Syrie : mesure-t-on bien les risques ? (mise à jour 28/8 14H00) (28/08/2013)

Le cours des choses s’emballe et l’on s’attend à une intervention armée contre le régime syrien. Washington, Londres et même Paris donnent de la voix et il semble que le temps des avertissements soit déjà dépassé. Alors que la mission d’enquête de l’ONU chargée de vérifier si le gouvernement syrien est bien responsable d’actes de guerre où serait impliquée l’utilisation d’armements chimiques n’est pas encore parvenue à son terme, les préparatifs visant à une intervention semblent largement entamés.

Une telle initiative de la part des nations occidentales est-elle justifiée et vraiment utile ? On peut tout de même se poser la question. Justifiée, on ne le sait pas encore ; il importe effectivement de ne pas se laisser manipuler par les forces d’opposition qui ont évidemment tout avantage à précipiter une telle intervention qui provoquerait la chute du régime de Bachar el Assad et leur ouvrirait toutes grandes les voies du pouvoir. Il importe également de ne pas faire sans sourciller le jeu de la Turquie d’Erdogan. Ce dernier semble en effet bien obéir à des mobiles religieux radicaux, non seulement dans sa politique intérieure mais aussi lorsqu’il invective le grand imam de l’université d’Al Azhar en l’accusant de collusion avec ceux qui ont déposé Morsi; l'affaiblissement définitif de son voisin syrien n'est pas non plus pour lui déplaire.

Les expériences récentes devraient pourtant inciter le président Obama et le premier ministre Cameron à la prudence. On sait où a mené l’intervention contre le régime de Saddam Hussein en Irak et plus récemment celle qui a provoqué la chute de Kadhafi en Libye. On ne peut évidemment pas dire que la situation de ces pays soit satisfaisante même si les démocraties occidentales peuvent se féliciter béatement d’avoir fait tomber des dictatures. La situation dans d’autres pays où s’est déroulé le fameux « printemps arabe » n’est guère plus rassurante. L’Egypte est en plein chaos et la contestation menace les islamistes au pouvoir en Tunisie.

Des voix se font pourtant entendre qui incitent à la modération, à commencer par celle du pape et des responsables des communautés chrétiennes du Proche-Orient. Ils savent qu’une intensification de la guerre et son élargissement à des puissances étrangères ne feront qu’accroître les souffrances des populations et ouvrir la porte à des factions qui rêvent d’imposer à la Syrie un ordre islamiste pur et dur. Ils plaident donc à juste titre en faveur de la négociation et du dialogue mais ces appels risquent bien de ne pas être entendus par des Occidentaux qui semblent déterminés à suivre, pour des raisons qui ne sont pas seulement désintéressées, une ligne politique qui les assure des sympathies d’autres états arabes acquis à l’islamisme. On peut craindre pourtant que le prix à payer par les populations concernées et par les minorités chrétiennes en particulier ne soit extrêmement élevé et l’on éprouve un malaise certain à écouter nos dirigeants occidentaux qui feignent l’indignation pour justifier leur stratégie de va-t-en-guerre irresponsables.

Voir aussi : http://www.levif.be/info/actualite/international/syrie-le...

14:23 | Lien permanent | Commentaires (2) |  Facebook | |  Imprimer |