L'Eglise serait-elle faite pour être minoritaire ? (04/09/2012)

C'est l'avis de Joël Rochette, président du Séminaire de Namur, interviewé aujourd'hui (4 septembre) par le Soir (version papier). Le quotidien consacre généreusement deux pleines pages au séminaristes, "ces jeunes qui ont choisi Dieu", et en fait une présentation assez objective, avec de sympathiques témoignages des intéressés. Ouf! Mais revenons à l'interview de l'abbé Rochette dont les propos satisferont les âmes bienveillantes :

Combien de séminaristes avez-vous accueillis cette année ?

Nous avons accueilli huit nouveaux séminaristes pour la Belgique francophone.

Peut-on dire que l'on assiste à une crise des vocations ?

Oui, mais ce n'est pas nouveau. Cette crise est là depuis les années soixante et septante. On a diminué par cinq ou par six les chiffres d'entrées.

Pour quelles raisons les jeunes se détournent du séminaire selon vous?

C'est assez complexe. Il y avait plus d'entrées par le passé mais il y avait aussi plus de sorties. Dans les années septante, seuls un ou deux séminaristes étaient ordonnés chaque année, comme aujourd'hui. La crise est donc profonde depuis longtemps. Mais je pense surtout que la société a changé. Nous ne sommes plus dans une société chrétienne avec des chemins tout tracés. Avant, beaucoup de jeunes considéraient comme posiible de devenir prêtre. Nous ne sommes plus dans cette possibilité-là. Ajoutez à cela une société qui promeut l'érotisation, une individualité forte, ... des valeurs qui ne sont pas liées au sacerdoce. (...)

La prêtrise est également un engagément au célibat...

Le futur prêtre doit accepter le célibat. Pas simplement du bout des lèvres. Il faut qu'il l'intègre, que ce soit un choix volontaire  et pas imposé de l'extérieur.

Que répondez-vous aux personnes qui pensent que la position de l'Eglise ne sera plus tenable à terme si l'on ne réforme pas le célibat des prêtres ?

Je crois qu'ils se trompent. Je pense que le célibat convient bien dans la société d'aujourd'hui. C'est un signe clair, le signe de quelqu'un qui s'engage totalement. Je pense que ce signe-là est plus utile aujourd'hui, dans une société qui est tellement sécularisée, dominée par une pensée unique, où tout le monde doit avoir un conjoint, une belle voiture, une maison... Il est possible qu'un jour, on ordonne des gens mariés comme c'est le cas en Orient. Mais je ne suis pas sûr que l'on aura plus de prêtres pour autant... Est-ce qu'un jeune de 18 ans accepterait d'être prêtre même s'il était marié? (...)

Selon une enquête* (réalisée l'année dernière), on remarque qu'il n'y a plus que 4% de catholiques engagés. Un constat qui vous inquiète pour l'avenir?

Je pense que l'Eglise est faite pour être minoritaire. La foi chrétienne est exigeante. Elle nécessite un choix, un discernement, qui n'est pas facile. Si tout le monde acceptait l'Eglise et l'Evangile, c'est que l'Evangile n'a rien à dire finalement. Je ne suis pas inquiet car c'est le propre de l'Evangile d'annoncer à l'autre la bonne nouvelle. Cela veut simplement dire que l'on aura plus de travail.

* L'enquête : "En 2011, il n'y a plus que 50% de la population belge qui se définit comme catholique. Ils étaient encore 72% en 1982. Les catholiques actifs (qui vont à l'église au moins une fois par mois et sont membres d'un groupement catholique) ne représentent plus que 4% de la population. (...) Selon les checheurs qui ont réalisé cette enquête, l'explication principale est à trouver du côté de la transmission religieuse qui se tarit peu à peu. Les jeunes générations sont éduquées en dehors de la religion et ont peu de chance d'en retrouver le chemin." (Enquête "Autres temlps, autres moeurs", Liliane Voyé, Karel Dobbelaere et Koen Abts, FRB et Racine Campus)

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