Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Tu es Petrus…(Matt., 16,18) - le Père Delhez et le pape

IMPRIMER

A271110_8.jpgDans le « Dimanche Express » à paraître le 11 septembre, le Père Charles Delhez s.j. consacre son éditorial au rôle de la papauté. Notre confrère et néanmoins ami « Cathobel » publie cette réflexion qui prend pour point de départ la sortie sur les écrans du film de Nanni Moretti « Habemus papam ». Le directeur de l’hebdomadaire paroissial interdiocésain écrit en guise de commentaire :

« Le nouveau pape ne se présente pas au balcon ! Il veut renoncer à sa charge, parce que trop lourde. Et il disparaît. Telle est l'intrigue de "Habemus Papam !"(…) En fait, jamais pareille situation ne s'est présentée. Or les responsabilités qui pèsent sur les épaules d'un seul homme sont de plus en plus grandes. Plus d'un milliard de catholiques et des liens diplomatiques avec un nombre croissant d'États. Ce film-ci - bien sympathique, à notre estime - est donc de la pure fiction et nous ne pouvons que remercier ceux qui, jusqu'à présent, ont accepté cette tâche. Sans doute, comme tous les cardinaux du film, se disaient-ils, juste avant leur élection : "Non, pas moi, Seigneur !" La papauté est une chance - une grâce. Dans un monde éclaté, l'Église, malgré toutes ses divisions, parvient à maintenir une réelle communion entre croyants de tous les continents et de toutes conditions sociales. Certes, les tensions ne manquent pas, mais n'est-ce pas un gage de vitalité ?

Si le réalisateur, qui ne se cache pas d'être athée, veut faire entendre une question, c'est sans doute celle-ci : manifestement, les cardinaux du conclave se sont trompés. Tout pape voyant dans son élection la main de Dieu, ne serait-ce pas Dieu lui-même qui a fait un mauvais choix ? Traduisez : l'institution est-elle aussi divine qu'elle veut bien le faire croire ? Chacun répondra selon sa foi. Mais il serait de mauvaise foi de croire que si l'institution est bien divine, elle ne se trompe jamais. L'histoire de l'Église l'illustre à l'envi. Croire en Dieu ne dispense pas des médiations humaines, avec leurs fragilités.

Notre monde se transforme profondément, à des rythmes différents selon les lieux et les couches sociales. Il n'est pas possible d'être l'Église du Christ à l'époque moderne comme on l'était à la Renaissance. Des changements doivent intervenir. "J'écoute la requête qui m'est adressée de trouver une forme d'exercice de la primauté ouverte à une situation nouvelle, mais sans renoncement aucun à l'essentiel de sa mission", disait Jean-Paul II. De nombreuses voix s'élèvent en effet, plaidant pour une décentralisation qui revalorise les Églises locales. Dès le début, le collège des douze apôtres était comme la figure d'une Église appelée à articuler unité et diversité. Un défi, aujourd'hui. »

Le P. Delhez y va de ses points d’interrogation sur la nature et le mode d’exercice de la papauté, invitant chacun à répondre « selon sa foi ».

Tâchons de le faire selon la foi que nous enseigne l’Eglise.

Certes, on peut penser qu’il y eût, au long des siècles, des conclaves où le Saint-Esprit n’avait pas grand’chose à faire, des papes mal choisis, inaptes ou scandaleux, démissionnaires ou même déposés (quoique d’institution divine, la fonction pétrinienne n’est pas un degré supplémentaire du sacrement de l’ordre) : cela ne change rien au fondement divin de la hiérarchie ecclésiastique.

Le mystère de l’Eglise tient à ceci que ce n’est pas la vertu de l’homme qui donne le Christ, c’est le Christ qui se donne à l’homme. Il est le trésor porté dans des « vases d’argile » comme dit saint Paul. Le Christ s’est aussi donné à nous par Alexandre Borgia, pape dépravé du XVIe siècle. C’est le même Christ, le même trésor, quel que soit le vase. Nous ne vénérons pas nos pasteurs pour l’argile dont ils sont faits, nous les vénérons pour ce trésor qu’ils portent : le Christ. Si l’on rejette le vase parce qu’il est vaseux, on rejette en même temps le contenu précieux : le Christ qui, lui, n’a pas refusé de se laisser porter dans ce vase vaseux. Quelle leçon pour nous qui faisons les difficiles !

Seconde remarque : la manière d’exercer la primauté de Pierre a évidemment varié au cours des âges mais, sur le fond, elle est demeurée la même. Son objet est de confirmer les frères dans la foi. La papauté est le gardien suprême de la fidélité de celle-ci. Au concile Vatican II on a beaucoup jasé sur le centralisme romain. Mais qui ne voit l’actuelle nécessité d’un pouvoir pétrinien solide, en des temps où à l’intérieur même de l’unique Eglise du Christ, la foi est tentée par le relativisme et le syncrétisme qui affectent  la lecture même des actes de ce concile. Plus que jamais, l’Eglise a besoin d’une papauté forte pour assurer une « herméneutique de la  continuité » dans l’interprétation du dépôt de la foi.

Commentaires

  • Magnifique réponse! Merci!

  • Cela fait longtemps que je n'avais pas réagi,mais trop c'est trop!Charles Delhez se rend-il compte qu'il est en plein dans les années 70,c'est à dire quand j'étais bébé?Si il y a bien quelqu'un qui n'évolue pas avec le temps,c'est bien lui et ses 78 tours griffés,pendant e temps,à Madrid et ailleurs,les jeunes catholiques lisent les "twitt's" de B16!

  • Je suis bien sûr d’accord avec ce commentaire. Le journal Dimanche ne s’adressant pas qu’à des catholiques, j’ai simplement suggéré que c’était une question de foi d’y voir une insitution divine. Elle ne s’impose donc ni à Nanni Moretti, ni au lecteur, mais elle est la mienne. J’ajoutais, pour reprendre votre image, que les vases étaient bien d’argiles, non pour en rejeter le contenu, mais pour dire que notre responsabilité est engagée : à nous de veiller à ce que les vases soient le moins indignes possible de leur contenu.
    « Croire en Dieu ne dispense pas des médiations humaines, avec leurs fragilités », ai-je écrit. Je voulais dire par là que la foi se vit toujours dans les conditions précaires de notre humanité. Il n’y a pas de foi sans médiation, et des médiations imparfaites. L’Église a beau être humaine et donc déficiente, elle n’en n’est pas moins le chemin que Dieu a choisi. Ce n’est pas parce que l’Église est pécheresse que l’on peut en faire l’impasse. Nous nous rejoignons donc. « S’engager, c’est adhérer à une cause imparfaite », a dit le philosophe juif Paul-Louis Landsberg. Si l’on attend que l’Église soit parfaite, on ne s’engagera donc jamais. Personnellement, j’ai fait le choix de m’y engager, et de manière assez radicale.
    Quant à la manière d’exercer ce ministère, il est remis à notre intelligence humaine, éclairée par l’Esprit Saint. Que l’on se rappelle l’adage paradoxal dans lequel a été coulé la pensée spirituelle de St Ignace de Loyola : « Agis comme si tout dépendait de Dieu et prie comme si tout dépendait de toi. »

  • Bonjour Charles Delhez

    je peux me tromper, mais je crois que l'adage c'est :
    "Prie car tout dépend de Dieu, mais agis comme si tout dépendait de toi" (St Ignace de Loyola)

Les commentaires sont fermés.