D'autre part, il a affirmé que les pays déclarant leur sympathie pour le nouvel émirat "non seulement contribueraient à légitimer les talibans, mais aussi à enhardir les régimes autoritaires du monde entier, en particulier dans la région, ce qui entraînerait des violations croissantes des libertés religieuses dans leurs propres pays".  

    Une telle approbation internationale créerait "un aimant pour les petits groupes islamiques radicaux, créant une nouvelle constellation de factions terroristes religieuses qui pourraient supplanter Al-Qaïda et l'État islamique". Heine-Geldern a prédit que la situation des chrétiens et des autres minorités religieuses "qui souffrent déjà d'oppression" dans la région allait "se détériorer davantage." 

    Dans une déclaration publiée le 23 août, la branche italienne de l'Aide à l'Église en détresse a averti que la menace contre la liberté religieuse en Afghanistan ne vient pas seulement des Talibans, mais aussi de l'État islamique de la province de Khorasan (ISKP), la filiale afghane de l'État islamique, et d'Al-Qaïda. 

    "L'ISKP continue de se consolider, notamment après la défaite d'ISIS en Syrie et en Irak et après le début des pourparlers de paix entre les talibans et l'OTAN", peut-on lire dans la déclaration de l'ACN-Italie. "Différent des talibans, l'ISKP compte dans ses rangs un nombre croissant de jeunes afghans éduqués et issus de la classe moyenne, qui sont rejoints par des groupes de djihadistes expérimentés d'Al-Qaïda." 

    "Nous craignons que la reconnaissance du régime taliban par certains pays n'encourage également la prolifération de groupes islamiques radicaux actuellement plus petits mais capables de se structurer en un réseau terroriste potentiellement capable de supplanter les formations historiques comme Al-Qaïda et l'État islamique", ajoute le communiqué. "En plus de cela, les relations entre le Pakistan, les organisations terroristes présentes en Palestine et dans la province syrienne d'Idlib et le régime afghan, sont particulièrement préoccupantes." 

    Les chrétiens en danger

    L'ACN Italie s'est fait l'écho des préoccupations de Heiner-Geldern, qui craignait que la réintroduction de la charia ne "balaie les quelques libertés péniblement conquises, y compris la très fragile liberté religieuse" et elle a prédit que "tous ceux qui ne partagent pas l'islamisme des talibans, y compris les sunnites modérés, sont donc en danger." 

    Plus de 99 % des 27,6 millions d'habitants de l'Afghanistan sont musulmans ; la plupart sont sunnites et seulement 10 % sont chiites. Selon l'AED, le nombre de chrétiens n'est pas clair, et pourrait aller de 1 000 à 20 000, car beaucoup pratiquent leur foi en secret. En 2018, seuls environ 200 catholiques vivaient en Afghanistan. 

    L'organisme de bienfaisance a rappelé qu'en 2010, les talibans ont tué 10 travailleurs humanitaires accusés de diffuser le christianisme et d'être des espions étrangers. Le groupe aurait également dit aux dirigeants d'églises clandestines qu'ils étaient surveillés, et les inquiétudes se sont accrues quant au fait que des chrétiens puissent être tués, ou que des jeunes filles chrétiennes soient données en mariage à des combattants talibans. 

    "Même avant la prise de pouvoir par les talibans, les chrétiens convertis à l'islam étaient confrontés à l'ostracisme et même à la violence des membres de leur famille", rapporte ACN. "Au 16 août, deux jésuites indiens et quatre missionnaires de la charité attendaient d'être évacués."

    Entre-temps, un groupe protestant clandestin a affirmé le 19 août que les chrétiens afghans avaient fui vers les montagnes "dans une tentative désespérée d'échapper aux talibans qui font du porte-à-porte pour les tuer". Les islamistes ont une "liste de chrétiens connus qu'ils ciblent pour les poursuivre et les tuer", affirme le rapport.

    "La charia des talibans est catastrophique pour les droits de l'homme", écrit Nina Shea, directrice du Centre pour la liberté religieuse de l'Institut Hudson, dans The Epoch Times. "Sans droits fondamentaux, en fait, tout le monde risque d'être arrêté et puni arbitrairement", a ajouté Shea. 

    Le père Barnabite Giovanni Scalese est responsable de la Missio sui iuris en Afghanistan, la seule entité catholique du pays, créée par le pape Jean-Paul II en 2002. En avril, il a exprimé des doutes quant à la capacité des talibans à restaurer un émirat islamique, mais comme beaucoup, il n'a pas non plus prédit la chute du gouvernement afghan. 

    S'adressant au Register la semaine dernière, le père Scalese a déclaré que le pays traversait un "moment très difficile" mais n'a pas voulu en dire plus en raison de la sensibilité de la situation. 

    Il a ajouté : "La seule chose que je peux vous dire, c'est de prier pour nous".

  • Les chrétiens d'Afghanistan : une situation alarmante

    IMPRIMER

    De Timothée Dufour sur le site du Figaro Vox :

    «Il y a aussi des chrétiens en Afghanistan et ils risquent tous la mort !»


    La situation des chrétiens afghans, qui était déjà très préoccupante alors que les Occidentaux étaient présents dans le pays, devient alarmante avec le retour des talibans au pouvoir. Le risque de mort auquel ils sont confrontés réclame de la communauté internationale une vigilance permanente quant aux gestes des nouvelles autorités afghanes à leur égard.

    «Les attaques contre les chrétiens sont susceptibles d'augmenter dans la région alors que l'avancée rapide des talibans enhardit les extrémistes», soulignait l'organisation de défense des chrétiens persécutés Release International dans un article du 16 août dernier, qui prévient que «toute personne identifiée comme chrétienne pourrait être tuée».

    À ce jour, le porte-parole du mouvement taliban Zabihullah Mujahid a affirmé, sans convaincre la communauté internationale, que «les femmes auront des droits, dans le cadre de la charia», lors de cette première conférence de presse après leur arrivée au pouvoir. Aucun de ses propos ne donnait la moindre assurance quand aux minorités religieuses en Afghanistan, notamment la communauté chrétienne afghane.

    La situation des chrétiens estimés à quelques milliers de personnes était déjà inquiétante en Afghanistan où le christianisme, comme le rapporte Eusèbe de Césarée, serait arrivé avec les apôtres Thomas et Bartholomée au IIe siècle après J.-C. , soit six siècles avant la naissance de l'islam.

    Même pendant la présence occidentale, le blasphème, l'apostasie et le prosélytisme des non-musulmans étaient déjà considérés comme des crimes.

    Timothée Dufour

    La constitution afghane adoptée en 2004, rédigée avec l'aide d'un «éminent juriste français», comme l'avait relevé non sans fierté le gouvernement français dans une réponse à une question parlementaire publiée le 8 juillet 2004, se voulait certes rassurante. «La sainte religion islamique est la religion de la République Islamique d'Afghanistan. Les adeptes des autres religions sont libres, dans les limites de la loi, d'exercer et de célébrer leurs rites religieux», précisait le texte constitutionnel. Tel n'était hélas pas le cas dans la réalité : le blasphème, l'apostasie et le prosélytisme des non-musulmans étaient déjà considérés comme des crimes.

    Les organisations internationales avaient très vite pointé du doigt la situation difficile des chrétiens afghans, dont l'organisation Portes Ouvertes, une ONG qui œuvre dans plus de 60 pays pour soutenir les chrétiens privés de liberté religieuse et souffrant de persécution. Elle soulignait combien il était «impossible de vivre ouvertement en tant que chrétien en Afghanistan». Les prises de position d'élus afghans avaient confirmé le durcissement de leur situation, comme en témoigne un parlementaire afghan qui, le 9 septembre 2013, avait demandé que les musulmans qui se convertissent au christianisme soient mis à mort, en vertu de la charia, le droit islamique.

    La Cour européenne des droits de l'homme avait relevé la situation dramatique de la communauté chrétienne dans un arrêt du 5 novembre 2019. Les juges européens s'étaient opposés à une mesure d'expulsion décidée par la Suisse au motif que les personnes converties au christianisme, ou même simplement soupçonnées de l'être, «sont exposées à un risque de persécution qui peut prendre une forme étatique et conduire à la peine de mort».

    Dans ce contexte, quels changements la communauté chrétienne peut-elle espérer avec l'arrivée des talibans au pouvoir, vingt ans après avoir été chassés de Kaboul ?

    Les chrétiens afghans qui devront plus que jamais vivre leur foi dans l'ombre ne s'attendent pas à un simple durcissement de leurs conditions de vie, mais à une mort certaine, annoncée par avance.

    Les talibans revendiquent une application rigoriste de la charia dans la vie quotidienne, dont l'objet est de réislamiser les mœurs, la justice et l'ensemble des droits et des devoirs tant individuels que collectifs des individus.

    Leur sort est déjà connu au regard des années où les talibans étaient au pouvoir, entre 1996 et 2001, période pendant laquelle la loi islamique la plus stricte a été promulguée, interdisant jeux, musique, photographies, télévision. Les femmes n'avaient plus le droit de travailler, les écoles pour filles étaient fermées, les mains des voleurs étaient coupées, les chrétiens exécutés en public, les homosexuels écrasés sous un mur de briques, les femmes adultères lapidées à mort.

    Les témoignages récents confirment l'horreur réservée à la communauté chrétienne.

    Timothée Dufour

    Les témoignages récents confirment l'horreur réservée à la communauté chrétienne. «Les chrétiens risquent la trahison, même de la part des membres de leur propre famille», souligne l'article de Release International évoqué plus haut. Parmi les témoignages que l'on peut lire sur Twitter, l'auteur américaine Mindy Belz relaie les propos alarmants d'un responsable d'églises de maison en Afghanistan : «Une personne qui travaille avec les réseaux d'églises de maison en Afghanistan rapporte que ses dirigeants ont reçu hier soir des lettres des talibans les avertissant qu'ils savent où ils sont et ce qu'ils font».

    Les anciens maîtres du pays n'ont donc pas changé d'état d'esprit depuis la période 1996-2001, en tout cas dans leur interprétation de la charia à l'égard des chrétiens.

    Avant l'arrivée des talibans, l'Afghanistan était déjà le deuxième pays où les chrétiens sont le plus persécutés, selon l'Index mondial de persécution 2020, publié par Portes ouvertes. Demain, l'Afghanistan sera très certainement au coude-à-coude avec la Corée du Nord pour la première place de ce classement.

    «Non, les talibans n'ont pas changé de visage. Ils sont encore plus féroces. L'un de leur moteur, c'est la fracture sociale qui scinde la société afghane en deux», comme l'a rappelé Victoria Fontan, rectrice de l'Université américaine d'Afghanistan et spécialisée dans l'éducation, dans des pays en crise.

    Dans l'immédiat, nous ne pouvons que répondre présent au cri du cœur du Père Giovanni Scalese au micro de Radio Vatican, missionnaire barnabite d'origine italienne : « Priez, priez, priez pour l'Afghanistan ».

  • L’Afghanistan : un réservoir de djihadistes en puissance

    IMPRIMER

    De Sébastien Lignier sur le site de Valeurs Actuelles :

    Alexandre del Valle : « L’Afghanistan est un réservoir de djihadistes en devenir »

    Le géopolitologue Alexandre del Valle revient sur l’idéologie complexe qui anime les talibans, redevenus maîtres de l'Afghanistan depuis le départ des troupes américaines. L’essayiste critique la politique occidentale et rappelle l’importance de contrôler rigoureusement la future vague migratoire. Entretien.

    Alexandre Del Valle. Cela fait déjà plusieurs mois que les talibans contrôlent la quasi-totalité du pays, mais ils n’avaient pas encore repris Kaboul. Ils attendaient le départ définitif des Américains, qui avait été repoussé à fin août. Tout le monde savait que cela allait arriver. Personne parmi les experts et les décideurs ne peut affirmer que la conclusion de cette guerre est surprenante. Évidemment, il y a encore eu beaucoup de mensonges. Notamment des déclarations de dirigeants occidentaux qui insinuaient que les Talibans n’oseraient pas reprendre la capitale. En vérité, on sait très bien que ce départ qui, comme en Irak, a été effectué sans “service après-vente”, était en somme un feu vert adressé aux talibans. Un signal envoyé pour dire qu’on avait collectivement accepté, sans le dire, qu’ils redeviennent les maîtres du pays. Et d’ailleurs, les négociations de Doha ont été plus ou moins dans ce sens. Il y a eu des négociations russes avec les talibans qui ont été dénoncées, hypocritement, par les Occidentaux. Alors qu’au même moment, depuis 2017, les Américains eux-mêmes avaient entamé des discussions dans cette perspective. Notamment avec le Qatar, qui a servi d’intermédiaire pour trouver un accord permettant de replacer les talibans au pouvoir. Tout cela était écrit. Et tout cela était connu, prévisible et absolument pas surprenant.

    De nombreuses personnalités politiques s’inquiètent d’un nouvel essor du djihadisme, alors qu’Al-Qaïda a soutenu officiellement cette semaine le retour des talibans au pouvoir. Quels sont les liens entre les deux organisations ?

    Il y a plusieurs tendances au sein des talibans. Il y a une tendance que j’appellerais islamistes-nationalistes qui n’est pas internationaliste-califaliste. Et puis il y a une autre tendance, plus liée à la branche pakistanaise d’Al-Qaïda cette fois, qui adhère elle à un projet califal mondial. C’est ce genre de division à l’intérieur du mouvement qui en fait toute sa complexité. Au départ, les talibans étaient exclusivement intéressés par la zone afghane, en se greffant sur l’ethnie des Pachtounes, majoritaire dans le pays. Mais depuis l’alliance avec Oussama ben Laden, et parallèlement à l’expansion de la branche pachtoune pakistanaise des Talibans, ils ont pris le pouvoir en 1996 en cohabitant avec Al-Qaïda. A l’époque, il y avait eu des alliances voire même des mariages mixtes entre clans Arabes et clans talibans dans toute la zone Af-pak ! Il y a eu une sorte d’hybridation d’une partie des talibans, la branche internationaliste pro-Al-Qaïda et haqqani, mais pas de tous, car d’autres sont restés méfiants vis-à-vis du jihadisme internationaliste. Ce n’est pas cette partie non-négligeable pro-Al-Qaïda du mouvement qui a négocié avec les Américains et les Qataris. Ils ont négocié avec la branche plus traditionnelle des talibans, qui veut reprendre le pouvoir en Afghanistan mais qui n’a pas envie de participer au djihad mondial, afin de ne pas le payer par une intervention militaire américaine comme à l’époque du Mollah Omar en 2001.

    Depuis la prise de Kaboul, les talibans multiplient les messages “positifs” sur le respect des droits des femmes, sur la liberté de la presse ou encore sur l’accès à l’école pour les jeunes filles. Tout cela est-il vraiment compatible avec la charia que le mouvement veut instaurer ?

    C’est possible. Tout est une question d’interprétation de la charia elle-même. Cette dernière est une jurisprudence qui reprend des dispositions du Coran, temporelles et spirituelles, et qui ajoute à cela la tradition des hadiths, qui sont également des sortes de jurisprudences, puisque ce sont les commentaires des propos qu’aurait tenus Mahomet. La charia ne veut donc rien dire seule. Elle peut être interprétée de mille manières. Même une charia très radicale-wahhabite, comme en Arabie Saoudite par exemple, peut être appliquée à la lettre. Cela donne alors Daesh, avec des décapitations, des crucifixions… Si elle est appliquée de manière un peu plus “douce”, vous vous retrouvez avec le Qatar, qui a le même islam que les wahhabites de l’Arabie Saoudite, mais qui l’applique de manière rigoriste mais moins fanatique. Et encore une fois, la tendance idéologique qui a négocié avec les Américains à Doha est celle qui prétend appliquer une version dite classique de la charia, qui se rapprocherait de ce que l’Arabie Saoudite pratiquait sur son sol avant l’arrivée de Mohammed Ben Salmane (MBS) au pouvoir.

    Ça peut paraître surprenant pour nous, mais pour un Afghan moyen de 50 ou 60 ans, qui a une vision clanique de la société et des mœurs des plus rigoristes, les talibans sont redevenus ce qu’il y a de moins mal.

    Lire la suite

  • Afghanistan : la déroute des démocraties

    IMPRIMER

    A lire sur le blog de Christian Vanneste :

    AFGHANISTAN : LA DÉROUTE DES DÉMOCRATIES ! (I)

    En trente ans, les nations “démocratiques” ont systématiquement anéanti les effets de la victoire obtenue à la charnière des années 1980 et 1990. L’implosion de l’URSS, à bout de souffle, avait soulevé l’idée d’un monde unipolaire tendant vers une fin de l’histoire “heureuse” sous la conduite du modèle américain : la démocratie représentative, l’Etat de […]

    LIRE LA SUITE

    AFGHANISTAN : LA DÉROUTE DES DÉMOCRATIES ! (II)

    La guerre selon Charlie Wilson est un excellent film américano-allemand réalisé  par Mike Nichols. Son “héros” a suscité le soutien décisif des Etats-Unis aux “combattants de la liberté” afghans contre les Soviétiques. Sa conclusion était lucide : “c’est toujours comme ça avec nous : on vient avec nos idéaux, on change le monde et puis […]

    LIRE LA SUITE

    AFGHANISTAN : LA DÉROUTE DES DÉMOCRATIES ! (III)
    La défaite des Etats-Unis face aux Talibans a deux aspects :  le retour des Talibans au pouvoir en Afghanistan et l’onde de choc qui pourra se propager sous trois formes, d’abord l’islamisme écrasé sous le drapeau de l’Etat islamique pourra inciter ses différentes expressions à reprendre l’offensive ; ensuite, les Etats non-démocratiques se trouveront confortés […]

    LIRE LA SUITE

    AFGHANISTAN : LA DÉROUTE DES DÉMOCRATIES ! (IV)

    La capitulation de la démocratie la plus puissante du monde devant des bandes de fanatiques ne traduit pas seulement l’évolution des rapports de forces sur la scène mondiale, mais révèle le pourrissement interne des démocraties. On brandit l’Etat de droit et la régularité des élections pour faire semblant d’ignorer que nos pays sont surtout des […]

    LIRE LA SUITE

  • Afghanistan: l’inquiétude des chrétiens du Bangladesh

    IMPRIMER

    De Vatican News :

    20 août 2021

    Afghanistan: l’inquiétude des chrétiens du Bangladesh

    Les communautés locales regardent avec angoisse les ouvertures de Dacca aux Talibans ; celles-ci risqueraient en effet de renforcer les groupes islamistes présents dans le pays.

    Après la Chine et la Russie, le Bangladesh s'est également ouvert aux Talibans. Ces derniers jours, le ministre bengali des Affaires étrangères, Abdul Momen, a déclaré aux médias que son gouvernement était prêt à reconnaître le nouveau régime de Kaboul s'il était «soutenu par le peuple afghan». Ces déclarations sont inquiétantes pour l'Église du Bangladesh, notamment en raison des répercussions que cette ouverture pourrait générer dans le pays.

    La crainte, en effet, est qu'elle ne donne une nouvelle impulsion aux mouvements islamistes radicaux liés à Al-Qaïda et à l’État islamique (EI), responsables ces dernières années de divers attentats, attaques et assassinats ciblés contre des missionnaires, des chefs religieux, des blogueurs et des coopérateurs bengalis. «Le Bangladesh a combattu l'extrémisme religieux militant importé par les moudjahidines et les Talibans afghans. Aujourd'hui, leur victoire et le soutien apporté par notre gouvernement au nouveau régime risquent de donner un sérieux coup de pouce aux militants islamistes au Bangladesh», s’inquiète le père Liton H. Gomes, secrétaire de la commission Justice et Paix de la Conférence épiscopale, interrogé par l'agence Ucanews.

    Des préoccupations partagées par le père Patrick Gomes, secrétaire de la Commission épiscopale pour l'unité des chrétiens et le dialogue interreligieux, qui met en garde contre la reconnaissance du nouveau gouvernement taliban. «Personne, pas seulement les catholiques, ne devrait soutenir un gouvernement extrémiste qui n'est bon pour aucune société ni aucun pays», a déclaré le prêtre, rappelant que des milliers d'Afghans tentent actuellement de fuir leur pays par peur des Talibans.

    Des islamistes de plus en plus influents

    Troisième plus grand pays à majorité musulmane au monde -après l'Indonésie et le Pakistan-, le Bangladesh a une longue tradition de modération et de tolérance, bien que l'Islam soit la religion officielle de l'État. Cependant, au cours des trois dernières décennies, les mouvements islamistes ont pris de l'ampleur, appelant à l'introduction de la Charia et d'une loi punissant le blasphème, aspirant à établir un État islamique au Bangladesh. Dans ce contexte, le pays est devenu un terrain fertile pour la propagande d'Al-Qaïda et de Daech, auxquels sont affiliées plusieurs organisations terroristes locales, comme Ansar al Islam Bangladesh, Ansarullah Bangla Team, le Jund al Taweedwal Khalifah et le Jamat ul Mujaheddin Bangladesh.  Les fondamentalistes ciblent les militants des droits de l'homme, les blogueurs, les intellectuels et les musulmans libéraux, mais aussi les travailleurs humanitaires et les missionnaires. Depuis 2013, une cinquantaine de personnes ont été tuées par ces groupes. Parmi les attaques les plus sanglantes figure celle perpétrée le 1er juillet 2016 par le groupe extrémiste New Jamaatul Mujahideen Bangladesh (Neo-Jmb) contre le Holey Artisan Bakery Café à Dhaka, qui a fait 22 victimes. En décembre de la même année, les forces antiterroristes bengalies avaient déjoué un attentat contre une église catholique de la capitale, prévu par la même organisation pour le jour de Noël. 

  • La stratégie militaire occidentale en Afghanistan : une longue litanie d'erreurs

    IMPRIMER

    De Ludovic Lauvaucelle sur La Sélection du Jour :

    Afghanistan : une sortie piteuse après 20 ans d’errements

    « Quand vous êtes blessé, étendu sur une plaine afghane, et que des femmes approchent pour vous couper en morceaux, ayez la force de vous faire sauter la cervelle pour rejoindre votre Dieu comme un soldat ». Nul ne sait si ces mots du poète Rudyard Kipling, qui participa à l’expédition britannique au 19ème siècle, résonnaient dans les oreilles du Président Joe Biden quand il a annoncé, le 14 avril dernier, le retrait définitif des troupes américaines. L’Oncle Sam voulait donner à son départ un avant-goût de victoire. Pensez donc ! La formidable armée afghane comptait 300 000 soldats et 30 000 membres de forces spéciales bien équipées. Le mois dernier, le même Président Biden déclarait qu’il était « très improbable de voir les Talibans prendre le contrôle du pays ». La stratégie US, explique David Loyn pour The Spectator (article en lien ci-dessous), était de laisser les forces afghanes contenir les Talibans pendant qu’un accord de paix honorable serait négocié.

    Les Américains n’ont rien vu venir ou rien voulu voir. Pourtant, les soldats afghans étaient éparpillés dans des bastions. Ils étaient mal nourris, rarement payés. Les munitions et le carburant disparaissaient régulièrement avant de les atteindre. Des unités entières étaient composées de « fantômes » dont les salaires étaient empochés par les officiers supérieurs. Naïfs ou cyniques, les Américains étaient décidés à partir coûte que coûte. Les hélicoptères de l’US Army évacuent maintenant les personnels de leur ambassade comme ils l’avaient fait à Saïgon en 1975…

    La stratégie militaire occidentale est une longue litanie d’erreurs. George W. Bush, en approuvant le plan de Donald Rumsfeld, a d’abord fait des chefs de guerre tribaux la première force pour contrer les Talibans et Al-Qaeda. Le soutien occidental se limitait à des bombardements aériens tactiques et quelques forces spéciales. Des millions de dollars ont été versés à des malfaiteurs dont la violence pendant la décennie 90 a fait le lit du soutien aux Talibans. Après 2001, ces mêmes chefs de guerre corrompus se sont imposés pour obtenir des postes de pouvoir dans l’administration afghane, une fois les Talibans chassés. Juste avant de fuir, le 15 août, le président afghan Ashraf Ghani a appelé ces chefs de milices à combattre avec l’armée afghane. Appel dérisoire : ceux qui avaient été des parasites pendant 20 ans se sont rendus sans résistance. Le terrain était donc miné avant l’arrivée massive des troupes occidentales. On peut ensuite évoquer le manque d’objectifs militaires, le fourvoiement de la guerre en Irak, l’échec à s’assurer le soutien des Pakistanais… Après les attentats de septembre 2001, les forces internationales ont graduellement augmenté pour atteindre 150 000 hommes et femmes sans qu’une stratégie claire soit établie. D’un engagement limité à des forces locales, on est passé à un « Plan Marshall » dont le but utopique était de transformer une société tribale en démocratie embrassant l’ « American dream ».

    20 ans après, un coût équivalent au « Plan Marshall » d’après-guerre a été dépensé. L’Afghanistan de 2021 est bien différent de celui de 2001. Près de 70% de la population a moins de 30 ans. Ces jeunes n’ont pratiquement pas connu la précédente dictature de ces islamistes pashtouns. Comment ceux-ci vont-ils conserver leur pouvoir sans exercer une violence constante ? Ceux qui étaient vus comme des libérateurs contre les milices mafieuses avant 2001 ont montré leurs limites. Non seulement ils n’ont pas de compétences pour gouverner mais ils se comportent comme ceux qu’ils ont combattus jadis. Ils dédient au moins autant d’énergie au trafic de drogues qu’à l’imposition de la sharia… Les Talibans vont être confrontés à une situation inédite pour conserver le pouvoir.

    Il est frappant de constater la vitesse avec laquelle la Chine a reconnu la nouvelle donne afghane. Comme au 19ème siècle entre Britanniques et Russes, comme au 20ème siècle entre Soviétiques et Américains, l’Afghanistan reste un point clé sur l’échiquier du 21ème siècle. Le Secrétaire d’Etat US, Anthony Blinken, a mis en avant que les « intérêts américains et chinois étaient alignés en Afghanistan ». On imagine mal en effet les Chinois tolérer un nouveau foyer du terrorisme islamique s’y développer alors qu’ils partagent une longue frontière avec l’Afghanistan. Ils auront donc des arguments forts auprès du Pakistan pour garder les Talibans « sous contrôle ». C’est l’espoir (lâche) des Occidentaux.

    Placer ses espoirs dans le pouvoir totalitaire chinois pour éviter un nouveau bain de sang en Afghanistan reste un aveu d’impuissance pour l’Occident. Les Chinois pourraient disposer d’un nouveau pion pour progresser dans la région (face aux Russes et aux Indiens). Un pion qui ressemble à un « fou » dangereux mais aux ordres. Ces « Talibans 2.0 » ont par exemple déjà indiqué qu’ils ne s’attaqueraient pas à la communauté chiite. On voit là l’influence d’un autre allié de la Chine : l’Iran. 

    Ludovic Lavaucelle

    Pour aller plus loin : What went wrong in Afghanistan

    >>> Lire l'article sur : The Spectator

  • Le seul prêtre auprès des dernières brebis d'Afghanistan

    IMPRIMER

    De Marie-Lucile Kubacki sur le site de LaVie.fr :

    Giovanni Scalese, seul prêtre en Afghanistan auprès des dernières brebis

    [Interview] Quelques heures après la prise de Kaboul par les Talibans, le missionnaire barnabite italien Giovanni Scalese a appelé à prier pour l’Afghanistan, pays que de nombreux chrétiens ont déjà quitté. Entretien avec Francisco Silva, supérieur des barnabites à Rome.

    Propos recueillis et traduits de l'italien par Marie-Lucile Kubacki

    16/08/2021

    « Priez pour l’Afghanistan »suppliait le samedi 14 août Giovanni Scalese, dernier prêtre sur place, au micro de Vatican News, le média officiel du Saint-Siège, ajoutant vivre « des jours de grande appréhension, dans l’attente des événements ».

    Dans ce pays où réside une poignée de chrétiens – presque tous étrangers – et où tout converti démasqué risque la mort, l’aumônier, religieux barnabite, et des religieuses assuraient jusqu’ici une discrète présence, tournée vers la charité et le service des plus démunis. Alors que beaucoup sont déjà partis, le supérieur des barnabites, Francisco Silva, à Rome, revient sur cette mission.

    Avez-vous des nouvelles de Giovanni Scalese ?

    Le père Scalese est toujours en Afghanistan, au service de la petite communauté chrétienne restée sur place. Hier soir, je lui ai parlé au téléphone : il est tranquille, serein, même s’il sait qu’il court des risques. À l’heure actuelle, presque tout le personnel de l’ambassade italienne est parti. La situation est assez calme. On craignait quelque chose de plus violent, qui ne s’est pas produit. Le père Scalese m’a dit qu’il resterait à Kaboul tant qu’il n’aurait pas une idée claire de la situation, de son travail.

    Il y a aussi des communautés religieuses sur place…

    Il y avait deux communautés de sœurs : une composée de plusieurs congrégations féminines de différentes nationalités – des sœurs qui peu à peu sont rentrées dans leur pays –, et une communauté religieuse, des missionnaires de la charité, qui s’occupe d’un groupe d’enfants handicapés, exclus de la société. Leur situation est actuellement en discussion ; je ne peux pas trop en parler.

    J’ai dit personnellement au père Scalese, par écrit il y a quelques jours, puis hier au téléphone, que nous comprenons le moment difficile qu’il traverse à la mission de Kaboul, et que nous avons conscience de la responsabilité qu’il porte : le pasteur n’abandonne pas son troupeau tant qu’il y a une brebis. C’est une responsabilité à vivre dans tous les moments, y compris les plus durs et douloureux, avec ceux qui nous sont confiés.

    Je lui ai exprimé mon soutien et lui ai répété hier que toute la congrégation et moi-même sommes à ses côtés, par la prière, la communion quotidienne, afin que la mission et son travail puissent connaître des jours meilleurs.

    D’où vient la mission des barnabites ?

    C’est le pape Pie XI, à la fin des années 1920, qui nous a confié cette mission en Afghanistan. Il a choisi les premiers barnabites à partir là-bas : ils étaient deux au début, puis il n’en est resté qu’un, en raison de l’accord bilatéral entre le Saint-Siège et l’Italie, et après discussion avec l’Afghanistan.

    Ce prêtre était l’aumônier de toute la communauté chrétienne présente dans le pays, constituée essentiellement de fonctionnaires d’ambassades, mais aussi d’entrepreneurs qui se rendaient en Afghanistan à une époque où l’activité se développait. La beauté de cette situation était que le gouvernement afghan lui-même avait voulu – en geste de reconnaissance, parce que l’Italie avait été le premier pays à reconnaître l’indépendance de l’Afghanistan – offrir la possibilité aux chrétiens présents d’avoir un aumônier.

    Et depuis ?

    Depuis, notre présence n’a quasiment pas connu d’interruption. Il y a toujours eu un aumônier, barnabite, même dans les moments les plus difficiles, dans les années 1990. En Afghanistan, le supérieur de la mission sui juris était alors le père Giuseppe Moretti, qui a décidé de rester sur place aux côtés des quelques chrétiens encore présents.

    Puis, il y a eu une attaque au siège de l’ambassade d’Italie – qui est également le siège de la mission – à Kaboul, durant laquelle il a été blessé à l’épaule par un fragment de missile. La Croix-Rouge et les services de santé se sont occupés de lui et il a été transféré au Pakistan avant d’être rapatrié en Italie, en attendant la fin du conflit. Puis la mission a pu rouvrir et notre présence a perduré jusqu’à aujourd’hui.

  • "Biden a commis l’erreur stratégique du siècle"

    IMPRIMER

    Lu sur 7sur7.be :

    “Joe Biden a commis l’erreur stratégique du siècle”

    INTERVIEW Que faire, maintenant que les talibans ont repris le contrôle de l’Afghanistan? “Si le pays redevient un nid à terroristes radicaux, ni l’Occident ni la Russie ne pourront le tolérer bien longtemps", déclare David Criekemans, professeur en politique internationale (UAntwerpen/KU Leuven). L’expert n’épargne pas le président américain Joe Biden, qu’il accuse d’avoir commis une erreur monumentale en retirant toutes les troupes militaires américaines d’Afghanistan.