La révolution sexuelle des années 60, la pédophilie et les prêtres modernes (01/01/2020)

Du site "Pour une école libre au Québec" :

La révolution sexuelle des années 60, la pédophilie et les prêtres modernes

Chronique d’Eugénie Bastié sur l’affaire Matzneff et quand l’intelligentsia défendait la pédophilie.

Le « cas Matzneff » est entendu. Mis à part quelques gloires éteintes de Saint-Germain-des-Prés, personne ne songe à défendre l’octogénaire qui fit littérature de ses relations sexuelles avec des mineurs, parfois des enfants. C’est étrange, mais c’est ainsi : dans la société médiatique dans laquelle nous vivons, il suffit d’un livre que presque personne n’a lu pour faire chuter un homme dont les écrits affichaient clairement depuis longtemps les pratiques indéfendables. Et chacun désormais de vouloir rejoindre la meute et d’exhiber sa vertu en jetant sa pierre. Ce qui était ringard est devenu tendance : les plus fervents progressistes reprennent aujourd’hui la morale hier seule défendue par ceux qu’on traitait de vieux bourgeois grincheux et frustrés.

Voilà notre société liquide mise face à l’abîme de son relativisme moral. La polémique a fait remonter à la surface des archives sidérantes. En 1990 sur le plateau d’« Apostrophes », un Matzneff souriant qui évoque son amour des collégiennes devant un Bernard Pivot complaisant et une Denise Bombardier solitaire dans son indignation.



En 1982, dans cette même émission, un Cohn-Bendit échevelé en blouson de cuir qui choque l’écrivain Paul Guth par ces mots racontant ses expériences sexuelles avec des enfants : « On se fait des papouilles (…) la sexualité d’un gosse c’est absolument fantastique. Quand une petite fille de cinq ans commence à vous déshabiller, c’est fantastique… c’est un jeu absolument érotico-maniaque », déclenchant les ricanements des autres invités. Lorsqu’en 2009, François Bayrou affirma dans un duel télévisé face à l’écologiste « Je trouve ignoble d’avoir poussé et justifié des actes à l’égard des enfants », ce fut lui qui fut accusé de « dérapage » et cloué au pilori par des médias défendant Cohn-Bendit.

Les indignations à rebours et les complaisances d’un autre âge pourraient nous pousser à relativiser toute norme. Les licences d’aujourd’hui deviendront-elles demain des tabous ? Ce serait oublier le contexte précis dans lequel s’est déployée cette indulgence : celui d’une révolution sexuelle prétendant abolir tout ordre moral.

Tout le monde s’était moqué de Benoit XVI lorsqu’il avait, dans un texte de 18 pages publié en avril dernier, fait un lien entre la pédophilie dans l’Église et la révolution sexuelle des années 1960. Pourtant, dans son livre L’Autre Héritage de 68. La face cachée de la révolution sexuelle (Albin Michel, 2018), l’historienne Malka Marcovich ne disait pas autre chose : elle soulevait avec peu d’écho le tabou des dérives qui ont parfois accompagné la libération sexuelle. La revendication d’une liberté totale, assortie au goût affiché pour la transgression, engendra alors de terribles excès : incestes entre frères et sœurs, entre parents et enfants, détournements d’élèves par leurs maîtres et actes pédophiles.

Les années 1970 et le triomphe du gauchisme culturel virent la tentative de décriminaliser la pédophilie au nom du « droit » des enfants à une sexualité permissive perçue comme émancipatrice.

En 1973, l’écrivain Tony Duvert, apologiste de la pédophilie reçoit le prix Médicis. En 1974, Gabriel Matzneff publie Les Moins de 16 ans. En 1975, Cohn-Bendit publie Le Grand Bazar dont un chapitre intitulé « Little Big men » évoque la sexualité des enfants. Matzneff rédigera en 1977 la fameuse pétition, publiée dans Le Monde, sous le titre « À propos d’un procès », qui prenait la défense de trois hommes jugés pour avoir eu des relations sexuelles avec des adolescents de 13 et 14 ans, événement qualifié de simple « affaire de mœurs » par les 69 signataires, parmi lesquels on trouve Jean-Paul Sartre, Simone de Beauvoir, Gilles Deleuze, Roland Barthes, Louis Aragon, mais aussi Jack Lang et Bernard Kouchner. Citons aussi ce dessin ignoble paru en 1978 dans Libération avec le titre « Apprenons l’amour à nos enfants ».

Aujourd’hui, on regarde avec horreur et vertige ce qui était célébré hier par la haute intelligentsia parisienne. Pourtant, notre époque qui a renoncé à toute conception de la vie bonne change de morale au gré des saisons et des tendances à la mode sur les réseaux sociaux. Encore irrémédiablement progressiste, elle répugne à s’imposer des limites dans quelque domaine que ce fût, y compris en matière de sexualité. Elle veut croire que le verrou du « consentement » — titre du livre de Vanessa Spingora — est suffisant. Qu’il permet en fixant la limite du consentement éclairé à l’âge de 15 ans, de juguler le dogme du « jouir sans entraves ». Mais cette notion de contractualisation absolue du désir reste indifférente à la part sombre de la sexualité, qui ne saurait être réduite, comme on le pensait en Mai 68 à un échange de fluides sans conséquences. De scandales en affaires, c’est le droit d’inventaire de la révolution sexuelle qui, sans se l’avouer, a commencé. Comment en aurait-il pu être autrement ?

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