C'est dans son approche sociologique que le Cardinal Martini se serait trompé (01/09/2012)

Massimo Introvigne a bien connu le Cardinal Martini et ne se reconnaît pas dans ceux qui le célèbrent ou l'incriminent. A ses yeux, Martini n'était pas un libéral :

"Le cardinal jésuite, écrit-il, ne pensait pas, à l'instar de progressistes authentiques, que la transition à partir des valeurs de la société traditionnelle à celles de la société postmoderne, basées sur un individualisme absolu et sur le rejet de toute notion d'éthique naturelle, notamment en matière de sexualité, constituait un développement joyeux, triomphal et en tout point positif. Il me semblerait qu'il avait même une certaine nostalgie de la société traditionnelle et de ses valeurs. Il pensait, cependant, que la société traditionnelle était morte une fois pour toutes, que ces valeurs étaient parties sans possibilité de retour, et que la seule chance de survie de l'Église était d'en prendre acte. Soit l'Eglise rencontre la postmodernité et s'y adapte, pensait-il, ou alors la postmodernité détruira l'Eglise, en la réduisant à un résidu petit et insignifiant."

Ainsi, certains reprocheront au cardinal d'avoir eu une approche théologique erronnée par défaut d'espérance, en ne croyant pas à la possibilité d'une réversibillité du cours des évènements. Pour M. Introvigne, Martini, dans ses prises de position, se serait plutôt trompé dans son analyse sociologique. Aux yeux de M. Introvigne, son approche est démentie par les faits : il suffit de regarder ce qui se passe dans les pays du nord de l'Europe où le protestantisme "libéral", qui accepte l'éthique nouvelle - de l'avortement aux unions homosexuelles -, est en plein effondrement alors que les protestants identitaires (Mormons, pentecôtistes, fondamentalistes, etc.) qui promeuvent une éthique sexuelle plus rigide que celle de l'Eglise catholique connaissent une croissance spectaculaire. "Il est vrai que dans la société laïque, la disparition de l'éthique traditionnelle est considérée comme acquise. Mais il n'en est pas moins vrai que les Eglises et les confessions qui se sont adaptées à l'éthique nouvelle, sous les applaudissements des médias, sont abandonnées par les fidèles. En revanche, on constate un afflux vers les confessions qui défendent des positions éthiques plus rigides. Les sociologues ont expliqué depuis des années les raisons pour lesquelles cela se produit. Celui qui accepte la nouvelle éthique est partout chez lui dans la société, et n'a pas besoin de se tourner vers les Eglises. La minorité qui va à l'église, pour une large part, n'apprécie pas la nouvelle éthique, et choisit majoritairement ces Eglises, dénominations, et mouvements qui n'acceptent pas le monde postmoderne, mais s'en démarquent." 

"Pour dire les choses plus crûment, en acceptant les conclusions - formulées encore dans une récente interview à propos d'une «Église en retard de deux cent ans» - que Martini déduisait de prémisses qui étaient pourtant erronnées, l'Eglise catholique ne résoudrait pas ses problèmes mais dépérirait tout comme l'Eglise luthérienne danoise. Par conséquent, dans le cas du Cardinal Martini, il ne s'agit pas tant d'une idéologie progressiste ou d'une mauvaise théologie que d'une mauvaise sociologie. Un défaut, peut-être plus facile à pardonner à un homme qui avait tant de capacité et tant de culture, en plus à quelqu'un qui a toujours manifesté un véritable amour pour l'Eglise. A condition de ne pas adopter les soins qu'il proposait pour l'Eglise, parce qu'ils étaient fondés sur un diagnostic erroné."

L'article, en italien, se trouve ici : https://www.facebook.com/notes/massimo-introvigne/introvi... 

Les erreurs de perspective dénoncées par Massimo Introvigne trouvent une confirmation ici : http://www.lalibre.be/actu/international/article/758212/l...

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