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Benoît XVI :"s’il n’y a plus de valeurs qui ne doivent jamais être abandonnées, alors il n’y a plus de martyre et, sans martyre, il n’y a plus de christianisme! "

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Le pape émérite Benoît XVI a écrit une profonde réflexion sur la crise morale actuelle dans l’Église qu’il a rendue publique le 11 avril avec l’accord du pape François. L’abbé François Gouyaud (association sacerdotale "Totus Tuus" ) en donne une synthèse commentée dans le dernier numéro du mensuel « La Nef » :

Benoît-XVI©Sergey-Kozhukhov-Commons.wikimedia.org_-620x330.jpg« Le pape émérite est sorti du silence qu’il s’est imposé pour proposer une réflexion puissante sur la question des abus sexuels perpétrés par des clercs. Loin d’assigner une cause univoque à la pédophilie dans l’Église, Benoît XVI rappelle le contexte délétère des années 1960 où, en fait d’éducation sexuelle, c’est une véritable initiation à la pornographie qui a été promue. À ce moment-là, l’émancipation sexuelle absolue ne tolérait plus aucune norme et la pédophilie a été parfaitement admise.
Concomitamment, la théologie morale s’est effondrée, « laissant l’Église sans défense face à ces changements sociétaux ». Une sorte de Sola Scriptura a déconnecté l’enseignement moral de la loi naturelle, empêchant désormais de présenter l’éthique de façon systématique, faute de norme objective. Le pragmatisme situationniste s’est imposé, « où le bien n’existe plus, mais seulement le mieux relatif, dépendant du moment et des circonstances ». On ne devait plus parler d’actes intrinsèquement mauvais, mais qui voudrait mourir pour éviter ce qui n’est plus un mal en soi ? Et voici du pur Ratzinger, atteignant l’essence des choses : s’il n’y a plus de « biens qui ne sont jamais sujets à une mise en balance », s’il n’y a plus de « valeurs qui ne doivent jamais être abandonnées » même au prix de sa propre vie, alors il n’y a plus de martyre et, sans martyre, il n’y a plus de christianisme !

Une « crise du fondement »


Benoît XVI rappelle l’effort de Jean-Paul II pour répondre à cette « crise du fondement », à travers notamment l’encyclique Veritatis splendor (1993), et le tollé qu’elle suscita chez les théologiens conformistes, au nombre desquels le Suisse Franz Böcke déclarant que « si cette encyclique devait affirmer que certaines actions doivent toujours et en toutes circonstances être qualifiées de mauvaises, il élèverait la voix contre elle avec toute la force dont il disposait ». Et Benoît XVI de noter avec une certaine ironie que, heureusement, « Dieu, dans sa bienveillance, lui épargna la mise en œuvre de cette résolution » en le rappelant à lui avant la publication de l’encyclique ! La contestation, cependant, visa alors la compétence même du magistère à se prononcer – infailliblement – sur les principes moraux. On mit en cause aussi la spécificité d’une éthique chrétienne, arguant de parallèles dans les autres traditions religieuses, ce que récuse le pape émérite : « La doctrine morale de la Sainte Écriture trouve en dernière analyse le fondement de son caractère unique dans son ancrage dans l’image de Dieu, dans la foi au Dieu unique qui s’est montré en Jésus-Christ et qui a vécu comme être humain. » 
Dans le processus qui a conduit des clercs à cette trahison figure un grave déficit concernant la formation au ministère sacerdotal dans les séminaires : « Dans divers séminaires des clubs homosexuels furent établis, qui agissaient plus ou moins ouvertement et qui ont significativement modifié le climat des séminaires. » En mentionnant ici ce fait, il est clair que Benoît XVI n’écarte pas un certain type d’homosexualité dans la genèse de la pédophilie, ce qui explique sans doute l’hystérie des réactions médiatiques et cléricales à l’intervention du pape émérite. Benoît XVI se souvient amèrement que, dans certains séminaires, mieux valait projeter des films pornographiques que de lire du Ratzinger ! Et comme il n’avait pas l’intention de prendre exceptionnellement la parole pour un discours émollient, il estime que le critère de sélection et de nomination des évêques qui s’est imposé alors, à savoir la « conciliarité », entendue souvent au sens d’une attitude négative à l’égard de la tradition, a joué également un rôle. Au nom de cette « conciliarité », l’on prônait alors le « garantisme » des droits de l’accusé, ce qui excluait qu’on condamnât celui-ci à davantage qu’une suspension temporaire de son ministère. Or, et c’est encore une intuition fulgurante de Benoît XVI, ce n’est pas seulement le droit des accusés qui doit être garanti, mais aussi le droit de la foi des petits, raison pour laquelle Jean-Paul II convint avec J. Ratzinger que les délits les plus graves relèveraient de la compétence de la Congrégation pour la Doctrine de la foi, qui pourrait en outre imposer la peine maximale : l’expulsion du clergé.

Le refus de Dieu

Ultimement, c’est le refus de Dieu qui explique que la puissance devient le seul principe, hors normes du bien et du mal. C’est en raison de l’absence de Dieu que la pédophilie a atteint de telles proportions. Corrélativement, la désinvolture à l’égard de l’Eucharistie a pu conduire au blasphème suprême d’un prédateur prévenant sa victime en ces termes : « Ceci est mon corps qui sera livré pour vous. » La tâche présente, alors que « l’Église meurt dans les âmes », consiste non pas à créer une Église meilleure au gré d’une restructuration politique, mais à renouer avec l’Église de martyrs, de témoins authentiques, pour répondre à l’accusation du diable insinuant qu’il n’y a pas de justes.

Abbé Christian Gouyaud

© LA NEF n°314 Mai 2019

Ref. Le testament de Benoît XVI

L’abbé Gouyaud,  docteur en théologie, curé dans le diocèse de Strasbourg, membre de Totus tuus, il est l’auteur notamment de La catéchèse, vingt ans après le Catéchisme (Artège, 2012), Quelle prédication des fins dernières aujourd’hui ? (La Nef, 2011). Il collabore régulièrement à La Nef.

JPSC

Commentaires

  • Quelle forte bouffée d'air théologique frais dans ce monde où les miasmes du mal semblent avoir pénétré au plus profond de l'Église.

  • Le Saint Père Benoît XVI a raison de souligner le lien entre sexualité erratique ou déviante et le rejet du Dieu trinitaire. Dieu est vécu comme un obstacle à la Liberté sans limite, tous azimut. C'est la recherche sans limite d'une liberté pathologique qui fonde le rejet de Dieu. Cette recherche pathologique s'ancre dans le « non serviam » de Lucifer qui s’exclut de la relation de Dieu.
    Ne peut-on d'ailleurs pas lire l'équation dans l'autre sens : c'est la volonté (ou le vécu) d'une sexualité erratique ou déviante qui impose la négation du Dieu trinitaire, intrinsèquement relation d'amour dès avant le temps.
    L'objectivité doit disparaître devant le subjectivisme absolu, vu comme seul garant, seul possible, de la Liberté.

  • … oui, "c'est la recherche, sans limite, d'une liberté pathologique qui fonde le rejet de Dieu".
    C'est aussi mon avis.
    Dans sa grande bonté, le Seigneur nous a gratifié d'une grande liberté de faire, d'agir, de parler, de prier … de satisfaire nos cinq sens, de nous reproduire ...
    Responsabilité que n'a pas l'animal. Et pourtant, de plus en plus, les chercheurs scrutent son comportement et y voient parfois en enseignement qui pourrait servir à l'humain.
    Ils (les mammifères) arrivent à se régler naturellement niveau appétit (nourriture - sexe) et ils trouvent ce qui leur convient dans la nature ce qui va précisément les nourrir et parfois même les guérir, d'instinct. Une certaine régulation naturelle existe chez eux ... Remarquable ! Merveilleux !

    De toutes les façons, si nous sommes attentifs, le Seigneur nous éduquent nous les humains et nous révèle les grandes lignes du comportement qui convient, mais nous laisse libres. Elles sont inscrites dans les 10 commandements avec en plus les soins à apporter à notre âme pour qu'elle reste toujours fixée sur Lui, notre Dieu Créateur, Rédempteur, Amour puissant, pour dominer sa Création et travailler à son Bien. Car, oui, nous avons compris qu'elle est éternelle et qu'à notre mort charnelle, elle entrera dans le monde à venir si nous avons travailler à la sanctifier comme nous le demande l'Eglise qui est maternelle et paternelle à la fois. Elle ne veut que notre Bien suprême. Le Pape Benoît XVI est un vrai père qui nous conduit vers le Vrai chemin, pour nous éviter le feu de l'enfer...

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