À quoi ressemblera le collège des cardinaux à la fin de l'année 2024 ? (14/03/2024)

D'Andrea Gagliarducci sur le Catholic World Report :

Analyse : Le Collège des Cardinaux en perpétuelle évolution

13 mars 2024

Le changement le plus récent au sein du Collège des cardinaux a eu lieu le 24 février, lorsque le cardinal José Luis Lacunza Maestrojuán a eu 80 ans et a donc été retiré des rangs des cardinaux élus. Quelques semaines plus tôt, le 12 février, le cardinal Pedro Ricardo Barreto Jimeno a également fêté ses 80 ans et n'est donc plus éligible pour voter lors d'un conclave.

Actuellement, 129 cardinaux peuvent voter lors d'un conclave, soit neuf de plus que le maximum de 120 fixé par Paul VI et confirmé par tous ses successeurs depuis lors.

Au cours des onze années de son pontificat, le pape François a convoqué neuf consistoires pour créer de nouveaux cardinaux. Il a ainsi créé 142 cardinaux, dont 113 électeurs et 29 non-électeurs, issus de 70 nations. Parmi ces nations, 22 n'avaient jamais eu de cardinal auparavant.

Ce niveau d'activité contraste avec celui de saint Jean-Paul II, qui a convoqué neuf consistoires au cours d'un pontificat de 27 ans, et avec celui du pape Benoît XVI, qui en a convoqué cinq en huit ans. Néanmoins, le record de nouveaux bonnets rouges appartient à Jean-Paul II, qui a créé 231 nouveaux cardinaux au cours de son pontificat.

Si un conclave devait commencer aujourd'hui, il y aurait 94 cardinaux électeurs créés par le pape François, 27 créés par Benoît XVI et huit créés par Jean-Paul II. Pour élire le pape, un bloc de 86 voix serait nécessaire (deux tiers de l'assemblée), et les cardinaux créés par le pape François représentent plus des deux tiers.

À quoi ressemblera le collège des cardinaux à la fin de l'année 2024 ?

Toutefois, à la fin de l'année 2024, dix cardinaux supplémentaires perdront le droit de vote au conclave. Par conséquent, si le pape François ne convoquait pas un nouveau consistoire d'ici la fin de l'année, le nombre de cardinaux reviendrait en dessous du maximum de 120 cardinaux électeurs.

Parmi les 10 cardinaux qui auront 80 ans dans les prochains mois, on trouve le cardinal Luis Francisco Ladaria Ferrer, préfet émérite du Dicastère pour la doctrine de la foi, considéré comme influent mais qui souhaite depuis longtemps quitter ses fonctions publiques, ayant demandé au pape d'être également dispensé de participer au Synode sur la synodalité. Le cardinal Marc Ouellet, préfet émérite du dicastère pour les évêques, aura également 80 ans.

Pour les quatre autres cardinaux qui auront 80 ans au cours des dix prochains mois, le pape doit trouver un successeur pour leurs fonctions respectives, car ils sont tous encore en activité. Il s'agit de l'archevêque de Boston et président de la Commission pontificale pour la protection des mineurs, le cardinal Sean Patrick O'Malley (29 juin), du pénitencier majeur de la Pénitencerie apostolique, le cardinal Mauro Piacenza (15 septembre), de l'archevêque de Caracas, au Venezuela, le cardinal Baltazar Enrique Porras Cardozo (10 octobre), et de l'archevêque de Bombay, en Inde, le cardinal Oswald Gracias (24 décembre).

O'Malley et Gracias sont également membres du Conseil des cardinaux établi par le pape pour la réforme et le gouvernement de la Curie romaine.

Le cardinal Louis-Marie Ling Mangkhanekhoun, vicaire apostolique de Vientiane (Laos), aura également 80 ans en 2024, tout comme le cardinal Polycarp Pengo, archevêque émérite de Dar-es-Salam (Tanzanie), le cardinal Jean-Pierre Ricard, archevêque émérite de Bordeaux (France) et le cardinal John Njue, archevêque émérite de Nairobi (Kenya).

À la lumière de ce qui précède, à la fin de l'année 2024, les cardinaux électeurs créés par le pape François seront au nombre de 91, alors que ceux créés par les papes précédents auront été considérablement réduits. En effet, lors d'un prochain conclave, il n'y aura plus que 22 cardinaux créés par Benoît XVI et six par Jean-Paul II.

Un conclave à la François ?

Ces chiffres suggèrent que l'élection du successeur du pape François pourrait très rapidement s'orienter vers un profil papal similaire à celui du pape François. En réalité, cependant, le résultat du conclave pourrait être très différent.

La plupart du temps, les papes ont convoqué des consistoires pour discuter et consulter les cardinaux sur des questions majeures pour la vie de l'Église.

Toutefois, au cours de son pontificat, le pape François n'a convoqué un consistoire que trois fois pour discuter des questions en jeu. Cela s'est produit pour la première fois en 2014, lorsqu'un autre consistoire a accompagné le consistoire pour la création de nouveaux cardinaux afin de discuter des questions familiales, avec un rapport du cardinal Walter Kasper.

En 2015, la réforme de la Curie a été discutée avec différents rapports et en 2022, le pape a demandé aux cardinaux de prendre en compte la réforme de la Curie qu'il venait de mettre en place avec la constitution apostolique Praedicate Evangelium.

La structure de discussion du dernier consistoire différait également du modèle habituel. Les cardinaux étaient réunis en petits groupes linguistiques ; tous n'ont pas pu s'exprimer devant l'assemblée et plusieurs ont laissé des documents écrits sur ce qu'aurait été leur discours sans le présenter devant les autres membres du Collège des cardinaux. Bien que présentée comme un effort pour rendre la discussion plus efficace, cette structure a supprimé des moments traditionnellement importants d'interaction et de compréhension mutuelle.

Il ne s'agit pas de détails mineurs. Les discussions qui ont lieu lors des consistoires permettent aux cardinaux de se connaître et aux personnalités de se définir plus précisément.

Par exemple, la candidature du cardinal Karol Wojtyla a émergé de certaines de ces discussions, ainsi que le fait que Paul VI l'avait appelé à prêcher les exercices spirituels du Carême à la Curie en 1976. Bien que Wojtyla soit une figure autoritaire et connue, il n'aurait pas été facile d'obtenir le soutien de ses collègues cardinaux s'il n'avait pas eu l'occasion de se faire connaître dans ces circonstances.

Le prochain conclave débutera donc avec un certain handicap, dans la mesure où les cardinaux se connaîtront moins bien. Cela pourrait favoriser, d'une part, la formation de groupes de pression qui pourraient orienter le conclave dans un sens ou dans l'autre. Mais d'un autre côté, cela rendra probablement le résultat plus imprévisible. C'est pourquoi, bien que le pape François ait créé plus de deux tiers des cardinaux électeurs, il n'est pas du tout certain que le pape qui sera choisi lors d'un prochain conclave aura le même profil que le pape François.

Une réforme des règles du conclave en vue ?

En l'état actuel des choses, c'est la constitution apostolique Universi Dominici Gregis, promulguée par Jean-Paul II en 1996, qui régit le conclave. Cette constitution prévoyait, entre autres, qu'à partir du 34e tour de scrutin (ou du 35e, si le vote a également eu lieu le jour de l'ouverture du conclave), la majorité absolue suffit pour élire un pape.

Cette disposition a été modifiée par Benoît XVI en 2007 par le motu proprio De Aliquibus Mutationibus in Normis de Electione Romani Pontificis. La nouvelle règle prévoit qu'au 34e ou 35e tour de scrutin, en cas de "blocage", un second tour sera organisé entre les deux cardinaux ayant obtenu le plus de voix, qui ne pourront toutefois pas participer au scrutin. Toutefois, l'élection n'aura lieu que si l'un des deux obtient les deux tiers des voix, comme cela est prévu pour tous les autres scrutins.

Ces règles visent à obtenir un large consensus sur le pape élu, qui pourra ainsi compter sur le soutien de l'ensemble du Collège des cardinaux.

Depuis quelque temps, on parle d'un projet du pape François de réformer les règles du conclave. Parmi les réformes qui pourraient être discutées : l'abaissement du quorum pour l'élection du pape à partir du 15e tour de scrutin ; l'exclusion des cardinaux de plus de 80 ans des congrégations générales, c'est-à-dire des réunions pré-conclaves, auxquelles participent les cardinaux votants et non votants ; et une nouvelle structuration des congrégations générales elles-mêmes, sur le modèle du dernier consistoire - c'est-à-dire avec une répartition des cardinaux en groupes de travail et des rapports confiés à un modérateur.

Toutefois, aucune étude visant à modifier les règles du conclave n'a été officiellement annoncée. Le cardinal Gianfranco Ghirlanda, qui est devenu ces dernières années l'avocat canoniste de confiance du pape, aurait proposé des projets de réforme, mais rien n'a été confirmé non plus.

Il reste donc à voir si ces rumeurs de réforme des règles du conclave sont le résultat de discussions honnêtes ou simplement d'agitation et de spéculation face à l'imprévisibilité bien connue du pape François.

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