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Aborigènes d'Australie : les missionnaires indûment calomniés

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1008597.jpgUn article de Massimo Introvigne, dans la Bussola quotidiana, rend compte des recherches d'un historien, marxiste repenti, qui a consacré une oeuvre monumentale au problème des aborigènes d'Australie. Ce travail de "réinformation" vient à point quand on sait l'exploitation éhontée qui a été faite des prétendues "générations volées" pour incriminer l'oeuvre réalisée par des générations de missionnaires chrétiens sur ce continent. A lire absolument :

"Dans l'Encyclique "Caritas in veritate", Benoît XVI a dénoncé "un éclectisme culturel manquant souvent de discernement", dans lequel les cultures sont considérées par une approche relativiste comme étant substantiellement équivalentes et interchangeables." En fait, selon le pape, les cultures peuvent et doivent faire l'objet d'un "discernement" à la lumière de la "loi morale universelle", que la raison peut découvrir, même en dehors de la sphère religieuse; et cela vaut pour toutes les cultures. Une des formes les plus agressives du relativisme culturel moderne, promue notamment par certaines tendances de l'anthropologie moderne qui ont même contaminé des missionnaires chrétiens, est le relativisme anthropologique selon lequel il n'y a pas de vérités ni de valeurs universelles. Chaque vérité prétendûment universelle serait un simple produit d'une culture spécifique et ne serait donc valide que dans cette culture. Les personnes désirant proposer, la vérité et les valeurs nées dans un contexte occidental aux populations d'autres régions de la Terre, considérées comme "primitives" seraient coupables de génocide culturel, voire d'«ethnocide».

Qui plus est, sur la base d'une ancienne théorie anthropologique issue du marxisme, certains soutiennent que les prétendus «primitifs», qui ne connaissent pas la propriété privée et qui vivent sans inhibitions sexuelles ni culpabilité, seraient beaucoup plus avancés et heureux que nous qui nous réclamons d'un Occident «civilisé». Le penseur catholique brésilien Plinio Corrêa de Oliveira (1908-1995) a rédigé une critique très incisive, à propos des populations de l'Amazonie, sur la façon dont le "tribalisme autochtone" a contaminé même les missionnaires catholiques.

La terre promise des anthropologues - et en particulier des relativistes - pendant des décennies a été l'Australie, où existaient, au moins jusque dans les années 80', des tribus "préservées" - la dernière qui n'avait jamais connu l'homme blanc aurait été abordée dans le désert de Gibson, en Australie, en 1984. Dans ce cas aussi, s'est développée une vive polémique sur le génocide culturel - et pas seulement culturel - que les colons ont infligé aux peuples autochtones. Après 1968, dans un climat de relativisme culturel, des personnalités politiques de premier plan se sont multipliées en excuses publiques pour les torts commis pendant des siècles à l'égard des tribus aborigènes d'Australie.

Depuis 2002, les choses ont changé. Un historien marxiste repenti devenu néo-conservateur, Keith Windschuttle, a publié le premier de trois volumes d'un ouvrage monumental sur la falsification de l'histoire des Autochtones (La fabrication de l'histoire des Autochtones, vol I, Macleay, Sydney 2002) consacré à la Tasmanie, l'île où, selon les anthropologues, se serait produit le pirele génocide qui ait eu lieu, avec des milliers d'Aborigènes massacrés. Windschuttle en  réduit le nombre à 125, et fait valoir qu'en Australie, la réduction de 350 mille à 100 mille aborigènes entre 1800 et 1950 provient généralement de maladies infectieuses et de violents affrontements entre les tribus, beaucoup plus que des massacres attribués aux colons, contre lesquels il n'y a jamais eu de réelles "guerres de résistance". Grâce au travail des missionnaires qui ont répandu de meilleures pratiques d'hygiène et de médecine, le nombre d'autochtones est passé à plus de cinq cent mille unités et beaucoup d'entre eux, devenus chrétiens, ont, la plupart du temps, intégé la société australienne.

Cet ouvrage de 2002 a été suivi par d'âpres polémiques. Avant la parution du second volume de son œuvre monumentale, toujours en préparation, Windschuttle vient de publier le troisième (chez Macleay, à Sydney en 2010) consacré aux «générations volées». Il s'agit de ces aborigènes qui, depuis plus d'un siècle, à partir de 1881, auraient été enlevés à leurs parents et confiés à des collèges ou à des familles adoptives dans l'espoir de les intégrer en les mariant à des non-autochtones, ce qui aurait complètement éliminé les tribus conformément à un long et ambitieux programme eugéniste, que certains anthropologues ne craignent pas de comparer aux théories eugénistes des nazis. Selon ces anthropologues, les missionnaires catholiques et protestants auraient été complices de ce "génocide par l'adoption" au moins jusqu'en 1970. Dans le collimateur en particulier : les Pallottins (congrégation missionnaire) qui auraient ouvert leurs collèges et contribué au sinistre programme d'élimination des autochtones par le recours aux adoptions et aux mariages. Divers gouvernements australiens ont présenté leurs excuses aux aborigènes pour les «générations volées» et ont offert une compensation financière aux victimes et à leurs descendants survivants. Les tribunaux, à la vérité, se sont montrés sceptiques quant au véritable droit à l'indemnisation: la seule cause qui l'ait emporté  est celle de Bruce Trevorrow (1956-2008) en Australie du Sud, avec un jugement confirmé en appel,
après la publication du livre de Windschuttle : il s'agissait d'un cas limite, où un mineur avait été placé en contrevenant à la législation de l'époque.

Windschuttle fait à présent valoir qu'il n'y a pas eu, tout simplement, de "générations volées". Alors que les rapports du gouvernement évoquent "au moins 50.000" aborigènes mineurs enlevés à leurs parents et placés dans des familles blanches ou dans des collèges religieux, Windschuttle, après un dépouillement attentif des archives (ce qui est  spécialité), qui cette fois encore y a consacré un volume de 650 pages, en réduit le nombre à 8250. La grande majorité de ces enfants - ou plutôt de ces jeunes adolescents, puisque la majorité d'entre eux avait plus de dix ans, ont été retirés de leurs familles nombreuses étant orphelins de père et de mère, tandis que d'autres, nés de mères célibataires (ou devenues veuves) et donc incapables de les élever seules, ont été confiés aux collèges religieux.
Les travailleurs sociaux, Windschuttle en convient, ont parfois eu la main lourde dans le transfert d'enfants dont les parents s'occupaient peu vers des collèges, mais à l'époque, cela se passait aussi avec des familles blanches pauvres, de sorte qu'on ne peut évoquer de discrimination raciale à ce sujet.

Il y eut certainement, parmi les gouverneurs des collectivités autochtones, des individus comme Auber Octavius ​​Neville (1875-1954), le «mauvais» de plusieurs ouvrages consacrés aux «générations volées» - qui promouvaient des programmes eugéniques en proposant le mariage avec des personnes non-autochtones comme chemin d'accès à l'assimilation. Mais, selon Windschuttle, ils ont beaucoup parlé, ont peu agi, et n'ont guère atteint de résultats, puisque, comme on l'a déjà mentionné, il y a plus d'autochtones en Australie aujourd'hui qu'il n'y en avait 150 années auparavant. L'explication, c'est que le nombre d'aborigènes réellement placés ou adoptés ne dépasse pas quelques dizaines. Les programmes gouvernementaux visaient moins les populations autochtones - dont ils disaient en fait vouloir préserver la vie et la culture -, que les métis, enfants de femmes autochtones et de colons généralement blancs ou de marins chinois débarqués sur les côtes australiennes. Ces hommes - méprisés par la société autochtone et qui rencontraient des problèmes d'intégration chez les Blancs - étaient considérés comme des enfants «à risque» et envoyés plus fréquemment dans les collèges dirigés par des missionnaires. Cependant, dans de nombreux cas, par contre, c'était avec le consentement des parents. Le chiffre de 8.250 familles d'accueil concerne principalement des filles, pas des garçons. Précisément parce que le mépris pour les métis était tel que les petits filles de sang mêlé étaient souvent exposés au risque d'abus sexuels précoces et à la prostitution forcée.

Ici, cependant, est tout le problème de la doctrine qui sous-tend le troisième volume de Windschuttle. Les anthropologues ont raison, en partie, de faire valoir que l'approche des autochtones à l'égard de la morale sexuelle était différente de celle des chrétiens. Les mariages étaient combinés au moment de la naissance des filles puis célébrés et consommés à la puberté, alors que la fille n'avait que huit ou neuf ans. Les femmes de la tribu n'avaient pas les mêmes droits que les hommes. Elles ont été fréquemment victimes d'infanticides - parce que les tribus, en particulier en temps de famine, préféraient nourrir leurs fils; elles étaient aussi victimes d'abus sexuels. Le contact avec les non-autochtones - avec de graves fautes commises par ces derniers - a conduit à une forte augmentation de la prostitution, qui, par ailleurs, existait déjà, entraînant la propagation des maladies vénériennes. Tragiques - mais attestés par les documents officiels - sont les récits des arrivées de bateaux des pêcheurs de perles chinois sur la côte australienne au XIXe siècle et au début du XXe siècle. Les aborigènes  les attendaient, érigeant de grands lits sur les plages, où les marins ont pu voir de jeunes prostituées, qui mourraient souvent d'épuisement et de mauvais traitements. Les candidates les plus fréquentes à la prostitution étaient de jeunes métisses, pour les raisons déjà mentionnées. Là où arrivaient les blancs ou les marins malais, la prostitution homosexuelle se développait aussi.

Les missionnaires - protestants et catholiques - ont certainement inculqué une autre morale, combattu la prostitution et la pratique des mariages entre adultes - parfois des personnes âgées - avec des fillettes de moins de douze ans. Ont-ils eu tort de détruire la culture autochtone traditionnelle, ou eu raison en donnant la primauté à une loi morale universelle? N'y a-t-il pas une loi morale naturelle s'appliquant à toutes les cultures? Windschuttle rapporte les problèmes d'un évêque catholique qui, sous l'influence de missionnaires qui avaient étudié l'anthropologie, avait décidé de célébrer rituellement le mariage d'une fillette autochtone de neuf ans avec un vieil homme de sa tribu qui aurait pu être son grand-père. Attaqué, l'évêque s'était défendu en affirmant avoir interrogé la "jeune fille" qui était tout à fait consentante; la controverse est devenue insoutenable quand la petite fille, après un an de mariage et des relations sexuelles fréquentes, est morte, comme cela se produisait souvent dans ces situations. L'évêque s'appelait Mgr. Matthew Gibney (1837-1925) et l'épisode remonte à 1900, preuve que le «tribalisme autochtone" n'est pas né après le concile Vatican II.

La lecture du rapport «Les jeunes enfants sont sacrés», publié en 2007 par le gouvernement du Territoire du Nord de l'Australie, montre que ces problèmes ne sont pas résolus aujourd'hui. Le rapport rend hommage au politiquement correct anthropologique et la nécessité de respecter la nature spécifique de la culture autochtone. Il signale pourtant plusieurs cas de mariages concernant des filles de moins de douze ans, en disant qu'ils seront interdits même s'i ce n'est pas conforme aux coutumes anciennes car il est difficile aujourd'hui de se conformer au droit tribal traditionnel.Ce n'est pas vraiment clair car, si les conditions pouvaient être réunies, cela signifierait qu'aujourd'hui l'Australie tolèrerait des mariages entre des petites filles autochtones âgées de neuf ans et des hommes de soixante.

Le problème, en définitive, est l'existence d'une loi morale universelle. Si cette loi n'existe pas, il n'y a place que pour le relativisme anthropologique qui demande à ce qu'on laisse vivre les aborigènes "comme ils veulent" et "comme ils ont toujours vécu". Ainsi, si les mariages forcés de filles de neuf ans, ou l'infanticide de petites filles se pratiquent depuis des siècles, qui sommes-nous pour y porter atteinte et vouloir, en raison de nos valeurs plus élevées, mettre fin à ces pratiques? Mais s'il y a une loi universelle de la raison qui s'impose à tous - que l'on soit blanc ou autochtones, chrétien ou adepte des religions traditionnelles - quelles que soient l'appartenance religieuse ou les traditions -, alors, offrir à des enfants autochtones en Australie une vie exempte de mariages forcés, de prostitution, de sous-développement éducatif et sanitaire, représente non une faute mais un bienfait des missionnaires.

"En plus d'apporter l'Evangile - écrit Windschuttle - les missionnaires ont imposé la discipline nécessaire pour apprendre à lire, à écrire et à compter, permettant de recevoir une bonne éducation primaire. Ils ont libéré les femmes autochtones en les persuadant que leur corps leur appartenait à elles, et non à leurs maris ou à leurs pères, et qu'elles avaient le droit de choisir avec qui se marier. Ils ont expliqué aux mères et leurs filles ce qui ne va pas, pour des raisons à la fois physiques et morales, lorsqu'on contraint des fillettes de huit ou neuf ans d'avoir des rapports sexuels avec des hommes adultes. Ils ont montré que les filles pouvaient choisir autre chose qu'un mariage avec un mari âgé et violent. Ils ont encouragé les peuples autochtones à acquérir un niveau d'hygiène essentiel pour prévenir la propagation des épidémies. Les missionnaires les plus expérimentés ont appris à substituer à l'ancienne économie des nomades une vie villageoise moderne basée sur l'agriculture. Ils ont offert un refuge aux orphelins et aux enfants de la rue, en particulier les métis dont personne ne voulait, ni chez les aborigènes, ni chez les Blancs." Certains missionnaires firent preuve d'un manque de sensibilité; il y en a au moins un - un protestant - qui a été, à son tour, accusé d'abus homosexuels. Mais la grande majorité ont eu un comportement irréprochable; ils n'ont pas violé les droits des peuples autochtones, mais ils les ont protégés en le payant de leurs maladies et parfois de leur vie. Considérer l'héroïsme des missionnaires comme une forme de génocide culturel manifeste les conséquences paradoxales auxquelles aboutit aujourd'hui le relativisme culturel.

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