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La vertu d'obéissance

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« Qui vous écoute m’écoute »  (Luc 10, 16) dit Jésus à ses apôtres.  L’Eglise n’est pas une démocratie, c’est entendu.  Elle parle avec l’autorité qui lui vient du Christ et non du peuple. Mais elle n’est pas non plus une dictature de droit divin. Toute parole, fut-elle du pape, ne descend pas directement du ciel. Si son « magistère » doit être respecté, il n’oblige pas toujours au même degré d’obéissance   et ne prive nullement le fidèle de l’usage de sa raison, ni de son libre-arbitre,  pourvu que ceux-ci s’exercent dans un esprit de communion : « caritas in veritate ».  Et si  l’obéissance requise du « peuple de Dieu »  est une vertu, elle n’est pas  non plus à confondre avec le vœu disciplinaire ascétique prononcé par les membres d’une congrégation religieuse. C’est ce qui nous rappelle ici  l’abbé Guillaume de Tanoüarn sur son « metablog ». Extrait : 

l'obéissance.jpg« …L'obéissance a mauvaise presse, comme l'autorité a mauvaise presse. Il suffit de relire ce que dit Bossuet de l'autorité pour comprendre que ni l'autorité ni l'obéissance ne sont facultatives. L'une et l'autre sont des vertus. Qu'est-ce que l'obéissance ? Le père Labourdette en parle bien dans un flamboyant article de la revue thomiste datant des années Cinquante de l'autre siècle. Etre dans l'obéissance signifie être à sa place. Refuser l'obéissance signifie refuser sa place, refuser de jouer son rôle et s'en inventer un éventuellement... A ses risques et périls.  

L'obéissance a mauvaise presse, mais c'est d'abord parce qu'elle est mal connue. Le plus souvent on confond le voeu d'obéissance et la vertu d'obéissance. Par le voeu d'obéissance, on se remet entièrement dans la main d'un supérieur en abdiquant toute volonté propre, pour tenter, par cette voie d'être parfait, selon les conseils du Christ. Alors le moindre acte d'obéissance, fût-il superfétatoire, possède une valeur particulière. Cette perspective concerne les religieux et religieuses, pour lesquels l'obéissance n'est pas seulement une vertu mais un voeu.  

Qu'est-ce que la vertu d'obéissance ? "Par sa nature, l'homme n'est pas ordonné à autrui" dit clairement saint Thomas (Ia Q96 a4)... Il n'existe donc pas d'esclave par nature, contrairement à ce qu'enseigne Aristote [Sur Aristote, au passage, les inconditionnels pourront lire, à La Table ronde, le livre d'Annabel Lyon, Le juste milieu, qui vient de paraître. Juste pour ne pas le christianiser trop vite !]. Quoi qu'en ait pensé Nietzsche, les surhommes, ça n'existe pas. Les sous hommes non plus d'ailleurs.  

L'obéissance ne vient pas de la nature individuelle de l'homme mais de sa nature sociale. C'est du point de vue de la vie sociale et de ses nécessités, enseigne saint Thomas, que l'on doit pratiquer l'obéissance. Le Père Labourdette l'appelle en ce sens "la vertu du bien commun". il faut donner à l'expression "bien commun" que l'on emploie trop peu... tout son sens. Le bien commun, c'est le bien (spirituel, culturel, économique, politique) que je ne peux pas attendre par moi-même. Qui n'obéit pas n'a pas trouvé sa place à l'intérieur de la communauté du bien. Ou s'il l'a trouvé, il la trahit par sa désobéissance.

L'obéissance est donc tout entière conditionnée par ce bien commun. Elle n'est pas le résultat d'un rapport de force entre plus et moins gros bras (stupidité du bras de fer, qui ne doit pas dépasser la cour de récré). Elle naît de l'exigence du service. Si l'on vous refuse tout service sain et droit, vous êtes en droit et vous avez aussi le devoir... de désobéir.

Mais dans une société normalement constituée (comme est l'Eglise, la seule communauté qui ne supporte pas la lutte exclusive des communautarismes, qu'ils soient ethniques ou bien idéologiques et partisans), les occasions d'obéir doivent être relativement rares et toujours importantes. On n'obéit pas pour un oui ou pour un non mais seulement lorsque le bien commun est engagé.

Reprenons notre saint Thomas (Immensus Aquinas noster comme l'appelait Cajétan) : dans le Contra impugnantes au chapitre 3, il définit une société quelle qu'elle soit (communitas) comme "l'union des êtres humains pour réaliser quelque chose d'unique et pour le mener à bien" adunatio hominum ad aliquid unum agendum et perficiendum. Une société qui tient la route (une entreprise ou une famille, un mouvement ou une société politique) c'est un véritable "concert", où chacun sait ce qu'il a à faire. Multiplier les occasions d'obéissance ou d'autorité ne signifie pas rechercher le plus parfait, mais dévoiler un problème de fonctionnement - ce qui du reste ne sera pas forcément bien vu par l'autorité, surtout si le problème existe vraiment. on a toujours tendance dans ces cas-là à casser le thermomètre ou à tuer le messager de malheur comme s'il était responsable de ce qu'il annonçait. Celui qui, par son attitude hésitante, souligne un problème qui aurait pu rester purement virtuel et qui éclate au grand jour à cause de cette hésitation même, ne fait pas "politiquement" du bon travail. C'est vrai dans une entreprise... comme dans un diocèse.

En revanche, pour des religieux, qui cherchent leur perfection personnelle et non le bien commun, le problème se pose autrement. Pour des numéraires de l'Opus Dei, qui sont des laïcs vivant d'un esprit religieux et s'y engageant par voeu, le problème se pose autrement. l'objectif n'est pas le bien commun mais la perfection de la personne. Cette perfection, dans ce cadre, s'atteint par le renoncement à quelque volonté propre que ce soit….

Ref. La vertu d'obéissance

JPSC

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