Aujourd’hui, l’historien constate que « le catholicisme risque de ne plus rester longtemps la première religion du pays » (La Croix du 22 mai 2023) au vu des résultats de l’enquête « Trajectoires et origines » (TEO2) de l’Insee qui pointe les évolutions récentes des diverses religions en France.
De son côté, le théologien protestant Christophe Chalamet observe (Recherches de science religieuse 2023/1) que la question du salut, centrale dans le christianisme, est désormais incompréhensible pour nos contemporains, du moins en Occident, alors que les paysans du Moyen Âge l’avaient parfaitement intégrée en méditant le Jugement dernier sur les tympans des églises et cathédrales romanes. Et que dire de « la vie éternelle » qui n’a plus aucun sens pour eux. C’est le cœur de la foi chrétienne, c’est-à-dire en un Christ sauveur et donnant la vie (Jean 3, 16-18), qui devient obsolète.
De nombreux efforts de l’Eglise pour s’adapter
Le processus de désaffiliation que les historiens et les sociologues observent depuis le début des années 1960, s’est donc progressivement accéléré, surtout dans la décennie 2010 selon TEO2. Et pourtant, que d’efforts pastoraux ont été menés dans l’Église de France depuis le milieu du XXe siècle. Dès 1951, l’épiscopat publie un Directoire pour la pastorale des sacrements. Chacun d’eux sera rénové, de l’initiation chrétienne à la guérison. Certains changent de nom : la réconciliation remplace la confession et l’extrême-onction devient l’onction des malades. Le mariage nécessite une préparation. Les nouveaux militants du CLER sont convaincus qu’une régulation des naissances est possible avec des « méthodes naturelles » conformes à un discours pontifical qui se fige dans Humanæ vitæ (1968).
Plus timidement émerge une pastorale en faveur des personnes divorcées puis remariées. Pour le sacrement de l’ordre, sa rénovation intervient avec la sacramentalité de l’épiscopat et le renouveau du diaconat comme degré stable et ouvert à l’ordination d’hommes mariés. Malgré des tâtonnements, beaucoup d’efforts sont faits pour rénover et adapter l’économie sacramentelle.
Commentaires
Il suffit de savoir ce qui était enseigné dans les séminaires diocésains au cours des années 1970-80 et même après, pour comprendre que l'effondrement des diocèses et des paroisses que nous constatons aujourd'hui était en germe dans ces années-là. Avec la complicité d'évêques naïfs ou idéologues (souvent les deux) des prêtres étaient encouragés à faire des expériences pastorales diamétralement opposées à ce que Vatican II demandait de faire et de respecter et des futurs prêtres étaient programmés pour tout démolir dès qu'ils seraient ordonnés et envoyés en paroisse. Quant à ceux qui refusaient de participer à la démolition qui se faisait sous couvert de "faire émerger l'Eglise de demain", leur ordination diaconale était repoussée sine die jusqu'à ce qu'ils comprennent d'eux-mêmes qu'il leur fallait quitter le séminaire pour ne pas verser dans une schizophrénie conduisant à une désorganisation de la pensée et des comportements. Le problème n'est peut-être pas tant que ces choses-là se soient ainsi déroulées ; il est dans le fait que les évêques d'aujourd'hui refusent de voir et de corriger les erreurs d'hier.
Écrit par : Denis CROUAN | 02/07/2023